Soupe ou bourguignon que tu as prépar/é/ée/és ?
Bonjour,
je suis tombé sur une question qui me turlupine. Encore un participe passé…
C’est le ou qui semble poser problème.
La phrase est : C’est une soupe ou un bourguignon que tu as préparé ?
Ce préparé, comment doit-il s’accorder ? Cet accord change-t-il si le bourguignon vient d’abord ? Est-ce un accord de proximité ?
Je vous remercie d’avance.
Pour la question du « ou exclusif » avec deux genres différents ou deux personnes différentes, le Grevisse constate que la tendance est l’accord avec le premier terme, c’est-à-dire le contraire d’un accord de proximité.
L’article se termine sur la possibilité d’une simple absence d’accord, avec un exemple du type « c’est… que ». La neutralisation du COD n’est pas alors spécifiquement liée au mot « ou », mais au fait que ce COD est, dans la question, pronominalisable en « ce que ».
Souvent, il faut donc faire le choix du terme qu’on privilégie :
* il y a chaque jour sur la table une soupe ou un bourguignon que tu as préparée ou préparé
répondant à ces deux logiques syntaxiquement possibles :
– il y a chaque jour sur la table une soupe (ou un bourguignon) que tu as préparée
– il y a chaque jour sur la table une soupe (ou un bourguignon que tu as préparé)
* il y a chaque jour sur la table une choucroute ou des raviolis que tu as préparée ou préparés
Mais quand on peut pronominaliser en neutre, il suffit de ne pas tenir compte du genre et du nombre, et de ne pas accorder :
* c’est une soupe ou un bourguignon que tu as préparé ?
* c’est une soupe ou un bourguignon, ce que tu as préparé ?
* c’est une choucroute ou des raviolis (ce) que tu as préparé ?
Extraits du Grevisse
==== Quand les donneurs diffèrent quant à la personne ou quant au genre, on voit quel est le terme qui intervient (ou qui n’intervient pas) dans l’accord ; contrairement à ce que disent beaucoup de grammairiens, le premier terme détermine plus souvent l’accord que le deuxième.
==== L’accord est fait, certainement ou apparemment, avec le dernier terme :
* On entourait d’une particulière déférence celui ou celle qui était « RESTÉE à écrire » (PROUST).
==== L’accord est fait, certainement ou apparemment, avec le premier terme :
* Est-ce la chair ou l’esprit dans Tristan qui EST INTÉRESSÉE ! (CLAUDEL)
* Qu’est-ce qu’on fait le soir, quand papa ou maman n’est pas RENTRÉ à huit, neuf heures ? (FRAPIÉ)
* Quelle verge d’épine ou quels charbons ardents me GUÉRIRA du mal dont je grince les dents ? (M. NOËL)
* Je veux rentrer dans mon pays, avec l’idée de trouver au chevet de notre église, près de la rivière, l’ange ou la fée que m’a REFUSÉ l’Asie (BARRÉS).
* Quel poison ou quelle drogue m’a-t-on INJECTÉ, qui m’incendie ? (J. ROY)
* Quelque hématome ou blessure que je m’étais INFLIGÉ en jouant au football (RINALDI).
* Un sentiment ou une expression ORIGINAL (R. DESNOS).
* Plateau ou table UTILISÉ pour servir le café (Trésor, s. v. cabaret).
* Tâche ou service IMPOSÉE (Dict. du fr. vivant, s. v. prestation).
==== Nous avons ci-dessus, à deux reprises, utilisé la formule « certainement ou apparemment ». Il ne faut pas oublier en effet que le masc. est aussi le genre indifférencié et que la troisième personne est la personne indifférenciée, la « non-personne ». Dès lors le recours à ce genre ou à cette personne peut être, soit la marque d’un accord avec le terme qui est à ce genre ou à cette personne, soit une absence d’accord. Cela est particulièrement vrai du participe passé conjugué avec avoir que certains laissent invariable même quand l’objet direct précède.
Voici un ex. où le masc. du receveur contredit le genre des donneurs légitimes :
* Est-ce une ou deux bouteilles de vinaigre que vous m’avez DEMANDÉ ? (TROYAT)
Le participe passé est-il laissé invariable ou bien s’accorde-t-il avec les antécédents neutralisés, comme si, dans la pensée, un pronom neutre (ce, par ex.) en tenait lieu ?
En réalité, la question porte sur un plat unique. Il sera l’un ou l’autre. Le « ou » est exclusif. Il faut donc un singulier.
C’est une soupe ou un bourguignon que tu as préparé ? le participe passé s’accorde bien (le COD « que » étant placé avant et le PP étant accompagné de « avoir ») mais il est singulier.
Exemples :
« Ou » inclusif : un centre accueillant les personnes malades ou âgées ne refusera pas une personne malade.
« Ou » exclusif : le restaurateur vous proposant une formule avec entrée ou dessert ne vous permettra pas de prendre les deux.