Si les arbres étaient un décor peint et que les roses soient/fussent/étaient artificielles, on pourrait comprendre.
Bonjour !
Je bute encore sur la concordance des temps ou des modes.
J’ai d’abord écrit spontanément :
« Si les arbres étaient un décor peint et que les roses soient artificielles, on pourrait comprendre. »
Maintenant, je me dis que ce serait plus logique :
« Si les arbres étaient un décor peint et que les roses étaient artificielles, on pourrait comprendre. »
Qui a le même sens que :
« »Si les arbres étaient un décor peint et si les roses étaient artificielles, on pourrait comprendre. »
Si le subjonctif est demandé par le « que », ce serait peut-être plutôt :
« Si les arbres étaient un décor peint et que les roses fussent artificielles, on pourrait comprendre. »
Mais pourquoi les arbres auraient l’indicatif et les roses le subjonctif ? Je ne pense pas que ce soit logique, mais est-ce l’usage ?
Merci !!
A. Système de temps.
Votre phrase est au présent, ou plus précisément elle est dans un texte au présent, elle s’inscrit dans le système présent, même si ça ne se voit pas avec les trois seuls verbes que vous montrez (un imparfait modal après « si », un temps à trouver après « que », un conditionnel présent à la fin), mais vous pourriez terminer la phrase par « mais ce n’est pas le cas ».
— Si j’étais riche, je voyagerais… mais je ne suis pas riche.
Dans le système présent, il n’y a aucune concordance des temps à appliquer.
La concordance des temps dans un texte au présent, ça n’existe pas, oubliez cela.
B. Si… et que…
Beaucoup de conjonctions peuvent ne pas être répétées, et être reprises par « que » :
— Quand je serai riche, et que je voyagerai…
Après un « que » remplaçant un « si » d’irréalité dans une coordination de propositions conditionnelles, on utilise le subjonctif :
— Si j’étais riche, et qu’il pleuve, j’achèterais un parapluie. (mais je ne suis pas riche et il ne pleut pas)
— Si j’étais en vacances, et qu’il fasse beau, et que je sois en forme, et que j’aie un vélo, j’irais me balader.
Le premier irréel se met à l’imparfait (mais ce n’est qu’un imparfait modal, que vous auriez tort de nommer indicatif), et les suivants au subjonctif.
Vous savez bien qu’on ne dit pas :
— Si j’étais en vacances, et qu’il faisait beau, et que j’étais en forme, et que j’avais un vélo, j’irais me balader.
Et donc pour votre phrase :
— Si les arbres étaient un décor peint, et que les roses soient artificielles, on pourrait comprendre. Mais ce n’est pas le cas.
C. Le subjonctif imparfait.
a)
Le subjonctif imparfait s’utilise dans le cadre de la concordance des temps :
— Je veux qu’il vienne –> Je voulais qu’il vînt
— Je regrette que les roses soient artificielles –> Je regrettais que les roses fussent artificielles
Mais cela ne concerne en aucun cas votre phrase qui s’inscrit dans un système présent.
b)
Il existe aussi un usage classique du subjonctif imparfait qui ne s’inscrit pas dans le passé, et qui insiste seulement sur l’irréel dans le présent :
— Je voudrais qu’il fût déjà là (hélas il n’est pas là).
Cet usage n’est pas vraiment enseigné, mais il est partout en littérature, dans les situations d’irréel, en particulier de regrets.
L’usage moderne est d’utiliser le subjonctif présent dans le système présent, indépendamment du sens (attente ou regret) :
— Je voudrais qu’il vienne demain. Je voudrais qu’il soit déjà là.
Peut-on tenter d’utiliser l’imparfait du subjonctif dans votre phrase ? Non, pas avec le ton moderne ou relâché du « on pourrait comprendre » qu’on trouve à la fin. Mais en insistant sur l’irréel, et sur le regret devant le constat que le roses ne sont pas des roses artificielles, on pourrait tenter : Je regrette que pour m’accueillir dignement vous ayez cru devoir abattre mes arbres et couper mes roses. Ma joie serait plus grande si ces arbres couchés à terre étaient un simple décor, et que ces roses fussent artificielles. Hélas ce sont bien les fleurs de mon rosier que je vois dans ce pot. Mais le plus simple, pour des textes actuels, est de ne pas utiliser cette possibilité résiduelle du subjonctif imparfait en contexte présent.
Merci !! précisions très utiles… donc ma phrase du début était juste, puisque l’imparfait n’est là qu’à cause du « si » dans une phrase au présent !!!
Bonsoir,
Le français étant une langue absurde, il convient de suivre l’usage et non la logique qui ici devrait convoquer le conditionnel présent ; « Dans la configuration où les arbres seraient un décor peint et où les roses seraient artificielles, on pourrait comprendre. » , mais après si on remplace le conditionnel présent par l’imparfait, même s’il s’agit plus d’exprimer l’irréel que le passé, et après que, généralement le subjonctif, en veillant à la concordance des temps comme l’a très bien expliqué Chambaron, sachant néanmoins que le subjonctif présent à la place du subjonctif imparfait est souvent toléré voire parfois nécessaire.
Merci pour cette explication très éclairante !
La construction que vous évoquez (si… et que…) est destinée à éviter la répétition de si (on devrait écrire si… et si…).
Dans le premier cas, le mode verbal après que est habituellement le subjonctif (c’est étonnant mais c’est ainsi de longue date) bien que l’indicatif soit de plus en plus admis. Dans le deuxième cas on conserve l’indicatif après le second si. Voir l’analyse au dernier point de cet article.
Il faut néanmoins toujours assurer la concordance des temps :
« Si les arbres étaient un décor peint et que les roses fussent artificielles, on pourrait comprendre. »
« Si les arbres étaient un décor peint et que les roses étaient artificielles, on pourrait comprendre. »
« Si les arbres sont un décor peint et que les roses soient artificielles, on peut comprendre. »
« Si les arbres sont un décor peint et que les roses sont artificielles, on peut comprendre. »
Merci ! très utile !
Bonjour,
On peut fort bien se passer du subjonctif imparfait sauf à assumer d’en user à toutes les personnes.Le subjonctif présent suffit.
Qui écrirait aujourd’hui « Si les framboises étaient vertes et que nous les mangeassions, nous en serions bien ennuyés. » ?
Merci ! je suis d’accord !