s’entre-tuer, conjugaison
Bonjour,
Écrit-on : on s’est entre-tué ou on s’est entre-tués ?
Merci
Je préfère m’en tenir, pour ma part, au sujet que soulève la question posée par Paulinette, à savoir l’accord du participe passé des verbes pronominaux réciproques*, comme s’entretuer (ou s’entre-tuer : cf. mon message précédent), lorsque le sujet est le pronom indéfini on.
*Chaque être exerce une action sur chacun des autres (se disputer, se retrouver, s’embrasser, se saluer, etc.).
En ce qui concerne le part. passé de ces verbes, le pluriel est, en principe, logique. En effet, un rapport réciproque suppose au moins deux acteurs. Toutefois, on rencontre aussi – moins souvent donc – le singulier, notamment quand le sujet est un singulier à valeur de pluriel,comme on.
A cet égard, le Bon usage électronique de 2017 (§ 348) donne les ex. suivants :
– Part. passé au pluriel :
« Et, s’étant salués , on se tourna le dos (Mme Bov., II, 8). , — Sept longues années qu’on ne s’était vus !(Léonides, II, 6.) , — On s’est séparés à regret (Tante Martine, p. 84). , — On ne se serait peut-être jamais rencontrés (Les jeux sont faits, p. 89). , — On s’était fâchés [= brouillés] (Rhinocéros, II, 1). » ,
– Part. passé au singulier :
L« Oudry le garantissait, autrefois ; on s’est fâché [= ils se sont brouillés] (Éduc., II, 3). , — On s’était séparé on ne peut plus mécontent de part et d’autre (Été dans le Sahara, p. 33). , — On s’est disputé à la séance (Aziyadé, III, 25). , — On s’est entre-regardé (Seconde porte, p. 32). , — On ne s’était pas lié. On s’est retrouvé ensuite (dans le Monde, 10 janv. 1975). , — On ne s’est jamais aimé (Mandarins, p. 254). , — Mon camarade et moi on s’est embrassé (Herbe à brûler, p. 123). , — On [= ils] avait vécu comme mari et femme […]. Et l’on s’était aimé ( dans le Monde, 8 juillet 1983). » ,
Ma conclusion : On peut mettre au singulier le participe passé des verbes pronominaux réciproques dont le sujet est on. Toutefois, je recommande d’employer le pluriel, qui est plus courant et plus logique. De plus, pour le cas où on désigne des personnes déterminées, l’Académie française estime que « l’accord se fait tout naturellement en genre et en nombre » et donne ces exemples avec le participe au pluriel : « On s’était fâchés ; On s’est séparées à regrets ; »
J’écrirais donc, selon le contexte et de préférence :
– on s’est entretués (on = ensemble d’hommes ou bien ensemble d’hommes et de femmes) ;
– on s’est entretuées (on = ensemble de femmes).
Rem. : Dans l’ignorance du sexe et du nombre des personnes concernées, je considère qu’il convient d’écrire : On s’est entretué, en application de la règle suivante, rappelée par l’Académie française (cf. son site, rubrique Question de langue, article « On, nous, vous (accord) » :
« Le pronom indéfini on, qui désigne un sujet dont on ignore le sexe ou le nombre, exige, en principe, un attribut ou un participe au genre non marqué, c’est-à-dire au masculin, et au singulier. »
Bonne soirée à tous !
L’Académie française écrit dans le 9e éd. de son Dictionnaire (pour ma part, j’écrirais de préférence : de son dictionnaire) :
« ENTRETUER (S’) – on écrit aussi ENTRE-TUER (S’) ◇ v. pron. xiiie siècle.Se tuer l’un l’autre, les uns les autres. Dans le cirque, les gladiateurs s’entretuaient. »
Il s’agit d’un verbe pron. dit « réciproque »= « se tuer réciproquement, mutuellement ».
AngelTears, je suis étonné que vous n’évoquiez pas la possibilité d’autres accords : On s’est entretuées, etc.
Bonjour,
Dans un objectif de « simplicité », et pour éviter d’embrouiller éventuellement Pautinette, je lui ai dit ainsi pour lui signifier que l’accord était à faire.
Mais je prends bonne note de votre remarque quant à la possibilité de fournir plus de détails 🙂
Bonjour,
On écrit en un seul mot (depuis 90), et cela fonctionne comme le verbe tuer > On s’est entretués.
Ceci dit, si on souhaite l’écrire avec le -, cela s’écrira de manière semblable > On s’est entre-tués.
Si vous ne faites pas partie de la bataille, et que les personnes désignées par ‘on’ ne sont pas bien définies, n’accordez pas. « A la bataille de Marignan, on s’est entretué » (même s’il y a un sens pluriel : les soldats se sont entretués). Gardez l’accord impersonnel : il y a eu de l’entretuerie.
Et même si les combattants sont bien identifiés, bien que ‘on’ puisse remplacer n’importe quel pronom, y compris ‘ils’, je déconseille l’accord.
« Vite, vite, on s’est levé, on a attelé la charrette, habillé les enfants à moitié endormis, et l’on s’est sauvé par la traverse avec quelques voisins. Comme ils achevaient de monter la côte, le clocher a sonné trois heures. Ils se sont retournés une dernière fois. » — Alphonse Daudet
Si vous faites partie du groupe, que ‘on’ = ‘nous’, alors la tendance actuelle est d’accorder au pluriel.
Mais même avec un ‘on’ qui désigne très clairement ‘nous’, la conjugaison impersonnelle est fréquente et intéressante. Quelques exemples pris dans Wikisource parmi des milliers :
« Oui, on a pillé, on s’est saoulé, on a jeté des gendarmes à l’eau, on s’est battu contre la troupe. » — André Savignon
« Un soir, on s’est battu et l’on nous a menés au poste. » — Jules Vallès
« et nous voilà, vous et moi, parvenus au point d’où l’on est parti. » — Beaumarchais
« Mariette et moi, on s’est regardé tous les deux. On n’a pas bougé. Puis on s’est regardé encore, et on s’est élancé sur eux. » — Henri Barbusse.
J’y vois personnellement un certain détachement. L’auteur parle de lui avec un regard extérieur. Ces auteurs n’utilisent pas le pronom ‘on’ sans raison. Chez Hugo, j’ai trouvé beaucoup d’alternances qui sont des alternances de point de vue, du style : « Nous nous sommes entretenus longuement. Puis on (tout le monde dont moi) est passé au salon ».
Pour un récit de bataille, je préfère l’absence d’accord.
Le « on » familier s’accorde certes : « Ils nous ont prévenus le matin, on est allés à la bataille, on s’est entretués et on est rentrés manger. »
Mais le « on » utilisé par choix mérite un accord à l’ancienne : « Notre régiment s’est avancé dans la clairière, et au signal, on s’est entretué. Cela a duré trois jours. » Ce n’est pas une simple succesion d’actions, c’est l’introduction d’un « nous » dans un contexte de bataille dont on est un des acteurs, mais pas tout-à-fait le sujet.
J’ajoute que ce n’est pas une simple question d’époque. Les auteurs cités plus haut font parfois l’accord pour des choses simples :
« On est venus au rendez-vous. » — Jules Vallès