se plaindre que
Bonjour,
La phrase suivante est-elle correcte (notamment concernant les temps employés) ?
« Je ne veux pas vous entendre vous plaindre que vous êtes fatiguées, demain. »
(contexte : deux fillettes discutent à une heure tardive au lieu de dormir, et se font disputer)
Merci !
Hi BBFolk,
Oui cette phrase est correcte, vous pouvez utiliser le présent dans ce contexte. Elle relève un peu du style relâché, mais je l’ai déjà entendue plusieurs fois. Sinon vous pouvez aussi utiliser le futur. Par ex :
– Je ne voudrai pas vous entendre vous plaindre que vous êtes fatiguées demain.
Good night ! 🙂
Bonsoir,
A mon avis, on peut écrire :
Demain, je ne veux pas vous entendre vous plaindre :
– que vous êtes fatiguées ;
– de ce que vous êtes fatiguées. La construction précédente est préférable ;
– d’être fatiguées. Si vous aimez les infinitifs…
Sinon, se plaindre que se construit généralement avec le subjonctif. Ex. : Il se plaint qu’on l’ait abandonné (Ac.)
» Je ne veux pas vous entendre vous plaindre que vous êtes fatiguées, demain. »
Dans tout ce fatras, vous trouverez peut-être un élément de réponse :
* Se plaindre que
Avec des sujets différents, c’est tout à fait valide : Il se plaint que je vienne. Je me plains qu’il vienne.
Avec le même sujet, il y a une forme plus légère : il se plaint de travailler au lieu de il se plaint qu’il travaille. Cette forme me semble obligatoire dans la plupart des cas.
Mais La Fontaine a pourtant écrit : La mouche […] se plaint qu’elle agit seule.
J’y vois l’expression de la plainte : il prétend qu’il travaille trop dur, il affirme qu’il travaille trop dur, il se plaint qu’il travaille trop dur.
Je pense que c’est formellement correct, que ça perdure dans le parler populaire, que c’est acceptable dans votre dialogue : vous vous plaignez haut et fort que vous êtes fatiguées. Si la plainte n’est pas exprimée, que vous pleurez seules sur votre sort, je pense qu’il faut écrire : vous vous plaignez d’être fatiguées. Le mot « entendre » montre l’expression de la plainte, et autorise le « vous vous plaignez que vous ».
* Le mode après se plaindre
Comme pour beaucoup de verbes, c’est le subjonctif pour le subjectif : Je me plains qu’il parte. Je trouve que c’est dommage qu’il parte.
Mais l’indicatif reste possible pour le constat exprimé, comme avec le verbe dire. L’indicatif sonne souvent plus définitif, plus rude, plus ancien, plus populaire, moins lissé, mais est valide : La mouche se plaint qu’elle agit seule. Tu te plains que je suis parti (je suis parti et tu t’en plains). Il se plaignait que tout allait mal. Il s’est plaint que vous étiez fatiguées. Un client se plaint que vous n’avez pas répondu (deux informations : vous n’avez pas répondu, et il s’en est plaint). Vous vous plaindrez que vous êtes fatiguées. Ça manque carrément d’élégance et c’est pour ça que c’est beau, c’est cinématographique : devant les débris, l’enfant se plaint que son jouet est cassé.
« Vous vous plaignez que vous soyez fatiguées » me semble incongru. On est très clairement dans la situation : constat + expression d’une plainte, et non dans la situation d’un regret subjectif. Puisque l’indicatif est encore toléré, ne nous en privons pas.
* Subjonctif après vouloir
C’est la règle : Je ne veux pas qu’on vous entende. On ne veut pas que je vous entende.
Avec le même sujet, on met un infinitif : on ne veut pas vous entendre, je ne veux pas qu’on vous entendre.
Le subjonctif présent est caché dans l’infinitif, l’infinitif absorbe tous les temps, on est en règle, on ne poursuit pas au subjonctif.
Je ne veux pas qu’on entende ce qu’il dit. Je ne veux pas entendre ce qu’il dit.
Ce n’est certainement pas le verbe vouloir qui appellerait un subjectif en fin de phrase, même par attraction.
* Le temps du verbe vouloir
On accorde le verbe vouloir au temps de la volonté : je veux partir demain. L’adverbe complète partir et non vouloir. C’est aujourd’hui que je veux.
Pour exprimer une volonté au futur, il faut contextualiser : si c’est intéressant, je ne voudrai certainement pas partir. Demain, je serai très occupé, je ne voudrai pas vous entendre.
Si la volonté exprimée dans votre phrase spontanée est une volonté présente, et non pas une analyse de ce que sera cette volonté demain, conservez le présent.
* La place de l’adverbe
Si ça sonne faux, c’est que vous n’avez pas écrit ce que vous vouliez écrire.
Vous réglerez le problème en déplaçant l’adverbe « demain » au plus près de « dire », ou de « entendre », ou de « vouloir » :
— Je ne veux pas vous entendre dire demain que vous êtes fatiguées.
— Je ne veux pas vous entendre demain dire que vous êtes fatiguées.
Je choisirais la deuxième phrase, pour appliquer « demain » à « entendre », pour être au plus proche de la volonté exprimée par la principale (ne pas entendre demain).
Mais la meilleure place, qui règle plusieurs problèmes à la fois, est de considérer que votre verbe vouloir est conjugué au présent en tant que futur proche, et d’y accoler l’adverbe.
— Je ne veux pas demain vous entendre dire que vous êtes fatiguées.
— Demain je ne veux pas vous entendre dire que vous êtes fatiguées.
C’est sans doute le sens le plus proche de votre intention.
* Donc
je préconise un déplacement de l’adverbe et la forme « se plaindre de » :
— Je ne veux pas demain vous entendre vous plaindre d’être fatiguées.
ou en tolérant « se plaindre que » malgré un sujet identique, un indicatif à suivre :
— Je ne veux pas demain vous entendre vous plaindre que vous êtes fatiguées.
Merci beaucoup pour toutes ces réponses ! 🙂