se faire un / le plaisir
Bonjour,
Nous aurons le plaisir de vous recevoir chez nous demain soir.
Nous nous ferons un plaisir de garder les enfants la fin de semaine prochaine. (source)
Savez vous pourquoi on emploie l’article indéfini dans la deuxième phrase ? On explique par la suite « plaisir de garder les enfants ».
Merci
== Se faire + attributif
Expression utilisée dans ce sens : Il se fera un plaisir de venir = ce sera pour lui un plaisir de venir.
Les deux formulations sont attributives, signifiant : « de venir » sera « un plaisir » « pour lui », où « un plaisir » est attribut de « de venir ».
L’expression « se faire… de… » est étonnante et sa syntaxe est difficile à expliquer. Il faut prendre cela comme une tournure assez rare, difficile à manipuler. Selon le Grevisse, « un plaisir » est COD du verbe transitif « faire » utilisé pronominalement, mais il ne dit pas ce qu’est alors « de venir ». Selon moi, c’est « de venir » qui est le COD de « faire » et « un plaisir » est attribut du COD : il (sujet) fait (verbe attributif), en lui (COI), de venir (COD), un plaisir (attribut du COD).
== Le déterminant
Une fois cela (très mal) expliqué, il reste la question du déterminant :
(a) * Ce sera (pour lui) un plaisir de venir.
(b) * Il aura le plaisir de venir.
Ce sont deux constructions radicalement différentes, et ce n’est pas une spécificité du français.
Si vous parlez un peu anglais, vous voyez le parallèle :
(a) * ce fut un plaisir de… : it was a pleasure to…
(b) * j’ai eu le plaisir de… : I’ve had the pleasure of/to…
Ce n’est pas une nuance du français, c’est une nécessité de sens.
== Attribut + sujet postposé, ou nom + complément du nom.
(a) Existence, première apparition, information.
On dit : j’ai vu un chat, et non : j’ai vu le chat.
On dit : j’ai passé un moment agréable, et non : j’ai passé le moment agréable.
La première évocation d’une chose ou d’un fait est une déclaration d’existence ou de réalité, et on utilise un déterminant indéfini. C’est normal, et c’est ainsi que les attributs sont généralement introduits par un déterminant indéfini (un chat est un animal, le chat est un animal).
On dit ainsi : cela fut pour moi un plaisir ; c’est pour moi un plaisir de venir; venir sera pour moi un plaisir.
Le syntagme « un plaisir » est dans ces trois phrases attribut respectivement : de « cela », de « de venir » sujet postposé, de « venir » sujet antéposé.
(b) Complément du nom déterminatif
Dans la seconde phrase, « de » est une préposition introduisant un complément du nom déterminatif : le chat de mon voisin, l’art de recevoir, la grandeur de la France, le plaisir de venir…
Si une information apparaissant pour la première fois dans un texte a un déterminant indéfini (j’ai croisé un chat ; j’ai un ami), tout complément du nom déterminatif oblige à tout définir par rapport à lui, en cascade. Et tout ce qui vient avant le dernier terme est porté par un article défini.
J’ai croisé un chat. J’ai croisé le chat d’un ami. J’ai croisé le chat du frère de la femme d’un ami… L’ami détermine la femme, la femme détermine le frère, le frère détermine le chat.
On comprend bien en écoutant ceci jusqu’au dernier mot : https://www.youtube.com/watch?v=phK0oi4qvXk.
Il se trouve que « vous recevoir chez nous demain soir » est une chose précise, et donc tout ce qui précède cette chose doit donc être porté par des déterminants définis.
Exemple : j’exprime mon regret de la rareté du plaisir de vous recevoir.
C’est la règle de l’enchaînement des compléments du nom, en cascade ou non, qui s’applique : « plaisir » a un complément du nom déterminatif, il doit donc prendre un déterminant défini.
Merci beaucoup, Merou, pour votre réponse détaillée.
Si vous parlez un peu anglais…
Je le parle, mais je connais mieux le français. En plus, ma langue maternelle ne possède pas d’articles.
Nous nous ferons un plaisir de
Nous nous ferons une joie de
Nous nous ferons un devoir de
Nous nous ferons une obligation de
Nous considérerons comme un plaisir/une joie/un devoir/une obligation de
X deviendra un plaisir/ une joie/un devoir/une obligation
On a une sorte de transformation de X en un plaisir/une joie/un devoir/une obligation (parmi d’autres).
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Nous aurons le plaisir/la joie/ le devoir/l’obligation de : cette fois-ci le plaisir est simplement défini.
Je ne sais pas si mon explication est assez claire.
se faire un plaisir de : Faire quelque chose avec empressement, avec zèle.
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- Dès le lendemain matin nous nous présentons chez l’horticulteur Lemoine, qui nous reçoit très aimablement et se fait un plaisir de nous faire visiter ses serres, ses jardins. — (Gustave Fraipont; Les Vosges,)
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- Avoir le plaisir de : éprouver un réel agrément à ==> nous serons contents de , nous serons presque heureux de…
L’expression se conjugue tout de même !
Les dict. que j’ai consultés donnent uniquement se faire un plaisir de + inf.
Voici celui de la Compagnie :
» Loc. et expr. Prendre plaisir, avoir plaisir à. J’ai pris plaisir à cette rencontre, j’ai eu plaisir à vous rencontrer. Se faire un plaisir de. Je me ferai un plaisir de vous offrir ce livre. Vous allez me faire le plaisir de m’écouter, de sortir ! pour donner un caractère comminatoire à une demande (fam.) »
Merci beacoup, Tara et Prince. Donc, « se faire un plaisir de » serait une expression figée. J’ai aussi l’impression que l’article indéfini est nécessaire, mais je n’arrivais pas à m’expliquer son rôle.
Se faire un plaisir de quelque chose
Se faire une cape d’une couverture
L’expression n’est pas vraiment figée
– le verbe se conjugue et peut changer de personne
– il accepte un adverbe
– le nom accepte un adjectif
—> il se fait finalement un grand plaisir de garder les enfants
Il me semble que les deux éléments soulignés ont la même fonction.
Mais quelle est cette fonction ? à mon avis elle tient à la fois du complément de moyen et de l’attribut.
Complément de moyen : se faire une cape avec une couverture – se faire un plaisir avec quelque chose
attribut : cape = couverture/ plaisir = quelque chose