Peut-on suivre son empathie ?

Bonjour,

Cette phrase me semble bizarre et incorrecte :

Simone et son grand cœur, elle n’a pas eu d’autres choix que de suivre son empathie, et de dire oui, chose pour laquelle je ne peux pas lui en vouloir, bien au contraire.

En d’autres termes, je comprends que du haut de son bon cœur et parce que c’est une personne empathique, Simone s’est sentie obligée d’accepter.

Si je me réfère au dictionnaire de l’académie, je trouve les définitions suivantes :
Suivre : s’abandonner à, se laisser conduire par.

Empathie : capacité de s’identifier à autrui, d’éprouver ce qu’il éprouve.

Du coup, le propos pourrait passer pour correct et pourtant, j’ai des doutes.

Je vous remercie par avance de votre aide.

Kimberlite Débutant Demandé le 11 mars 2024 dans Question de langue

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6 réponse(s)
 

Personnellement, je trouve – comme vous – la formulation bizarre, voire incorrecte : on suit son idée, son intuition, … mais on peut se laisser guider par sa générosité et manifester de l’empathie.
Comme l’empathie ne désigne que la capacité à se mettre à la place de l’autre, suivre son empathie n’explique pas le geste.
De nature empathique, elle avait deviné ce que son interlocuteur désirait.

joelle Grand maître Répondu le 11 mars 2024

Pour rester près de l’énoncé de départ :
Simone et son grand cœur, elle n’a pu réagir que selon son empathie/ elle a évidemment réagi selon son empathie et dire oui, chose pour laquelle je ne peux pas lui en vouloir, bien au contraire.

Tara Grand maître Répondu le 11 mars 2024

Bonjour,
Peut-on suivre ses sentiments ? Assurément, oui ! L’expression est banale. Pourtant, il est rare que l’on utilise ce verbe lorsque le sentiment est précisément identifié. On se laisse plutôt entraîner par sa colère, submerger par sa tristesse et on ne suit guère sa joie, on la laisse éclater.
Peut-on suivre sa raison, son raisonnement ? Tout autant ! mais, le plus souvent, cette formulation demeure aussi exprimée comme un principe général.
L’empathie est-elle un sentiment ou un raisonnement ? Est-ce une réaction émotionnelle qui nous permet de nous co.nnecter à autrui, une fonction essentielle et naturelle que nous partageons avec les animaux ? Est-ce une construction cognitive qui nous permet de comprendre les mécanismes émotionnels d’autrui comme apprennent à le faire les professionnels de la psyché, mais également les comédiens ? Selon le contexte, le sens donné au terme empathie relève plutôt de l’un des deux aspects, ou un peu des deux.

Fort heureusement, en français, aucun auteur ne se contente des seuls syntagmes consacrés. Quel sens aurait la création littéraire si elle se réduisait à des lieux communs.  Alors « suivre son empathie« , pourquoi pas ? Le succès de l’invention se joue alors à quitte ou double, le risque étant de créer un trouble, une incompréhension de sens, de perdre le lecteur dans la confusion. Personnellement, je partage votre impression, je trouve que cette phrase est mal écrite, qu’elle gagnerait à être plus sobre en laissant carrément tomber l’empathie : « Simone et son grand cœur, elle n’a eu d’autre choix que de dire oui, chose pour laquelle je ne peux pas lui en vouloir, bien au contraire ! » A-t-on réellement perdu quelque information ? Et si l’on tient à l’empathie, il n’y a qu’à la mettre à la place de « grand coeur » « Simone, avec son empathie, elle n’a eu d’autre choix que de dire oui, chose pour laquelle je ne peux pas lui en vouloir, bien au contraire ! »

Bruno974 Grand maître Répondu le 12 mars 2024

Vous demandez très justement si on peut suivre ses sentiments ?
Eh bien non. La raison en est que le verbe « suivre » ici évoque une volonté délibérée. On suit son idée, ses penchants, son intuition, son premier mouvement… c’est à dire qu’il y a décision de s’y conformer.
Une émotion, un sentiment, s’impose au sujet qui n’a pas le loisir de décider si oui ou non il suivra sa colère, sa joie, …, son empathie.
Et si cette expression « suivre son empathie » nous « gêne », c’est à dire si on la sent fausse, c’est parce qu’on entend bien ici  « empathie » comme  un ensemble d’émotions et de sentiments.

le 13 mars 2024.

Suivre ses sentiments, c’est choisir d’agir selon la « raison » du coeur.

« Mais, heureusement pour la Béjart, leur troupe ayant obtenu la permission de s’établir à Paris, par la seule considération que l’on avoit pour Molière, il fut plus libre qu’il n’avoit été de suivre ses sentiments, et il épousa la petite Béjart. » (Les intrigues de Molière et celles de sa femme [pamphlet])  »
« Wolfgang répond qu’en ces matières-là chacun est libre de suivre ses sentiments, et que, lui, il se laissera tranquillement fusiller. » (Baudelaire, Oeuvres posthumes)
« Quoi qu’il en soit, dans ce conflit israélo-arabe, si j’avais suivi mon sentiment, j’aurais détesté la prise de position de de Gaulle; mais rien ne peut faire que je ne discerne vers quel but il tend, et par quelles voies, et avec quels moyens médiocres. » (Mauriac, Le Nouveau Bloc-Notes 1965-1967)

le 13 mars 2024.

Je suis de votre avis Kimberlite, cette phrase est bizarre et incorrecte. Et sans logique en plus.

D’abord la première proposition ne comporte pas de verbe, et serait correcte si elle était au moins suivie d’un point d’exclamation, de points de suspension, ou encore de deux points, pour traduire une exclamation orale, comme par exemple :
(On reconnaît bien là) Simone au grand cœur !  / (Incorrigible) Simone et son bon cœur : bla-bla-bla  / (Que voulez-vous, c’est) Simone et son grand cœur…

De plus, on dira « elle n’a pas eu d’autre choix » au singulier : elle n’a pas eu l’embarras du choix (et non pas « des choix « ).
D’autre part, en toute logique le seul choix qu’elle a eu est de dire oui, son empathie étant la cause de son choix.
Et puis « chose pour laquelle  » est vraiment très lourd…
Mes suggestions :
Ah, Simone et son grand cœur… Elle n’a pas eu d’autre choix que de dire « oui », guidée par son empathie…
Les tournures qui me semblent plus justes :
Ah, Simone et son empathie !… N’écoutant que son grand cœur, elle n’a pas eu d’autre choix que de dire « oui »… ce dont je ne peux lui en vouloir, bien au contraire.  

Cathy Lévy Grand maître Répondu le 12 mars 2024

Bonjour,

pour ma part et je fais mienne votre définition, l’empathie est une capacité.

Peut-on suivre une capacité ?  : je ne pense pas.

Ouatitm Grand maître Répondu le 12 mars 2024

Bonjour Ouatitm,
Je comprends le terme capacité des dictionnaires comme un introducteur générique auquel il ne faut pas  restreindre le sens d’une grande diversité de phénomènes. Beaucoup sont appelés à s’exprimer  et dès lors, les aptitudes deviennent des attitudes. En matière d’empathie, les neurosciences ont permis de mieux cerner un sujet au départ intuitif  (Vers une approche neuropsychologique de l’empathie | Cairn.info). Ceci étant dit, je trouve aussi que « suivre son empathie » est une formulation malheureuse.

le 12 mars 2024.

Bonjour à tous,

Je vous remercie pour toutes vos réponses riches en enseignements. A vous lire et en relisant la phrase, j’ai l’impression que l’empathie a peu de place dans cette affaire qui contraint Simone à dire oui, moins en tout cas, que son grand cœur. Confusion entre empathie et compassion ?

Kimberlite Débutant Répondu le 13 mars 2024

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