Les choses qu’elle avait imaginé lui être profitables

Bonjour, dans cette phrase que j’ai trouvée dans un forum sur les accords, j’aurais tendance à dire que l’accord ou le non-accord sont possibles, ai-je raison ?

Manuel Grand maître Demandé le 4 juin 2021 dans Accords

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4 réponse(s)
 

Bonjour,

Les tolérances  orthographiques de 1990 admettent l’accord et l’absence d’accord. Ces tolérances ne sont pas  d’emploi obligatoire mais « recommandé ».  ==> Les choses qu’elle avait imaginé(es) lui être profitables.

Prince (archive) Débutant Répondu le 4 juin 2021

Bonjour,

Ici, l’accord doit se faire.
Elle avait imaginé quoi ? « Les choses ».
Les choses qu’elle avait imaginées.

Naya Grand maître Répondu le 4 juin 2021

C’est ce que j’allais mettre également, mais comme j’ai vu cette réponse : La  proposition infinitive sert de COD.

Manuel Grand maître Répondu le 4 juin 2021

Il est exact que le COD de « imaginer » est dans votre phrase sémantiquement une proposition infinitive :
— Il avait imaginé ces choses lui être profitables.
Mais cela ne suffit pas à l’invariabilité.
Notez que dans « il les a vues partir », le COD est également la proposition infinitive : « elles + partir », signifiant : « il a vu elles partir, il a vu qu’elles partaient, il a vu leur départ ». On accorde cependant parce que le sujet de la proposition est antéposé au verbe.
Toute réponse que vous avez pu lire disant qu’on n’accorde pas, parce que le COD est en fait une proposition, dresse le bon constat, mais ne donne pas la réponse orthographique avec les règles en usage actuellement. La règle en usage est le plus souvent celle donnée ci-dessus par Naya.
— Il les a vues partir (vu elles partir)
— Il les a imaginées être profitables (imaginé elles être profitables)
Dans ces deux phrases, le COD est certes une proposition infinitive, mais comme c’est le sujet de la proposition infinitive qui est antéposé au participe passé, on accorde comme si ce sujet en lui-même était le COD.

Vous avez donc deux réponses ici et trois autres sur la page entendues-dire-ou-entendu-dire.
* Selon le contributeur Chambaron (classé n°7), il vaudrait mieux renoncer à tout accord quand on utilise l’auxiliaire avoir (vous aurez 0/20 à votre dictée, mais au moins c’est clair).
* Selon le contributeur Tara (classé n°3), il faut raisonner selon le sens, et si le COD est sémantiquement une proposition, il ne faut pas accorder avec son sujet, même antéposé (mais il faut bien considérer l’implication : je les ai vu partir ; l’acceptez-vous ?).
* Le contributeur Prince (classé n°2) dit ici qu’on a le choix depuis les « tolérances orthographiques de 1990 » (mais c’est une invention de sa part).
* La règle simple, acceptée dans les écoles françaises, par la quasi-totalité des manuels scolaires, par les grammairiens normatifs, et par le Projet Voltaire, est celle exposée par le contributeur law (qui présente deux cas de figure). Le contributeur Naya n’en donne ici que la partie qui s’applique à votre cas, c’est-à-dire potentiellement la bonne.

Si vous voulez écrire selon votre idée, vous pouvez suivre les contributeurs identifiés sur ce site comme les meilleurs. Si vous venez chercher ici une norme fixe, suivez dans un premier temps les conseils de law et Naya, qui ne sauraient être qualifiés de fautifs. L’accord est en effet possible, sinon obligatoire, selon les correcteurs de l’Education nationale française.

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Maintenant, s’ajoutent deux nuances que vous pouvez décider de traiter ou non, selon votre niveau d’exigence.

1. Le verbe « imaginer » peut être traité différemment selon les phrases, à cause de sa polysémie (« voir en imagination », ou « croire »).
— Dans me rêves, je l’ai imaginée grande et blonde. Dans mes rêves, je l’ai vue grande et blonde (je l’ai vue).
— Depuis toujours, je l’ai imaginé grande. Depuis toujours, je l’ai cru grande (je ne l’ai pas crue).
Ici, il n’y a pas de règle établie.
Dans la première phrase on imagine une femme, elle peut être COD, et on accorde.
Dans la deuxième phrase on imagine qu’une femme est grande, cette femme ne peut pas être COD, et on n’accorde pas.
Et pourtant si au XIXe siècle. Le Grevisse nous dit même que l’accord est le plus fréquent (« tout le monde l’a crue morte », écrivait Hugo), malgré l’incohérence avec la règle du COD antéposé (puisque la femme n’a pas été crue).
Refuser l’accord ici est cohérent avec la compréhension que nous avons de la grammaire au XXIe siècle, mais en rupture avec des accords presque automatiques quoique syntaxiquement fautifs des écrivains du XIXe siècle.
Beaucoup de questions sur ce site concernent des accords dont on ne comprend pas la logique : la sémantique suggère l’invariabilité, mais une certaine littérature applique des accords abusifs. Les livres de grammaire scolaire soutiennent globalement l’usage agrammatical contre la logique syntaxique moderne.

2. La présence du verbe d’état « être », pour certains, insiste sur la proposition puisque son absence est possible, donc on n’accorde pas, car on insiste alors sur la proposition « cette femme être grande » et le sujet de la proposition ne saurait être syntaxiquement lui-même COD. Il serait ainsi logique d’écrire :
— Cette femme que j’ai imaginée grande.
— Cette femme que j’ai imaginé être grande.
Le raisonnement est valide. Mais il contredit l’usage des écrivains du XIXe siècle qui continuent à être une référence.

Enfin, pour la première fois depuis le début de ma réponse je donne ici mon avis. En raison des deux points précédents, qui convergent dans votre phrase (imaginer = croire et non prévisualiser ; insistance sur la proposition par le verbe « être » pourtant facultatif), je vous déconseille l’accord dans votre phrase.

Merou Maître Répondu le 4 juin 2021

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