L’embrouille que ça a faite
Bonjour,
Lors de ma dernière question, Bruno a fait remarquer que personne ne dirait « l’embrouille que ça a faite ».
Dans sa réponse, Marcel a fait remarquer que l’accord quand ça (ou cela) était sujet lui grattait un peu l’oreille. Avec l’exemple de Bruno, mon oreille elle ne me gratte pas, elle saigne carrément !
A votre avis pourrait-on trouver une raison qui expliquerait que cette phrase fasse exception à la règle ?
Je ne crois pas que l’on puisse dans le cas présent défendre la thèse de la construction impersonnelle. Pour cela, il faudrait que le sujet grammatical (ici ça) ne renvoie à rien. Contrairement aux exemples donnés par Tara ou il ne renvoie effectivement à aucune réalité, ça réfère à quelque chose : Et là le mec il a rien compris, du coup, il a refusé et je te dis pas l’embrouille que ça a fait(e) où ça = la situation qui a déclenché l’embrouille (le fait que le mec ait rien compris, qu’il ait refusé, etc.).
Soit il y a une autre (« vraie ») raison qui pourrait justifier le non accord, qui pour le moment m’échappe, soit c’est pour une « fausse » raison, comme par exemple celles évoquées par Wilmet ou par Hanse que j’extrais de ce site qui fait un point très détaillé sur cette question.
Marc Wilmet [à propos de l’impression que cela a faite] avance une explication à ce phénomène : « L’“étrangeté” imputable au pronom cela ne naîtrait-elle pas d’une confusion de support [comprenez : objet qui impose l’accord à un apport, en l’occurrence le participe passé] : « qu’est-ce qui a été fait ? » ; 1° que → l’impression (la bonne source du pronom que), 2° cela (source erronée de que, mais le pronom masculin singulier cela se superpose à l’impression, dont il sauvegarde le trait « inanimé » [3]) ? » À en croire Hanse, ladite confusion serait d’ailleurs facilitée, dans les constructions de ce type, par le voisinage immédiat du complément d’objet direct et du pronom sujet : « On a signalé maintes fois la tendance à ne pas faire l’accord avec un complément féminin qui précède quand le sujet, pas trop éloigné, est cela : L’impression que cela m’a faite peut paraître étrange, mais l’accord s’impose aussi bien que dans L’impression que ce jeune homme vous a faite. »
Oui en effet, « ça » ne peut être impersonnel.
Merci Marcel pour le lien que vous donnez ; l’article est très intéressant.
– Il n’est en effet pas sûr que toutes les oreilles soient choquées par l’impression que cela m’a faite.
– la règle du PP est quand même une convention et rien qu’une convention (avec l’auxiliaire « avoir »)
– il se peut que l’emploi de « cela » et surtout de « ça » souvent utilisés à l’oral ou dans un style légèrement relâché (puisqu’on peut utiliser un terme précis et qu’alors la question de l’accord ne se pose plus) éloigne l’énonciateur de la règle.
Oui, sacrée recherche que l’auteur du site a faite !
Bonsoir,
Il est vrai que lorsque le pronom remplace un sujet inanimé ou flou l’accord parait étrange, c’est tout simplement une question de sens. Lorsque le sujet ou le pronom est précis l’accord coule de source : « L’embrouille que la situation a produite / l’embrouille que j’ai produite ».
Ma réponse n’est pas satisfaisante >> voir celle de Marcel
Le participe passé des verbes impersonnels ou employés de façon impersonnelle est invariable.Et cette phrase est impersonnelle (ça est ici pronom impersonnel).
BDL : Certains verbes personnels, c’est-à-dire qui se conjuguent à toutes les personnes, peuvent aussi être employés à la forme impersonnelle, entre autres faire et avoir.
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- Les grands froids qu’il a fait en janvier ont nui au tourisme d’hiver.
- Les festivités qu’il y a eu dans cette ville ont laissé de merveilleux souvenirs.
- Les psychiatres qu’il m’est arrivé de rencontrer tenaient tous le même discours.
- De ces livres, il s’est vendu des milliers d’exemplaires.
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Alors pourquoi ?
Il me semble que la réponse est assez simple : le verbe impersonnel n’a pas de COD dansl es phrases ci-dessus : grands froids, festivités, livres sont sujet réel. psychiatres est COD de rencontrer et pas d’arriver.
Pour ce qui concerne votre phrase : Les embrouilles que ça m’a fait, je ne vois que cette explication : pas de sujet réel donc pas de prédicat du sujet « réel ». Le sujet ne porte pas « réellement » d’action sur quelque chose
Ce n’est là qu’une tentative d’explication.
Petite remarque : L’accord du participe passé contrairement aux autres accords n’induit pas une logique structurelle, son application est dépendante de données syntaxiques, sémantiques et morphologiques. Un automatisme apparaît difficile et, dans tous les cas, chèrement acquis. En effet, au niveau de l’apprentissage, de tels repères sont difficiles à mettre en place. Luce Petitjean – « Un vieux casse-tête : l’accord du participe passé. »