« L’Éducation sentimentale » : titre incorrect grammaticalement
Je lis sous la plume du merveilleux et immense Proust, dans son texte intitulé « Sur le style de Flaubert », ceci :
« L’Éducation sentimentale, titre si beau par sa solidité, mais qui n’est guère correct au point de vue grammatical (…) »
Je ne saisis pas en quoi le titre (« L’Éducation sentimentale ») est incorrect d’un point de vue grammatical.
Qui pourrait m’expliquer ?
L’Éducation sentimentale
En effet : sentimental ne signifie pas des sentiments ce n’est pas un adjectif relationnel comme national ou estudiantin
La preuve par neuf : si on déplace l’adjectif, on voit bien l’impropriété : la sentimentale éducation
——-
Le Robert :
Les adjectifs relationnels sont des adjectifs dérivés de
qui établissent une relation entre le nom qu’ils complètent et le nom dont ils sont dérivés. Ils sont l’équivalent d’un
ou d’une
:
J’aime me promener au parc municipal. (= au parc qui appartient à la commune)
Merveilleux, chère Tara ! Subtil et précis ! Je comprends à présent, grâce à vous. Avec mes remerciements chaleureux !
Avec plaisir Alain.
Étrange analyse… Où est l’incorrection ?
Bonjour,
Le titre est correct et pleinement justifié.
Cher Prince, merci de votre réponse. J’aurais tendance à penser plutôt que si Proust dit que le titre n’est pas correct, c’est qu’il ne l’est pas 🙂 Notre amie Tara nous explique pourquoi dans sa réponse. Avec mes salutations chaleureuses, A
Comme l’analyse fort bien l’ouvrage Flaubert savait-il écrire ?: une querelle grammaticale (1919-1921), cette remarque souvent reprise fait partie d’une analyse globale du style de Flaubert par Proust, l’un des ses fervents zélateurs.
Elle est noyée au milieu de nombreuses autres qui peuvent parfois nous sembler absconses (guéguerre stylistique entre grands auteurs sans doute…). Elle n’est en revanche pas justifiée par Proust et l’on se demande quel critère lui permet de disqualifier une tournure déjà bien établie avant Flaubert, surtout depuis Rousseau (voir liste de références ici). En revanche, le titre a fait lors de la sortie en 1869 l’objet d’une certaine incompréhension sur le sens par rapport au contenu du roman (plusieurs critiques dans la liste précitée en attestent).
Il me semble que la réponse de Tara est claire, cher Chambaron.
« Sentimental,e » ne veut pas dire : « des sentiments » mais « qui concerne les sentiments ».
« L’éducation qui concerne les sentiments » : le sens me paraît pour le moins bizarre, pour ne pas dire incompréhensible.
L’essentiel est que vous vous y retrouviez…