La vigule qui change tout
Bonsoir,
Dans la phrase:
Elle s’est permis de danser sur la scène, toute nue.
A cause de la virgule, on pourrait croire que c’est la scène qui est toute nue… correcte ?
Ce qui suit la virgule s’accorde avec ce qui vient juste avant la virgule, si j’ai bien compris ?
On dira: « Elle s’est permis de danser sur la scène toute nue. » Juste ?
Personnellement, je dirais le contraire :
Elle s’est permis de danser sur la scène toute nue. C’est la scène qui est nue.
Elle s’est permis de danser sur la scène, toute nue. On comprend que « toute nue » s’applique à une entité plus vaste que le dernier syntagme, et donc à la phrase. Comme une apposition. Même remarque pour la phrase qui suit.
Toute nue, elle s’est permis de danser sur la scène.
Complément à l’avis après la réponse de Fifi :
La virgule syntaxique sépare un mot ou un groupe de mots du reste de la phrase pour des raisons de sens, ce qu’il n’est pas possible de faire entre un adjectif et une épithète (sur la scène toute nue : nue serait épithète de scène et on ne mettrait donc pas de virgule).
Ces phrases sont potentiellement ambiguës si le contexte ne permet pas une interprétation unique.
Contextes non ambigus :
Je promène le chien de Jean qui est écrivain.
Je promène le chien de Jean, qui est écrivain.
Je promène le chien de Jean qui est un épagneul.
Je promène le chien de Jean, qui est un épagneul.
Contexte ambigu :
Je promène le chien de Jean(,) qui est malade.
On pourrait désambiguïser si on avait l’un des deux protagonistes féminin :
Je promène le chien de Jeanne(,) qui est malade // laquelle est malade / lequel est malade.
La seule règle, c’est que l’épithète qui qualifie scène n’est pas mobile*, contrairement à celle qui qualifie le sujet de la proposition.
Avec un masculin, pour mieux faire apparaître l’opposition.
Il a dansé nu sur la scène.
Il a dansé nu sur la scène nue.
Il a dansé nu sur la scène, nue
Il a dansé, nu, sur la scène.
Il a dansé, nu, sur la scène nue.
Il a dansé, nu, sur la scène, nue.
Nu, il a dansé sur la scène.
Nu, il a dansé sur la scène nue.
Nu, il a dansé sur la scène, nue.
Il a dansé sur la scène, nu.
Il a dansé sur la scène nue.
Il a dansé sur la scène, nue.
Il a dansé sur la scène nue, nu.
En espérant avoir été exhaustif, ce qui n’est pas assuré.
* Et encore, sur ce point, voir le paragraphe 334 de Grevisse : Épithètes détachées et clarté de l’expression, dont voici un tout petit extrait :
Pour la clarté de l’expression, il est souhaitable que l’épithète (notamment le participe, auquel on peut joindre le gérondif) placée au début de la phrase (ou de la proposition) se rapporte au sujet de cette phrase (ou de cette proposition).
[…]
Il faut cependant reconnaitre que l’usage des auteurs […] prend beaucoup de liberté avec la règle qui vient d’être donnée.
Oui, mis-en-trope ==> +1
Certains spécialistes (de la ponctuation nous prennent pour des idiots. Celui-là écrit que, dans la phrase : « Elle s’assit à une petite table, harassée quoiqu’elle n’eût guère marché , la virgule « est indispensable faute de quoi on pourrait penser que la petite table est harassée. » (!) (C’est moi qui est souligné.)
Cet adjectif lié au verbe (danser nu, travailler seul), pour plus de clarté, autant le mettre directement auprès du verbe.
Elle s’est permis de danser toute nue sur la scène.
Sur ce sujet, voyez les deux réponses de chambaron à une question sur « travailler seul »
https://www.question-orthographe.fr/question/fonction-attribut/. C’est de ces deux réponses que je tire la mienne ci-dessous.
Si j’ai bien compris, le Grevisse dit que quand l’adjectif est introduit par un verbe, mais qu’il n’est pas un attribut, il s’agit d’un adjectif épithète détaché se référant au sujet du verbe.
Dans « elle danse nue », « nue » est adjectif épithète détaché de « elle ».
C’est assez clair quand l’adjectif suit directement le verbe.
Si comme vous on le détache encore plus, en l’éloignant en fin de phrase, avec un autre complément intercalé entre le verbe et l’adjectif, ça reste un adjectif épithète détaché, et le Grevisse dit que l’épithète détaché se caractérise à l’écrit par une virgule.
C’est donc bien la présence de la virgule qui permet de rattacher « nue » à « elle ». Et c’est bien comme cela que je le comprends moi aussi à l’oreille.
Avec une virgule, « nue » n’est plus un adjectif épithète lié qualifiant « scène », mais un adjectif épithète détaché qualifiant « elle ».
Si vous l’entendez différemment, je pense que c’est parce que vous regroupez dans votre esprit danser-sur-la-scène, dont vous faites une sorte de verbe unique, et alors l’absence de virgule peut se comprendre (elle danse-sur-scène toute nue). Mais remplacez « sur la scène » par « au beau milieu de la scène », et je pense que comme moi vous considérerez qu’il faut une virgule pour pouvoir rattacher « nue » à « elle ».
Elle s’est permis de danser au beau milieu de la scène, toute nue.
Merci Joelle pour votre réponse. Je crois toutefois qu’il existe une règle bien définie à ce sujet… J’attends d’éventuels autres avis.
Vous avez raison d’attendre mais j’ajoute une précision à ma réponse pour ceux qui voudraient réagir :
La virgule syntaxique sépare un mot ou un groupe de mots du reste de la phrase pour des raisons de sens, ce qu’il n’est pas possible de faire entre un adjectif et une épithète (sur la scène toute nue : nue serait épithète de scène et on ne mettrait donc pas de virgule).
Bien entendu : la virgule est faite pour « casser » le lien naturel entre deux mots voisins.
Elle a abattu la maitresse de son mari qui passait par là : qui = le mari.
Elle a abattu la maitresse de son mari, qui passait par là : qui = la maitresse.
À l’oral, la nuance est rendue par un quart de soupir dans la prononciation.