Inversion sujet verbe supposition
Bonjour à tous,
J’ai tendance à inverser le sujet avec le verbe lors de la construction d’une supposition (j’ignore comment s’appelle ce type de phrases… En conséquence je n’arrive pas à trouver sur Internet une réponse à la question suivante.) Mais d’abord, un exemple pour illustrer mon propos :
Paul tenait fermement un sac plastique beige. Certainement avait-il acheté un kebab pour le déjeuner.
Est-ce grammaticalement correct, ou je me trompe ?
Merci d’avance pour vos réponses.
Tout d’abord, s’assurer que ce n’est pas une interrogation… C’est fait.
Votre phrase n’est pas correcte, à remplacer par : il a certainement / sûrement acheté un kebab...) mais elle aurait pu l’être car on pratique l’inversion devant certains adverbes ou conjonctions: voici la liste, ainsi, aussi, aussi bien, à peine, peut-être, sans doute, du moins, pour le moins, tout au moins, à tout le moins, tout au plus, encore moins, à plus forte raison.
Manny, on peut considérer que Certainement avait-il acheté est correct par analogie avec sans doute avait-il acheté (Sans doute étant couramment suivi de l’inversion du sujet). Ces phrases – un peu littéraires – se nomment des inversions linguistiques.
Lire : « stylistiques » au lieu de « linguistiques », bien sûr.
Vous diriez sérieusement : « Certainement, avait-il acheté du pain. » ? C’est votre côté anglais, peut-être.
Oui, bien sûr, mais sans la virgule. Comme je dirais Sans doute avait-il…
jJazz, que voulez-vous dire par « rogné deux points » ?
Vous aviez -2. Plus maintenant!
Intéressant. Alors il est possible de pratiquer l’inversion devant un adverbe comme peut-être mais pas certainement… C’est peut-être (justement) de là que me vient cette envie irrépressible et inconsciente d’inversion lorsqu’il s’agit d’une supposition (mais pas cette fois).
Merci pour votre réponse détaillée.
P.S : en effet, après vérification dans le dictionnaire, j’utilise à l’écrit l’adverbe certainement comme on peut l’utiliser dans la langue orale familière, en lui prêtant un sens totalement erroné.
Le TLF
2. Dans la prose narrative ou didactique, souligne le caractère probable d’une assertion, souvent en relation avec mais :
D’ailleurs, on utilise aussi « sans doute » pour exprimer un certain degré d’incertitude. C’est un fait, et d’ailleurs cette acception apparaît dans dictionnaires.
Le TLF
2. [À valeur dubitative définitive ou provisoire] Probablement, certes, je vous l’accorde. Vous avez sans doute raison; il vous arrive sans doute de
Et pour sûrement :
Wikipédia
(Dans un sens affaibli et par antithèse exprimant l’incertitude)probablement, sans doute.
Si bien que, pourquoi pas, en effet : Sûrement avait-il fait une erreur./Sans doute avait-il fait une erreur./ certainement avait-il fait une erreur.
L’inversion du sujet, bien loin d’être une erreur, permet au contraire de souligner le sens marqué d’un degré d’incertitude et de faire la différence avec le sens premier :
Il a sûrement/certainement fait une erreur (et on préfèrerait : il a très sûrement/très certainement fait une erreur – il a sans doute fait une erreur (et là on précise presque toujours : il a sans aucun doute fait une erreur.)
Bonjour, Tara.
Votre préambule est irréprochable, votre argumentaire impeccable. L’un et l’autre nous préparent à accepter votre conclusion. Logiquement, on devrait l’accepter, mais l’usage est capricieux et ne l’accepte pas (n’accepte pas « certainement » devant l’inversion sujet-verbe). Ainsi va la langue, ce n’est pas à vous que je l’apprendrais.
Attention aux sophismes (involontaires) :).
Manny, on peut considérer que Certainement avait-il acheté est correct par analogie avec sans doute avait-il acheté (Sans doute étant assez couramment suivi de l’inversion du sujet). Ces phrases – un peu littéraires – se nomment des inversions stylistiques.
Voyez-vous, je n’ai pu m’empêcher…
Je n’aime pas trop les dictat (oh le terme est fort, mettons-lui un bémol) surtout quand ils m’empêchent de réfléchir.
Je préfère de beaucoup la logique. C’est parfois elle qui fait évoluer la langue. Parfois…
Certes, je ne dirais pas -du moins dans une situation ordinaire- certainement va-t-il chercher du pain, ni d’ailleurs sans doute (mais pas sans aucun doute) ainsi se promenait-il dans les bois, ni même à peine voulait-il m’écouter.
Cette inversion linguistique (merci Prince-mais pourquoi lui avoir rogné deux points? ?) appartient plutôt à la langue écrite et certainement, (précisons : très certainement) est d’un niveau soutenu.
Ceci étant dit, ce n’est pas par mauvaise foi que je déclare que je ne serais pas choquée – et serais même assez contente- de rencontrer cette inversion du sujet avec sans doute, certainement et sûrement, ces termes étant porteurs d’un degré d’incertitude apparemment paradoxal, vu leur premier sens.
Personnellement, et après vous avoir lue trois fois, je n’ai pas compris si vous êtes pour ou contre et je commence à me demander si cet argument du « style soutenu » n’est pas invoqué à tort et à travers un peu par tout le monde, et trop souvent utilisé pour… soutenir des thèses douteuses, et ce que signifie finalement « style soutenu ». Moi aussi, j’ai un style soutenu. 🙂
Mais ce n’est pas votre faute si je ne comprends pas et ne sais pas lire. 🙂
Je suis désolée de ne pas avoir été claire, Amob.
Les niveaux de langue existent bel et bien, sur le plan lexical et sur le plan syntaxique. Impossible de le nier.
Pour faire un rapprochement :
La phrase interrogative a plusieurs formes :
– tu m’as dit quoi?
– qu’est-ce que tu m’as dit ?
– que m’as-tu dit ?
Elles n’appartiennent pas toutes les trois au même niveau de langue mais sont correctes toutes les trois.
C’est la même chose avec :
– il viendra sans doute me voir.
– sans doute viendra-t-il me voir.
Deux formes correctes pour marquer l’incertitude; l’une est plus courante que l’autre, l’autre est plus soutenue que l’une. On n’y peut rien.C’est ce qu’on peut observer dans les faits de langue.
Vous écrivez : Moi aussi, j’ai un style soutenu.
Je n’en doute pas. Et après ?
Hahahahaah
Ne vous emportez pas, chère Tara. C’est le déroulement de votre pensée et ce qui m’a paru être vos positions successives contradictoires qui m’ont dérouté. A la question que je me posais de savoir quelle était votre position définitive, je n’arrivais pas à avoir une réponse claire, tant votre coeur me semblait balancer 🙂
Mais n’allez surtout pas croire que je doute de votre intelligence ou de votre savoir, vous êtes même l’une pour ne pas dire la seule Grand maitre en qui j’ai confiance.
Cela dit, je trouve toutes ces interventions inutiles, et ça fait un peu désordre. Pourquoi ? Joelle avait répondu. Après elle, j’ai écrit un petit texte de 4 lignes où tout était dit, savoir que l’adverbe qui convient est « peut-être », mais que « certainement » a été utilisé dans le sens qui le rapproche beaucoup du sens de « peut-être ». Oui, tout a été dit et rien n’a été ajouté par la suite par les différents intervenants qui n’ont fait que répéter chacun à sa manière ce Joelle et moi avions déjà dit. Du bavardage à faire perdre l’est à un musulman 🙂
Oh mais non, Amob, je ne m’emporte pas du tout.
Vous voulez savoir ? Je ne fais que réfléchir « en direct » et je ne suis pas sûre d’avoir la solution.
Une langue est quelque chose de vivant qui ne se laisse pas mettre en boîte; qui ne se laisse pas enfermer sans piaffer dans les murs que sont les règles et les interdictions. Et je pense que cette remarque doit vous plaire…
Mais attention, je ne dis pas que les règles et les normes sont inutiles. Seulement, elles doivent être au service de la langue et non la contraindre.
Et puis, merci pour votre gentille remarque .
Mais c’est parfait, Tara !
Oui, les règles, il faut les respecter, surtout quand on les enseigne comme ici ou qu’on a des examens à passer. Il ne faut pas badiner avec ça. Elles ne suffisent pas à elles seules, mais elles sont très utiles, indispensables pour apprendre une langue.
Cela dit, tous ces **** qui citent à tort et à travers des dictionnaires, même pour expliquer que A c’est A, ou qui vont chercher dans les recoins les plus obscurs des formules étranges pour crier « voilà qui vous contredit ! » m’énervent 🙂 .
Je doute qu’ils sachent lire un dictionnaire, puisqu’ils n’ont pas été fichu de voir un petit jeu de mots dans un petit texte d’Amob.
Et puis pour savoir lire un dictionnaire, il faut savoir comment il a été conçu, et un dictionnaire ne peut pas savoir à l’avance comment moi, Roi Amob, je vais utiliser les mots et en jouer. Il ne peut pas le savoir pour en parler dans ses pages. Et combien de grands poètes ont tordu le cou à la syntaxe pour des raisons de rythmique.
Il faut se méfier de ces savants ignorants qui se targuent d’apprendre aux autres comment dire et écrire, alors qu’eux-mêmes n’ont, manifestement, pas lu plus de trois livres au cours de leur vie. C’est visible, on voit leurs fesses (pardon) à travers le pantalon. Et plus ils sont ignorants et idiots, plus ils sont prétentieux.
Si on les écoutait, on perdrait notre voix, notre verve, ils suceraient notre sang, ils nous videraient de nous-mêmes, tu n’aurais plus d’âme. 🙂
Le sujet est épineux ! Il est vrai qu’en parcourant le Grand Robert, le sens de certainement m’a paru plus clair : selon ce dictionnaire, certainement signifie de manière indubitable (en réalité le sens premier de l’adjectif certain). Toutefois, il est précisé que « certainement que » peut être employé pour former une supposition. De là à imaginer que certains auteurs aimant la concision ont voulu supprimer « que » pour aller à l’essentiel, il n’y a qu’un pas. La précision offerte par Tara avec pour exemple un passage du TLF me paraît donc honorable ; je vous en remercie.
Cependant, loin de moi l’idée de vouloir employer une écriture de niveau soutenu en usant de ces inversions : allez savoir pourquoi, j’ai l’impression qu’un paragraphe sonne mieux ainsi !