Indicatif après je ne pensais pas, je ne croyais pas + fait avéré
Bonjour
Je reviens sur la phrase
« Je ne pensais pas que vous étiez française ».
Je comprends que la concordance des temps imposerait le subjonctif imparfait : « je ne pensais pas que vous fussiez française ».
Toutefois, il me semble que la phrase au passé n’a pas du tout le même sens :
– « je ne pensais pas que vous étiez française » = vous êtes française, (état réel et certain) et pourtant je ne le pensais pas ( je ne l’aurais pas cru ).
Alors que « je ne pensais pas que vous fussiez française » = je ne pensais pas que vous puissiez être française (et vous ne l’êtes peut-être pas) – qui introduit une hypothèse avérée ou non. Ce serait d’ailleurs la vraie transcription grammaticale et de sens au passé de la phrase « je ne pense pas que vous soyez français ».
Par ailleurs, l’utilisation du subjonctif présent (expression orale) me paraît totalement incorrecte : « je ne pensais pas que vous soyez française ».
En conséquence j’aurais tendance à soutenir que la phrase « je ne pensais pas que vous ÉTIEZ française est correcte,
Merci beaucoup pour vos commentaires. J’ai eu deux réponses contradictoires.
Liza
Bonjour Liza,
Le Grévisse énonce:
§1126 b) Aux supports exprimant le doute ou la négation, on peut joindre les supports exprimant une constatation, une certitude, une vraisemblance ou une probabilité, quand ils sont accompagnés d’une négation (explicite ou implicite) ou quand ils sont soit dans une phrase interrogative soit dans une proposition de condition.
Cependant, même dans ce cas, l’indicatif est possible si l’on veut marquer la réalité du fait. Ce mode permet aussi d’exprimer des nuances temporelles absentes au subjonctif (surtout si l’on évite l’imparfait et le plus-que-parfait)
Vous pouvez donc écrire: « je ne pensais pas que vous ÉTIEZ française ».
Bonne journée
Oui, on peut dire cela. J’ai déjà écrit moi-même hier, dans le cadre de mes échanges avec Liza, que Je ne pensais pas que vous étiez française est possible (« n’est pas exclu », « n’est pas impossible »).
Ce n’est donc pas cette possibilité dont parle le « Grevisse » et que j’évoque. Je reviendrai sur le sujet dès que j’en aurai le temps.
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Je reprends donc le fil de mon propos.
La question considérée comporte les trois sous-questions suivantes :
1° Quel(s) mode(s) doit-on/peut-on employer après ne pas penser que, ne pas croire que et les formes verbales du même genre ?* Le subjonctif uniquement ? L’indicatif seulement ? Les deux modes ?
* Pour être plus précis, le « Grevisse » de 1988 (§ 1072) vise notamment les verbes exprimant une opinion (croire, penser, espérer..), une déclaration (dire….) ou une perception (entendre, voir…) quand ils sont accompagnés d’une négation (explicite ou implicite). L’actuel « Grevisse » (§ 1126) vise en particulier « les supports exprimant une constatation, une certitude, une vraisemblance ou une probabilité, quand ils sont accompagnés d’une négation (explicite ou implicite » : Je ne crois pas, je ne dis pas, je ne vois pas que nous nous soyons trompés. » (ex. forgé par les auteurs eux-mêmes ; en gras dans le texte).
2° Existe-t-il une règle et, dans l’affirmative, quelle est-elle?
3° Si les deux modes sont possibles, ont-ils des conditions d’emploi identiques ou différentes ? Quelles sont-elles ?
1. L’emploi du subjonctif et de l’indicatif est possible.
Cela ne peut être nié, puisque les grammairiens Grevisse, Goosse, Hanse, Pellat, Fonvielle, etc. l’admettent. Pour le Bon usage actuel, voir le § 1126, que Laurence a du reste cité (§ 1072 du B.U. de 1988).
Pour ma part, je l’ai admis d’emblée hier : j’ai écrit que « Je ne pensais pas que vous étiez [indicatif] française n’est pas impossible ».
2. Y-a-t-il une règle au sens où l’usage d’un des deux modes serait de règle et l’autre l’exception ? ? Cela dépend des grammairiens.
Pour le linguiste J. Cellard : oui (cf. Le subjonctif. Comment l’écrire ? Quand l’employer). Pour lui, le subj. est de règle après ne pas penser que, ne pas croire que, ne pas dire que.
Certains (Grevisse, Goosse, Hanse, Pellat, Fonvielle… ) ne se prononcent pas expressément sur cette question.
3. Les conditions d’emploi du subjonctif et de l’indicatif, avec les verbes qui nous occupent (v. 1°), qui sont différentes, sont les suivantes.
Hanse écrit : « L’indicatif peut souligner la réalité : je ne pensais plus qu’il était là (j’avais oublié cette réalité). » De même, le Bon usage indique : « Cependant, même dans ce cas, l’indicatif est possible si l’on veut marquer la réalité du fait » (§ 1126). Ex. du B.U. : Nous ne savions pas que la ville était si distante (Gide) = Nous ne le savions pas, mais (c’est un fait que) la ville était « si » distante.
Le B.U. ajoute cette autre condition d’emploi (que j’ai signalée hier) : L’indicatif « permet aussi d’exprimer des nuances temporelles absentes au subjonctif (surtout si l’on évite l’imparfait et le plus-que-parfait). »
Conclusion : Laurence, Liza, je crois que nous pouvons nous mettre d’accord sur ceci :
Si l’on met de côté la question de l’existence d’une « règle » au sens indiqué ci-dessus, existence qui ne fait pas l’unanimité, il est possible de considérer que les formes verbales ne pas penser que, ne pas croire que (qui font l’objet de la dernière contribution vue de Liza) peuvent être employées avec le subjonctif ou l’indicatif en fonction de leurs conditions d’emploi respectives (= celles qui sont reprises au point 3 ci-dessus, auxquelles il convient d’ajouter les suivantes : éviter les consonances désagréables du subjonctif, choisir l’indicatif ou le subjonctif en fonction du registre de langue souhaité*).
* Il est bien évident que je ne vais pas dire à un ami : Je ne pensais pas que tu parlasses autant de langues (phrase soumise par Liza).
Bonne soirée. 🙂
Bonjour Prince,
Je suis intéressée par votre réponse car je pense que certaines subtilités m’échappent par rapport à ce qu’il y a écrit dans le Grévisse. Je viens de lire la réponse que vous aviez précédemment donnée à Liza et l’exemple donné » nous ne savions pas que la ville était si distante » fait partie du §1126 b).
Bonne journée
Bonjour Prince,
Merci de vos explications.
Bonne journée