Gradation/accord
Bonjour,
Dans une dictée, j’ai eu la phrase : Ses montagnes, ses plaines, tout son relief ne s’accusaient pas plus nettement à leurs yeux que s’ils les eussent considérés d’un point de vue quelconque de la Terre…
Pour le mot » s’accusaient » je l’ai bien mis au pluriel par déduction, en voyant « les eussent », mais j’avais envie de mettre « s’accusait » car pour moi, c’était une gradation et « tout son relief » englobait les montagnes et les plaines.
Est-ce que je suis là seule à penser comme ça ?
Ce n’est pas une gradation, c’est une énumération :
— La table, la chaise, l’armoire, sont cassées.
Comme elle est résumée par le dernier terme, ce dernier terme sert de sujet syntaxique :
— La table, la chaise, l’armoire, tous mes meubles sont cassés.
— La table, la chaise, l’armoire, tout mon mobilier est cassé.
Pour conjuguer au pluriel malgré le dernier terme singulier, il faudrait que ce dernier terme ne soit pas englobant, mais qu’il complète, qu’il veuille dire « et tout le reste de mon mobilier« . Si là était l’intention de l’auteur, il n’avait qu’à l’écrire clairement.
Il pouvait au moins insérer un « et » avant le dernier terme (et on voit que le sens est atteint) :
— La table, la chaise, l’armoire, et tout mon mobilier sont cassés.
Il pouvait ajouter une virgule avant le verbe, créant une impression de longue liste :
— La table, la chaise, l’armoire, tout mon mobilier, sont cassés.
Sans aucune de ces précautions, d’ailleurs très insuffisantes, le singulier est obligatoire.
Le pronom COD qui suit, puisqu’il est au pluriel, reprend forcément différents éléments, et non le seul dernier englobant.
Ce n’est pas un problème insurmontable, l’antécédent d’un pronom n’est pas forcément le dernier nom :
— Mon père, ma mère, mon frère, toute ma famille est présente, car je les ai invités.
— Ma tante, ma mère, ma sœur, toute ma famille est présente, car je les ai invitées.
— La table, la chaise, l’armoire, tout mon mobilier est cassé, comme si on les avait attaquées à la hache.
La gêne à la lecture est juste la conséquence d’une phrase mal conçue.
Mais elle n’entraîne certainement pas de réécrire le début de la phrase en conjuguant au pluriel, comme vous le pensez :
— Mon père, ma mère, mon frère, toute ma famille sont présents, car je les ai invités.
— La table, la chaise, l’armoire, tout mon mobilier sont cassés, comme si on les avait attaqués à la hache.
Votre argument consistant à aller chercher le sens d’un pronom en fin de phrase pour justifier une mauvaise conjugaison au pluriel en début de phrase ne tient pas la route. Je crois que vous l’avez d’ailleurs utilisé à contre-cœur.
Vous avez sans doute repéré que votre phrase est de Jules Verne, et qu’elle est écrite dans le livre comme vous l’avez écrite ci-dessus.
L’accord au masculin pluriel de « considérés » (qu’on n’entend d’ailleurs pas en dictée) indique que l’auteur additionne « ses montagnes« , « ses plaines« , et « tout son relief« , alors que « ses montagnes, ses plaines, tout son relief » n’est pas une addition de trois termes. La phrase est donc simplement mal conçue dans son ensemble, et mal conjuguée au début.
On aurait été l’éditeur de Jules Verne, on lui aurait dit de remplacer « tout le relief » par un mot ne donnant pas l’apparence d’englober et résumer les éléments précédents, et donc surtout de supprimer ce « tout« . D’écrire par exemple « ses montagnes, ses plaines, tous ses reliefs » (il utilise plusieurs fois le mot relief au pluriel dans le livre pour tout ce qui dépasse). Ou d’écrire « ses montagnes, ses plaines, les autres variations de son relief » (et d’accorder « considérées« ). Et il aurait répondu distraitement « pas de problème, comme vous voulez ». Ce n’est pas un choix d’écriture de sa part, ce n’est pas une phrase travaillée, c’est juste la maladresse de quelqu’un qui écrivait des livres au kilomètre, et qui était bien plus intéressé par les histoires que par les accords. Ça ne sert à rien de défendre sa phrase, et c’est une très mauvaise idée que de l’avoir mise dans une dictée. Le pire, ce sera sans doute quand l’organisateur de la dictée expliquera doctement les raisons pour lesquelles Jules Verne a écrit ainsi, et pourquoi il faut conjuguer et accorder de telle ou telle façon, comme fait le caporal devant le conscrit. Sur ce site en particulier, vous trouverez toujours des contributeurs pour tenter de justifier n’importe quelle erreur, pour se placer dans la proximité de l’auteur, comme vous allez probablement le constater ci-dessous.
On peut en effet hésiter à accorder avec relief. Mais il ne s’agit ici ni d’une vraie gradation ni de synonymes qui amèneraient un sujet singulier unique. On a bien, selon moi, un effet cumulatif et donc un accord du verbe au pluriel (accusaient).
Par ailleurs, comme vous le dites, le pronom les qui reprend les éléments est au pluriel, ce qui confirme cette impression sans pour autant être déterminant car certains éléments sont déjà au pluriel isolément.
Merci pour vos réponses à tous les deux et merci de toutes ces précisions CParlotte. Je me disais bien que ça me gênait. Dans ce genre de phrase, la ponctuation change la compréhension de la phrase. Et je vois que personne ne vous a contredit(e).
karen777
La