Est-ce que « c’est faute à » est fautif comme l’est « c’est la faute à » ?
Je suis désolé de revenir là-dessus… Tara m’a récemment déjà répondu à ce sujet, et je ne voudrais vexer personne. Surtout pas elle, qui m’a souvent aidé et est visiblement extrêmement compétente.
Il m’est tout à fait clair que « c’est la faute à » est une formulation fautive, et qu’il faut absolument lui préférer « c’est la faute de ».
Toutefois, je me demande si « c’est faute à » est tout aussi fautif ou, au contraire, peut être correct. Exemple : « C’est faute à la guerre, si nous sommes affamés ! »
Ce qui me trouble, c’est que je trouve de nombreux exemples d’ouvrages publiés qui comportent cette formulation, « c’est faute à », ou bien « faute à », sans le « la » devant « faute ».
Pourriez-vous m’aider à trancher une fois pour toutes ? Est-ce que « c’est faute à » est fautif comme l’est « c’est la faute à » ?
Nonobstant,
Nous en avons déjà parlé plusieurs fois, le fait que certains auteurs emploient des tournures inappropriées ne prouve en aucun cas qu’elles finissent par en devenir appropriées.
Je peux moi aussi vous fournir quelques bonnes centaines de phrases de la littérature française, émanant même parfois de certains de nos plus grands auteurs, où barbarismes, pataquès, et tournures inappropriées foisonnent……….
La réponse de Joëlle est pourtant claire, et contrairement à vous je la trouve même parfaite, car elle cite ses sources _ et ne se contente pas de dire « moi je dis que c’est correct ou incorrect » _ et de plus, il s’agit de référents dignes de confiance, du fait que la langue française est leur spécialité et leur métier, contrairement aux auteurs, ou à de vagues contributeurs qui pensent tout savoir.
Qu’attendiez-vous de mieux comme réponse ? Je ne comprends pas.
« C’est de la faute de » : bien que certains référents finissent par l’accepter sous des prétextes parfois un peu obscurs, la tournure est fautive, oui.
« C’est faute de » : tournure tout à fait correcte, mais qui signifie « c’est par manque de / c’est en l’absence de »« .
C’est sans doute de cette tournure que vient cette autre tournure inventée dans le langage familier, dont vous parlez, et qui fait très mal aux yeux :
« C’est faute à » : tournure incorrecte, sans l’ombre d’un doute !
Personnellement, c’est une tournure que je n’ai jamais croisée, ni à l’oral ni à l’écrit…
À la question « À qui la faute ? » la réponse sera « La faute en est à / la faute revient à« .
Petite précision, vous écrivez en parlant de Joëlle « Je lui suis gré » : je suppose que vous vouliez dire que vous lui en savez gré ?
Merci pour votre réponse.
Je sais être parfois agaçant, mais ce n’est que pour m’assurer que ma question a été tout à fait comprise. Vos réponses à tous me sont précieuses et j’en tiens compte. Pour preuve, j’avais écrit : « …ce n’est que pour m’assurer que ma question ait été tout à fait comprise » et je me suis corrigé, suite à nos échanges sur mon utilisation abusive du subjonctif. J’espère d’ailleurs m’être corrigé à raison ! Je n’en suis pas certain…
Ce n’est pas volontiers que je frôle l’irrespect, car je sais que ce faisant, je risque de voir mes questions demeurer sans réponse.
Je ne savais pas que l’on dit « savoir gré », et non « être gré ». Merci de me le faire remarquer. Je vais corriger partout dans mon texte cette formule mal appliquée.
C’est faute à : est fautif
L’Académie répond :
L’expression « C’est la faute à… » relève du parler populaire ou du langage enfantin. Elle doit son succès à la fameuse chanson que Gavroche chante dans Les Misérables (V, 1, XV) avant d’être abattu (« Je suis tombé par terre, / C’est la faute à Voltaire, / Le nez dans le ruisseau, / C’est la faute à… »).
Notez que Victor Hugo s’inspirait de chansons réelles, composées par le Genevois Jean-François Chaponnière (1769-1856) et le chansonnier François Béranger (1780-1857).
Depuis, l’expression a fait florès, dans la littérature – je recense, parmi les publications cataloguées par la Bibliothèque nationale ces deux dernières années, La Faute à pas de chance (Lee Child, 2010), La Faute à Napoléon (Val Beauchamp, 2010), La Faute à Mallarmé (Vincent Kaufmann, 2011) – comme au cinéma – de C’est la faute à Zidore (1909) et C’est la faute à Rosalie (Romeo Bosetti, 1912) à La Faute à Fidel (Julie Gavras, 2006), en passant par La Faute à Voltaire (Abdellatif Kechiche, qui cite fidèlement l’expression hugolienne, 2000).
Il n’en reste pas moins que l’Académie déconseille cette expression, en dehors des tournures où « à » renforce un possessif (« Ce n’est pas leur faute, à ces enfants ») et de l’expression interrogative « À qui la faute ? », où il y a ellipse du verbe « revenir » (« À qui revient la faute ? »).
Idem pour la forme «c’est de la faute de», indique le Trésor de la langue française. Pour être correct, il est donc préférable d’écrire «La faute en est à Pierre» ou «C’est la faute de Pierre».
Voyez, ici à la suite, quelques uns des nombreux cas où la tournure « c’est faute à » est employée dans des ouvrages qui m’ont l’air d’être tout ce qu’il y a de plus sérieux (liens + captures d’écran) :
https://books.google.co.in/books?id=mPdTAAAAcAAJ&pg=PA352-IA2&dq=%22c%27est+faute+%C3%A0%22&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwix3KS0r439AhWW6XMBHfEUBh04HhDoAXoECAIQAg#v=onepage&q=%22c’est%20faute%20%C3%A0%22&f=false
Bonjour,
Je n’ai pas la capacité de vous débarrasser définitivement de vos doutes, mais « Faute en est à la guerre » me parait plus correct.
Pouvez-vous donner deux ou trois exemples que vous auriez relevés dans des ouvrages publiés, et où « c’est faute à » ne vous a pas choqué ?
Merci Nonobstant. Cela ne répondra pas à la question « est-ce correct en bon français », mais je remarque que dans vos exemples, seuls le 2ème et le 3ème répondent exactement à votre problématique. Pour les autres, on a plutôt la tournure « c’est faute de », même si le « de » est placé après :
– C’est faute d’en avoir profondément étudié les sources
– C’est faute d’avoir suffisamment distingué…
– C’est faute d’avoir appris à les saisir.
(Votre dernier exemple est identique au premier, c’est pourquoi il n’y a pas le compte).
Pour répondre plus précisément à votre question, je suppose que si l’Académie acceptait la tournure « faute à», elle l’aurait signalé dans les exceptions, comme elle l’a fait pour « à qui la faute ». Et l’absence d’article devant faute n’y change rien.
A mon sens, les questions à se poser pour vous sont principalement :
– A quelle époque se déroule le récit –> vos exemples me paraissent assez contemporains, et l’usage qui est fait du « faute à », qu’il soit admis ou non par les grammairiens, est peut-être très postérieur au temps de votre histoire.
– Qui parle ? Est-ce un narrateur présumé érudit ? Dans ce cas, je pense que vous devez éviter cette tournure, et la remplacer par exemple par « à cause de » Est-ce un paysan, un ouvrier, ou même une personne présumée cultivée mais qui, dans le feu de sa revendication, se fiche bien de la grammaire ? Alors pourquoi pas. La colère entraîne parfois, volontairement ou non, ce genre de « jeu de mots », « à qui la faute », « c’est faute à la guerre ».
Bon… Je ne suis toujours pas convaincu, mais, prudemment, suivant l’adage qui dit : « En cas de doute, s’abstenir », je vais réviser tout mon texte grâce à l’outil de recherche et retirer tous mes « faute à », qui effectivement pourraient être fautifs. J’en suis marri, car je trouvais cette tournure bien pratique. Et, étrangement, même élégante, d’une certaine façon — alors que vous me dites tous que ça fait plutôt populo. Quel dommage que l’Académie française ne dise rien au sujet du cas de figure qui m’intéresse !
Mon récit débute en 1998 et se poursuit jusqu’à nos jours. Son narrateur n’a pas fait de hautes études, mais souhaite être assimilé à une classe supérieure qui n’est pas la sienne. Malgré son désir d’être autre chose que ce qu’il est réellement, il aime à saupoudrer son langage châtié d’expressions triviales, voire prodigieusement ordurières.
Merci pour votre attention, Dewelis.
Je comprends votre perplexité, d’autant plus qu’en dépit des apparences, je la partage. Je pensais votre récit beaucoup plus ancien. A vous de voir si votre narrateur veut à tout prix respecter les « gardiens du temple » de la langue française, ou s’il accepte les infidélités que lui font des auteurs a priori très sérieux : dans les exemples que vous donnez (qui sont, contrairement à ce que je croyais, approximativement contemporains de votre récit), le « faute à » ne fait pas « populo ».
J’aime bien votre personnage, que je trouve, dans le peu que j’en vois, tour à tour attendrissant et agaçant.
Question subsidiaire : est-il le Nono qui se cache derrière le Nonobstant ? (je vous taquine 🙂 )
J’essaye à grand-peine de lui faire respecter la loi des « gardiens du temple »… Ha ha…
Oui, il y a beaucoup de moi dans le personnage de mon texte (nous partageons, pas exemple, la manière de s’exprimer pompeuse), mais le personnage n’est pas moi, car il s’agit d’une ordure finie, ce que je ne pense pas être (ce que j’espère ne pas être).
Ah mince, une ordure finie, même pas une ordure avec des fêlures attendrissantes ? Il faut que j’arrête mes interprétations, juste avec des bouts de phrase :-).
Je lis la dernière contribution de Cathy L. qui m’a beaucoup étonnée, le français n’est pas votre langue maternelle ?
Oui, des fêlures attendrissantes qui font que l’on risque de le trouver sympathique. Puis, en tombant, plus loin dans le texte, sur de ses réflexions totalement immondes, on s’en veut de s’être laissé presque séduire.
Je suis un immigré magyaro-italien. Ma mère hongroise m’a amené en Alsace à l’âge de neuf ans (depuis Florence, en Italie) quand elle s’est mariée à un Allemand francophile habitant en France. Je ne connaissais alors qu’un seul mot français : « Voilà ! »
Bonjour,
Je pense que l’on peut dire « faute de », « c’est la faute de » « la faute en est à » mais je n’ai trouvé aucun exemple ni aucune référence avec « c’est faute » quelle que soit la préposition utilisée ensuite.
« C’est faute » me semble incorrect.
Voyez, ici à la suite, quelques uns des nombreux cas où la tournure « c’est faute à » est employée dans des ouvrages qui m’ont l’air d’être tout ce qu’il y a de plus sérieux (liens + captures d’écran) :
https://books.google.co.in/books?id=mPdTAAAAcAAJ&pg=PA352-IA2&dq=%22c%27est+faute+%C3%A0%22&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwix3KS0r439AhWW6XMBHfEUBh04HhDoAXoECAIQAg#v=onepage&q=%22c’est%20faute%20%C3%A0%22&f=false
Nonobstant,
Non, vous n’êtes pas du tout agaçant, ni même à la limite de « l’irrespect » comme vous dites, je vous trouve même très respectueux.
Vous cherchez simplement à comprendre, afin de vous améliorer, ce qui est plus qu’honorable ! Et sur ce site justement, c’est ce qui nous intéresse le plus. D’ailleurs, vous le savez, je suis la première à vous admirer pour votre sens de la langue française, alors qu’elle n’est pas votre langue maternelle.
Attention : « Je sais être agaçant » signifie « Je suis capable d’être agaçant si je veux ».
Je suppose que vous voulez dire « Je sais que je peux être parfois agaçant ».
Bravo, vous avez tout à fait bien rectifié « pour m’assurer que ma question a été bien comprise » !
On emploierait le subjonctif par exemple ici :
Je crains que ma question ait été mal comprise / Je ne suis pas sûr que vous ayez bien compris ma question.
Ici, en effet, nous avons bien la notion d’incertitude, le subjonctif s’impose.
À noter qu’il est préférable d’éviter d’employer la locution « suite à « , bien qu’elle soit malheureusement de plus en plus employée, même par les intellectuels… Voir ICI
De plus, selon l’Académie, « ce faisant » est une locution figée qui équivaut à « pour cette raison« , et ne peut pas être employée dans le sens de « en faisant cela / ça« . Voir ICI
Mon conseil : simplifiez vos tournures, choisissez des mots simples, cela allègera vos phrases et ne les rendra que plus faciles à comprendre pour vos lecteurs. Et cela vous simplifiera la vie aussi ;°)
Merci pour toutes ces précieuses remarques. Combien de chemin, encore, pour un jour pouvoir prétendre vaguement maîtriser la langue française !
En effet, par « Je sais être agaçant », je voulais dire « Je sais que je peux être parfois agaçant ». Me serait-il possible de dire la même chose en écrivant : « Je sais d’être agaçant » ?
Je tiens à dire que je ne suis pas sur ce site pour me servir de vous pour corriger un texte, mais pour me servir de ce travail sur un texte comme d’une occasion pour améliorer mon usage du français.
Nonobstant,
Cessez de vous excuser, nous sommes très heureux de pouvoir vous aider si nous le pouvons (je crois que bon nombre des contributeurs sont de cet avis). Si vous nous soumettiez votre texte intégral, il est évident que ce serait différent. Et je suis sûre que le chemin n’est pas si long que vous le craignez…
Votre nouvelle question :
En effet, par « Je sais être agaçant », je voulais dire « Je sais que je peux être parfois agaçant ». Me serait-il possible de dire la même chose en écrivant : « Je sais d’être agaçant » ?
La réponse est non. On dira « je sais que » ou bien « je sais + infinitif« . « je sais de » ne se dit pas.
Sans indiscrétion, puis-je vous demander quelle est votre langue maternelle ?
Bien. Merci. Pas de « je sais de », donc.
Ma langue maternelle est l’italien. Proche du français. Parfois si proche qu’elle m’induit en erreur. En italien, justement, « je sais de » est correct. Par exemple ici : « So di essere fastidioso. » Soit, littéralement, « Je sais d’être fastidieux. »
Si ma langue maternelle était le swahili ou l’aymara, il serait peut-être pour moi plus simple d’apprendre à m’exprimer en français. À partir de rien !
Vous me conseillez de simplifier mes tournures, de choisir des mots simples, mais étant donné que j’essaye de faire de la littérature et non de rédiger un mode d’emploi de scie sauteuse, je suis contraint de prendre des risques. Je risque d’apparaître ridicule à mes lecteurs en pétant plus haut que mon cul — en employant des tournures que je ne maîtrise pas tout à fait. Avec pour espoir celui de voir un jour mon cul se hisser à la hauteur de mes pets.
J’aime beaucoup votre humour !