Entre chaque partie ?
Bonjour, faut-il mettre au singulier ou au pluriel le nom qui suit « chaque » dans ces phrases :
Il y a des temps de pause entre chaque partie –
Il y a une barrière entre chaque chevaux
Bonsoir Odima,
Après « chaque » (adjectif indéfini singulier) , il y a toujours le singulier.
Il y a des temps de pause entre chaque partie.
Il y a une barrière entre chaque cheval.
Bonne soirée.
Oui, il convient de ne pas imiter ces grands auteurs déjà « anciens » (Le Bon usage, § n° 1061) :
« On trouve cependant comme régime ou comme accompagnant le régime les termes distributifs chacun et chaque ; ce sont des
singuliers du point de vue formel, mais ils impliquent des plur. dans la réalité. Ce tour, qui est ancien dans la langue, est attesté chez les meilleurs auteurs, malgré les protestations des puristes :
En bonne logique, on ne peut être « entre une chose » .
— Il y a des temps de pause entre les parties, entre deux parties.
— Il y a une barrière entre les chevaux.
Si cela ne vous semble pas assez explicite par rapport au contexte , il faut tourner la phrase autrement :
— Chaque cheval est séparé des autres (ou d’un autre) par une barrière.
Bien vu !
Une pause entre les différentes parties/ séquences/séances.
Bonjour,
Excusez-moi mais, à mon humble avis, c’est une simple question de logique, de bon sens :
la préposition « entre » implique qu’on se situe dans (à l’intérieur d’) un intervalle et un intervalle est nécessairement défini par deux bornes.
C’est pourquoi on ne peut que dire « entre deux personnes », « entre deux tables », entre deux véhicules », …
Et certainement pas « entre chaque personne », « entre chaque table », « entre chaque véhicule », ce qui ne veut tout simplement rien dire.
Il faut le singulier :
Il y a des temps de pause entre chaque partie.
Il y a une barrière entre chaque cheval.
(Selon le Larousse et le Robert, chaque est un « adjectif indéfini singulier ».)
Comme vous pouvez le voir dans les autres réponses, certains n’admettent pas cette construction. Leur argument a le défaut de se fonder sur une définition de chaque étriquée, qui ne rend pas compte de l’usage des auteurs les meilleurs et les plus divers ; la liste des citations qu’on peut ajouter à celle qu’a donnée Prince, citant Grevisse (Gautier, Rostand, Chateaubriand, Flaubert, Littré, Maupassant, Alain-Fournier, Proust, Gide, Mauriac), semble sans fin :
entre chaque tas, les maraîchers ménageaient un étroit sentier — Zola ;
Je renonce aux pages blanches entre chaque pièce. — Hugo ;
entre chaque coup de mer — Daudet ;
entre chaque groupe de marches, une plate-forme exiguë pour la porte d’une maison — Rolland ;
faire des quantités de zigzags entre chaque rangée de patates — Céline ;
ce qui donne entre chaque file l’intervalle nécessaire pour les mouvements — Larousse, Grand dictionnaire universel du XIXᵉ siècle ;
entre chaque minute il s’écoulait de tels siècles — Sand ;
il n’y a qu’une moyenne proportionnelle entre chaque rapport — Rousseau ;
entre chaque coupole s’élancent des groupes de verdure — Lamartine ;
Entre chaque décharge le silence était effrayant. — Balzac ;
passer la tête entre chaque barreau — Dumas ;
il forme entre chaque côte un petit ganglion — Diderot ;
Je l’ai désignée entre chaque acte. — Beaumarchais…
Merci pour toutes ces réponses, très éclairantes !
Bonjour,
Je réponds ici en tant que relecteur-correcteur professionnel, je vois en effet régulièrement cette formule « entre chaque » dans les textes que je relis-corrige.
La langue française permet de nombreuses discussions sur certains points, des débats sans fin. Ici, il n’y a pas de débat ! La formule « entre chaque » est une faute.
Ecrire « entre chaque… » n’a aucun sens, bien sûr. Ce n’est pas parce que des auteurs illustres ont utilisé cette formule qu’il faut la reprendre !
La grammaire fait souvent appel à la logique mathématique. « Entre » introduit nécessairement une notion de pluriel.
http://relecteur.synthasite.com/
Merci Denis Hugot pour cette réponse éclairante. En effet, quels meilleurs arguments que ceux d’un « relecteur-correcteur professionnel » qui « relit-corrige » ? Et dont on peut d’un clic vérifier la compétence en allant admirer son site.
« Il n’y a pas de débat », « c’est une faute », « ça n’a aucun sens »… et le plus percutant, auquel on ne peut aboutir qu’après l’effort d’une longue réflexion : « bien sûr ». Une démonstration précise, fine, une vraie leçon de logique et de connaissance de la langue.
Bonjour
Chaque ayant une forme de singulier et exprimant l’individualité, ne peut s’employer correctement comme équivalent de plusieurs. D’autre part entre signifiant au milieu doit être suivi d ‘un pluriel ou de plusieurs singuliers. Le tour entre chaque plat n’est donc pas défendable. Il faut dire entre les plats ou après chaque plat. Il n’empêche qu’à la suite de Chateaubriand et de Gautier, cette faute se répand aujourd ‘hui même chez des écrivains estimables :
Respirant à peine entre chaque cri (Colette) .
Avec un grand espace tremblant entre chaque mot (Giono).
Entre chaque gorgée du breuvage bouillant (Proust).
D’après Guide de langue française ─ René Georgin.
Tournez vos phrases autrement.
Un exemple:
Des temps de pause séparent les parties ou chaque partie.
Mettre -1 à ce que dit René Georgin est un sacrilège.
Une preuve manifeste d’inculture.
À défaut d’une grande culture, il suffit d’un peu de logique pour disqualifier cette réponse. On ne peut pas passer dix lignes à expliquer qu’on ne dit pas « il y a des pauses entre chaque partie » parce que « entre » appelle le pluriel et que « chaque » est un singulier, pour conclure doctement qu’il vaut donc mieux dire « des pauses séparent chaque partie ».
Bonjour numéric,
Surprenant !
Vous disqualifiez ce qu’écrit René Georgin.
À votre avis qu’aurais-je dû écrire ?
Je ne sais pas comment mieux expliquer, mais je retente : si on ne peut pas être entre une chose au singulier, alors on ne peut pas non plus séparer une chose au singulier. On peut être entre une chose et une autre. On peut séparer une chose d’une autre. Mais on ne peut pas davantage, avec le même sens, séparer une chose qu’être entre une chose. Dans votre livre, Georgin vous expliquait qu’ajouter le mot chaque à une chose n’en faisait pas deux choses. C’est ce qu’il fallait retenir. On accepte les deux phrases, et on donne un joli nom à cette figure de style, ou on n’en accepte aucune. Maintenant, vous allez probablement me recopier trois pages de René Georgin sans comprendre, pour montrer qu’il n’a jamais parlé explicitement du verbe séparer… Mais si vous ne comprenez pas l’idée qu’il tente de faire passer, ce n’est pas moi qui pourrai l’expliquer mieux que lui. Certaines erreurs peuvent dénoter une inculture, que vous vous plaisez à dénoncer avec morgue, mais ici il s’agit simplement de savoir compter jusqu’à deux. On peut mettre une soucoupe entre deux chats mais on ne peut pas mettre une soucoupe entre un chat, donc on ne peut pas mettre une soucoupe entre chaque chat. On peut séparer deux chats mais on ne peut pas séparer un chat donc on ne peut pas séparer chaque chat.
Les règles d’utilisation d’un mot tiré d’un dictionnaire sont liées à l’acception du mot dans une phrase. Le mot séparer peut certes concerner un tout, dans le sens de diviser, disperser (une famille séparée). Le mot séparer peut se dispenser de complément, dans le sens d’isoler, avec ellipse (une mère séparée), c’est vrai. Mais ici les chats et les parties sont séparés deux par deux. Il ne s’agit pas de diviser une partie en deux morceaux. Il ne s’agit pas non plus d’isoler une partie. Il s’agit de parties différentes et on considère les pauses qui les séparent. Le pluriel est nécessaire. Les pauses séparent les parties, et non pas chaque partie.
Je vois bien qu’il y a un truc que j’explique mal, mais je ne sais pas quoi. Je ne dois pas être pédagogue.
Czardas, ne vous offusquez pas qu’on critique Georgin : c’est en fait la conclusion — qui, d’après la façon dont vous la présentez, n’est pas de lui — que Numeric met en défaut : « des temps de pause séparent les parties ou chaque partie » contrevient précisément à ce que le passage que vous citez prétend démontrer.
Cependant, Georgin se disqualifie effectivement par ailleurs, avec des arguments ridicules : selon lui, « entre signifiant au milieu doit être suivi d’un pluriel » — depuis quand au milieu doit-il être suivi d’un pluriel ? Et, dans les exemples fournis, Colette, Giono et Proust auraient donné à chaque le sens de plusieurs ; pourtant, il suffit de faire la substitution pour constater qu’il n’en est rien, le résultat obtenu ayant un sens nettement différent de l’original :
respirant à peine entre plusieurs cris ;
avec un grand espace tremblant entre plusieurs mots ;
entre plusieurs gorgées du breuvage bouillant.
Georgin a également tort de dire que le tour « se répand » ; il est répandu depuis longtemps.
Quant à l’inculture, si elle consiste à se ranger du côté de Gautier, Rostand, Hugo, Chateaubriand, Flaubert, Littré, Maupassant, Zola, Alain-Fournier, Proust, Gide, Colette, Mauriac, Céline, Giono contre Georgin, le choix ne semble pas difficile.