Émeraude mais violetteS ? – adjectifs de couleur

Répondu

Bonsoir,

Je viens de prendre connaissance d’un post qui a relancé une interrogation que j’ai toujours.
Je crois que j’avais déjà posé la question, mais le fait est que je n’avais pas, je crois, reçu de réponse claire.
(ou bien, je ne l’ai pas retenue, car je me pose à nouveau la question)

Sauf erreur de ma part (et si tel est le cas je vous prie de m’en excuser)

Des nuances émeraude  :
Si l’adjectif de couleur provient d’un nom de fruit, de fleur, de pierre précieuse …, il reste invariable.

Des nuances violetteS (accord pluriel) :
et pourtant…Si l’adjectif de couleur provient d’un nom de fruit, de fleur, de pierre précieuse …, il reste invariable.

Violette est bien un nom de fleur… alors pourquoi, l’adjectif qui en est issu ne doit-il pas rester invariable ?
(je n’ai vu aucune règle expliquant ce cas précis)

Merci pour vos retours

Cocojade Grand maître Demandé le 6 juillet 2023 dans Général

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3 réponse(s)
 
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Vous mettez sur le même plan deux vocables qui ne le sont pas.

Vous savez, je pense, que les noms de couleurs sont systématiquement masculins. Ces noms de couleurs sont forgés à partir de la forme masculine de l’adjectif de couleur dont ils sont tirés :

le blanc (et non le blanche ou la blanche ou la blanc),
le bleu (idem),
le vert (id.), etc.

Que se passe-t-il pour les noms de couleurs issus de substantifs ? Eh bien, c’est très simple, on conserve la forme du substantif et quel que soit son genre d’origine, il devient masculin :

Le marron comestible est le fruit du châtaigner → Le marron n’est pas une couleur primaire.
La topaze est une pierre aux nombreuses nuances → Le topaze est une couleur orangée.
Une orange pressée vous apportera le plein de vitamine C → Le orange est une couleur chaude.
Une émeraude orne ce blason → Ce blason est d’un émeraude profond.
Etc.

Revenons à nos violettes, pour la couleur, dites-vous le violette, ou le violet ? Je pense que vous dites comme à peu près tout le monde le violet. Pourquoi ?
Parce qu’il existe un adjectif violet à partir duquel ce substantif de couleur a été régulièrement construit. Si un tel adjectif n’existait pas, le nom de couleur serait le violette (conservation de la forme du nom duquel le nom de couleur dérive + masculin).
Tout ça pour essayer de vous faire toucher du doigt que même si l’adjectif violet(te) vient en effet bien du substantif désignant la fleur, c’est un adjectif à part entière qui a été forgé à partir de ce substantif, il y a fort longtemps – au XIIe siècle (qui fléchit comme fléchit un adjectif, qui a servi de base de dérivation pour le substantif de couleur, comme le fait tout « vrai » adjectif de couleur).
En l’état actuel de la langue, ce n’est pas le cas pour émeraude, ni pour marron. Qui sont analysés soit comme des substantifs en fonction d’adjectif, soit comme des adjectifs atypiques et à ce titre invariables. Mais peut-être que dans quelques années, décennies, siècles, millénaires, bonjarrêtelà, ces deux-là et d’autres seront aussi devenus des adjectifs à part entière → des robes maronnes et d’autres émeraudes.

marcel1 Grand maître Répondu le 6 juillet 2023

Bonsoir Marcel

Vous êtes excellent ! 🙂

Au-delà de m’avoir fait rire (dans le bon sens du terme), vos explications me sont très claires et m’apportent enfin la réponse à la question sur laquelle… Je ne comprenais/ne percevais rien de logique… ce depuis déjà longtemps.
Un tiroir que je peux refermer.

Je vous en remercie !
Bonne fin de soirée Marcel

le 6 juillet 2023.

Merci Cocojade. 🙂
Le rouge me monte aux joues au point qu’elles en deviendraient presque violettes !

le 7 juillet 2023.

Tant qu’elles ne sont pas roseS, pourpreS, mauveS, fauveS, écarlateS ou encore incarnatES  😉

le 7 juillet 2023.

😀

le 8 juillet 2023.

Je me permets seulement une remarque.
Pourquoi utiliser l’expression « adjectif de couleur » ? Il me semble qu’un mot est un adjectif ou ne l’est pas.
et précisément, dans, par exemple : une robe marron, des yeux émeraude, ni « marron » ni « émeraude » ne sont, à ce jour, des adjectifs. Ce sont -à moins que je ne me trompe fort- des noms, au même titre que : une femme médecin ou une serviette éponge »par exemple.
Parler d’adjectifs, dans ces cas me paraît source de confusion.
Une étoffe vert émeraude : le mot vert est un nom avec un complément du nom .
Une étoffe vert clair : vert : nom + son adjectif – un adjectif n’est jamais qualifié par un autre adjectif.
Une étoffe verte : ici, l’adjectif qualifie un nom.
Nous avons là, une absence de déterminant devant le nom, ce qui n’est pas si rare en français.

Certains noms qualifient d’autres noms. Mais pourquoi les appeler adjectifs ? Il me semble que c’est une source de confusion. D’ailleurs, si ces noms peuvent, dans certains cas seulement,  prendre facilement le nombre du nom qu’ils complètent, en aucun cas ils ne peuvent en prendre le genre : que dire d‘une femme médecine,  d‘une jupe ballonne etc. ?
L’adjectif s’accorde toujours en genre et en nombre.
S’il arrive que le deuxième nom ait le même nombre que le premier, c’est une question de concordance et non d’accord. Par exemple, dans des villes satellites et des images satellite le rapport entre les deux mots est différent : l’un demande le pluriel, l’autre non.
Il y a donc, pour les couleurs, des adjectifs (normaux) et des noms qui sont parfois employés sans déterminant ; pas toujours : des étoffes d’un vert éclatant.

 

Tara Grand maître Répondu le 7 juillet 2023

Bonjour Tara,

Oui effectivement, je crois que je fais encore souvent (trop souvent) des « mélanges »… et je reconnais que c’est assez récurent lorsque l’on aborde les couleurs.
Je vous remercie d’avoir apporté, à juste titre, vos précisions Tara

Je vous souhaite une bonne journée

le 7 juillet 2023.

Oh mais non. Vous n’êtes pas la seule, loin de là, à parler d’adjectifs invariables au sujet des couleurs. On trouve cette appellation un peu partout.
Ma logique en est gênée. Je constate avec surprise d’ailleurs  que je suis à peu près la seule à la contester.

le 7 juillet 2023.

Tara, c’est amusant, parce que nous avons eu cette conversation plusieurs fois déjà, à propos de ces adjectifs dérivés improprement de noms. Certes, les lexicologues-graphes ne sont pas à l’abri d’erreur, mais si on trouve dans plusieurs dictionnaires dits de référence, que par exemple maison est donné comme adjectif, c’est peut-être parce que cette classification se défend et n’est pas complètement absurde, contrairement à ce que vous estimez.

Pourquoi ce n’est pas absurde ? Parce que ces substantifs sont en fonction adjectivale de façon récurrente, dans des collocations fréquentes.

Comment classe-t-on un mot ? En fonction de sa morphologie, bien sûr, mais peut-être plus encore de sa fonction. Or, quelle est la fonction d’un substantif ? C’est de désigner un objet du monde, y référer. Quelle est la fonction d’un adjectif ? C’est de venir compléter un mot.

Dans tarte maison, que fait maison ? Désigne-t-il une maison ? Non. Complète-t-il le mot tarte ? Oui.

Pourquoi dès lors refuser de l’intégrer dans la catégorie des adjectifs ? Au motif que contrairement aux adjectifs typiques il ne s’accorde pas avec son support ? Les adjectifs de couleur ne sont pas les seuls dans ce cas – contrairement à ce que vous affirmez. Il y a des adjectifs tirés d’adverbes : Des gens bien. Il y a les adjectifs d’origine étrangère : Des soirées fun, super. Ceux qui sont apocopés – éventuellement variable en nombre, mais non en genre : Des fraises bio(s). D’autres sans doute que j’oublie.

C’est d’autant plus surprenant de refuser d’intégrer au moins ceux que j’ai donnés en exemple dans la catégorie des adjectifs, qu’ils peuvent tous être attributs*, fonction qui est la marque de l’adjectif typique et que par exemple l’adjectif relationnel ne peut remplir (pourtant je ne crois pas que vous refuseriez la nature d’adjectif à entre de nombreux autres présidentiel).

Bref, on peut certes avoir une vision en langue et donc refuser de faire changer ces termes de catégorie pour les laisser dans leur catégorie « naturelle », mais je crois qu’il y a aussi de bons arguments – à partir d’une vision en discours –  pour les faire entrer dans la catégorie des adjectifs. Ne pensez-vous pas ?

 

* Ces gens, ils sont vraiment bien / Ces soirées sont fun, sont super / Ces fraises sont bio(s) / Ces tartes sont maison.

[Larousse et Robert donnent marron (couleur) comme adjectif, idem pour émeraude. Qui bien sûr peuvent avoir la fonction d’attribut.]

le 7 juillet 2023.

Je sais bien. Mais alors pourquoi ne pas dire : employé comme adjectif.
D’autre part, pourquoi ne pas dire que préposition + nom (apr exemple) est adjectif ?
Un bracelet en argent  : en argent : adjectif invariable (construction indirecte)
un bijou sans valeur : sans  valeur : adjectif invariable – antonyme : précieux
Un gâteau  à la crème : à la crème : adjectif invariable – pas loin de crémeux – occupe la même place que « sec ».
Car l’adjectif peut être introduit par une préposition (après un pronom) : Je n’ai vu personne d’intéressant : adjectif construction indirecte
Pour faire court : pourquoi ne pas considérer toutes les expansions du nom comme des adjectifs invariables ?

je sais aussi que ce que vous considérez comme une obstination peut être jugé comme sottement prétentieux. Ce jugement m’indiffère. Ce qui compte pour moi, c’est la logique et tant pis si elle ne me met pas d’accord à 100% avec les plus hautes autorités. Ce qui ne signifie pas que je n’entende pas votre raisonnement.

Je trouve qu’en effet la morphologie est déterminante dans la classification des mots car elle n’est pas dénuée de sens : l’accord genre et nombre de l’adjectif avec le nom est la marque d’une dépendance étroite entre les deux mots.
D’ailleurs les définitions de « adjectif » ne mentionnent très souvent que le caractère morphologique de l’adjectif et si un autre critère est donné, il ne d’applique pas qu’à l’adjectif mais à toutes les expansions nominales (CDN, relative ..) :
– Bescherelle : Un adjectif s’accorde toujours avec le nom auquel il se rapporte. Ne font exception que certains adjectifs de couleur. Quelle que soit sa place et sa fonction dans la phrase, l’adjectif s’accorde en genre et en nombre avec le nom (ou le pronom) auquel il se rapporte.
– Usito :  Mot variable en genre et en nombre, noyau du groupe adjectival et accompagnant généralement un nom.
– Le Robert : Mot susceptible d’accompagner un substantif avec lequel il s’accorde en genre et en nombre, et qui n’est pas un article.
Par exemple.
L’Académie fait exception  :
– Académie :  Mot dont la fonction essentielle est de s’ajouter aux noms ou aux pronoms pour les qualifier ou les déterminer >>mais ceci  est bien vague et peut d’appliquer à toutes les expansions du nom

– L’adjectif, notion fondamentale ou angle mort conceptuel ? – Morgane Beaumanoir-Secq
En tant que classe grammaticale variable, l’adjectif est une notion fondamentale de la grammaire scolaire, sa dépendance envers le nom et le marquage morphologique de cette relation étant les piliers de sa définition.

Concernant les adjectifs relationnels, eh bien c’est un argument de plus pour ma vision des choses : si on ne considère plus la morphologie qu’est-ce qui différencie l’adjectif du complément du nom ou d’une autre expansion du nom ?

>>> tout n’est pas définitivement résolu en matière d’analyse linguistique.

le 8 juillet 2023.

Mais il existe en effet des préposition + nom (ou autres) qui ont valeur adjectivale, ça s’appelle des locutions adjectivales – ou en nouvelle grammaire des adjectifs complexes (à distance, à croquer, en retard, sans plomb, sur pied, et beaucoup beaucoup d’autres, d’ailleurs en argent et sans valeur  pourraient très bien être analysés comme tels – après, il est impossible pour un dictionnaire d’entrer toutes les locutions adjectivales). Le de du Je n’ai vu personne d’intéressant est un cas un peu particulier, il permet d’introduire un adjectif construit sans copule, mais à valeur d’attribut : quelqu’un d’intéressant = quelqu’un qui est intéressant ; une place de libre = une place qui est libre ; rien de nouveau = rien qui soit nouveau ; etc.

Le problème avec les compléments de nom (appellation traditionnelle)*, c’est qu’ils n’ont pas tous valeur adjectivale. Cela dit, ça n’empêche pas Tesnière de tous les recatégoriser adjectifs (par le phénomène de translation), et pourquoi pas finalement (sémantiquement ça bloque un peu, mais syntaxiquement, ça se défend bien).

Que vous préfériez votre logique à celle de certains linguistes, pourquoi pas, mais qu’en revanche vous en tiriez argument pour rejeter l’autre point de vue, qui me parait au moins tout aussi valable, ça ne me parait pas recevable.

Et d’ailleurs, à propos de logique, si vous retenez comme adjectifs uniquement les mots qui varient en genre et en nombre avec leur support, comment catégorisez-vous : les adjectifs apocopés, ceux venant d’emprunt, feu qui un coup s’accorde, mais l’autre non ? (bien, j’imagine que vous le reclassez dans sa catégorie d’origine, c’est bien ça ?, mais les autres précités, les pauvres, les voilà apatrides catégoriels !)

 

[En fait et à vrai dire, je ne vois pas trop où est le problème. Les catégories sont des constructions forcément réductrices (parfois très réductrices) et de ce fait il n’est pas étonnant que quand il s’agit de catégoriser des objets non mathématiques on se retrouve avec des choses qui ont peine à intégrer ces catégories étriquées. Alors, ou bien on accepte tranquillement que ces catégories ne sont pas discrètes mais inévitablement étanches, ou effectivement on risque fort de s’arracher les cheveux. Pour ma part, pas besoin d’en rajouter, mon alopécie ne se porte déjà que trop bien.]

 

* Puisqu’en nouvelle grammaire est complément du nom effectivement tout ce qui suit le nom et le complète, soit aussi bien un adjectif épithète, qu’un groupe prépositionnel, ou encore une subordonnée.

le 8 juillet 2023.

Pourquoi madame êtes vous venue encombrer mon post de vos interrogations métaphysiques s’il était dans vos intentions de créer votre propre post pour poser vos propres questions ?

PierreC Amateur éclairé Répondu le 6 juillet 2023

Bonsoir,

Quelle entrée en matière vous choisissez là !
(je ne suis pas certaine que j’aurais osé choisir celle-ci au bout de 3 mois de présence sur un site… mais bon)

Avec tout le respect que je vous dois, PierreC (croyez-le)

Je ne suis pas venue « encombrer » votre post en créant une réponse directe à celui-ci.

J’ai cependant pris la liberté de bénéficier du droit qui nous est donné à tous sur ce site de répondre et d’échanger avec un participant…, en commentaire.
Mon commentaire n’était donc pas pour vous, mais pour l’auteur du message à qui je me suis adressée… en commentaire. De plus, mon commentaire était directement lié aux propos tenus par la personne à qui j’ai adressé… Mon commentaire.

Toute cette prévenance de ma part, justement, parce que j’ai eu le souci de ne pas « encombrer » votre post… ce que vous venez précisément de faire.

Au-delà de vous engager à revoir les définitions précises de commentaire, réponse et métaphysique, je vous suggère de réfléchir à ce qui suit.

« nemo auditur propriam suam turpitudinem allegans »

Bonne fin de soirée PierreC

le 6 juillet 2023.

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