conditionnel passé seconde forme et concordance des temps (eût/eut + p.p.)

Répondu

Bonjour tout le monde,

Dans le test 9 du livre « Certificat Voltaire – Un entraînement intensif à l’épreuve d’orthographe » (Dominique Dumas), question 194, on nous propose la phrase suivante :

« Il eut pu aider cet enfant s’il l’eut voulu ; il lui aurait offert une vie toute autre. »

La correction proposée est :
« Il eût pu aider cet enfant s’il l’eût voulu ; il lui aurait offert une vie tout autre. »

Si je comprends la correction au verbe « pouvoir » (l’auxiliaire du conditionnel passé II prend un accent circonflexe à la troisième personne du singulier), je ne la comprends pas pour le verbe « vouloir ». Pour moi, il faudrait de l’indicatif. Pourriez-vous m’éclairer à ce sujet ?

En vous remerciant par avance pour votre aide.

Note : pour m’aider à comprendre la phrase et savoir quels temps employer, je remplace le conditionnel passé II par un conditionnel passé classique, et cela me donne « Il aurait pu aider cet enfant s’il l’avait voulu ». Mon erreur et mon incompréhension viennent peut-être de là.

AnaisD Débutant Demandé le 18 février 2025 dans Conjugaison

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4 réponse(s)
 
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Bonsoir,

C’est une question subtile à laquelle on peut d’abord répondre par élimination. Le passé antérieur et le passé simple qui expriment des faits ponctuels sont impossibles après si conditionnel, cela n’aurait pas de sens ; par déduction, ce ne peut donc être qu’un conditionnel passé 2e forme.

En français on ne fait jamais suivre un si de condition par un conditionnel présent ou passé 1re forme (l’expression de la condition serait redondante) mais c’est bien le sens voulu et il n’y a pas d’objection à employer un conditionnel passé 2e forme (ne cherchez pas la logique !) Remplacez si par au cas où et la valeur conditionnelle apparaît clairement :  Il aurait pu aider cet enfant au cas où il l’aurait voulu.  L’usage du plus-que-parfait  après si est purement modal.

Bruno974 Grand maître Répondu le 18 février 2025

Merci beaucoup Bruno. J’admets avoir dû relire votre réponse plusieurs fois pour tout saisir, mais je pense y être parvenue et quelle satisfaction !

Bonne fin de soirée

AnaisD Débutant Répondu le 18 février 2025

Si, logique il y a.
Il faut d’abord bien comprendre le sens de l’imparfait ou du plus que parfait dans la subordonnée introduite par si

Il eût pu aider cet enfant s’il l’eût voulu  = Il aurait pu aider cet enfant s’il l’avait voulu 
ou au présent :
Il pourrait aider cet enfant s’il le voulait

L’imparfait (ici l’imparfait de l’auxiliaire) n’a aucune valeur temporelle. Sa valeur est uniquement modale. Il marque l’irréel comme le ferait un conditionnel.
Le plus que parfait indique l’antériorité comme le ferait un conditionnel passé.

Alors pourquoi l’imparfait ? Il faut trouver la réponse dans l’histoire de la langue.
Voici un extrait de  l’article qui traite du sujet : Aux origines des emplois modaux de l’imparfait. Le cas de l’emploi hypothétique et de l’emploi contrefactuel par Adeline Patard et Walter De Mulder

Aux origines des emplois modaux de l’imparfait. Le cas de l’emploi hypothétique et de l’emploi contrefactuel | Cairn.info
« Dans ces tours, l’imparfait donne lieu à des interprétations qui divergent nettement de sa valeur habituelle de passé imperfectif, valeur à laquelle il est associé dans les descriptions ou dans les séquences à l’arrière-plan de narrations. Le sens ici produit se distingue d’abord sur le plan modal. L’imparfait implique en une distance épistémique vis-à-vis de la réalité du locuteur : il renvoie ainsi respectivement, dans les tours contrefactuel et hypothétique, à une situation dont la réalisation a été contrariée  ou qui apparaît comme improbable  voire irréelle « 

Tara Grand maître Répondu le 19 février 2025

Bonsoir,

La seule chose finalement à retenir de ce conditionnel passé 2e forme, similaire dans sa construction au subjonctif plus-que-parfait,  c’est son inutilité au XXIe siècle.

Il se voulait être la marque d’une supériorité littéraire, d’un langage soutenu, il n’est aujourd’hui que pédanterie et son usage quasiment restreint à la 3e personne du singulier qui sonne comme un passé antérieur

Il marquait à lui seul une éventualité , souvent suivi d’une relative au subjonctif plus-que-parfait : « Eussé-je connu cet homme que je l’eusse épousé » ou » »j’eusse connu cet homme que je l’eusse épousé »  ont absolument la même acception que  » Si j’avais connu cet cet homme, je l’aurais épousé » et n’amène aucune nuance ou subtilité.

Ce soutien du langage débordait même dans des subordonnées introduites par une conjonction qui logiquement eût dû  commander l’indicatif .
« Nous dévorions notre tartiflette comme comme si nous n’eussions pas mangé depuis dix jours » est considéré comme une phrase correcte.
Bonne chance pour la placer dans un refuge.

 

Ouatitm Grand maître Répondu le 19 février 2025

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