concordance des temps : présent ou passé
Bonjour
j’ai un doute sur le temps à utiliser dans cette phrase:
j’ai toujours pensé que la Terre était plate.
j’ai toujours pensé que la Terre est plate.
Les 2 phrases sont elles correctes?
merci d’avance
1. j’ai toujours pensé que la Terre était plate.
Seul le passé est correct étant donné que ce qui est énoncé est faux et correspond à une croyance ancienne.
Mais :
J’ai toujours pensé que la Terre était/est ronde : les deux temps sont possibles.
Soit il y a concordance des temps on se place dans la perspective du passé
Soit on utilise le présent dit de vérité générale (ou encore présent indivis, intemporel… ) qui passe outre la concordance.
Bonjour,
Ces phénomènes de non concordance sont tout à fait possibles et bien documentés. Je cite cet extrait de la Grammaire raisonnée de la Langue française, d’Albert Dauzat parce que je le trouve à la fois clair et succinct, mais si on souhaite approfondir les choses, il suffit de taper dans un moteur de recherche non concordance des temps et on trouvera des articles linguistiques sur la question.
« Quand la principale est au passé, la concordance de forme réclamerait le passé en subordonnée, mais la langue a trouvé un procédé particulier pour l’expression du futur et a réagi pour l’expression du présent. […]
Après les verbes exprimant […] une affirmation […], on peut employer le présent (proscrit à tort par la Grammaire de l’Académie) et le futur. On dispose donc de quatre tours, exprimant les nuances entre le dubitatif « il m’a écrit qu’il viendrait demain », la probabilité « … qu’il venait demain » et la certitude « …qu’il vient [qu’il viendra] demain » (1). L’emploi du présent en subordonnée permet en outre de préciser les faits présents par rapport à celui qui parle : « il m’a écrit qu’il était capitaine » ne précise pas si le correspondant est toujours capitaine à l’heure présente, tandis que « il m’a écrit qu’il est capitaine » l’affirme sans doute possible. Le futur est encore plus nécessaire pour situer dans l’avenir, par rapport à celui qui parle. « J’ai appris qu’il va venir à Paris et qu’il y séjournera quelque temps » (affirmation opposée à la double formule dubitative : « qu’il allait venir et qu’il y séjournerait ».) Enfin pour exprimer une idée générale, située hors temps, le présent est plus indiqué, plus net que l’imparfait : « On a toujours pensé que la colère est [était] mauvaise conseillère ». Réaction de la logique contre les servitudes grammaticales. — Psychologiquement, l’imparfait et le conditionnel, comme dans le style indirect, relatent la pensée d’autrui, tandis qu’avec le présent et le futur de l’indicatif apparaît l’opinion de celui qui parle ou écrit.
(1) Le présent est encore plus affirmatif que le futur ; celui-ci est employé pour insister sur l’élément temporel. »
(Graissé par moi.)
Dans le cas présent,
1) si la personne a toujours cette opinion au moment de l’énonciation, on pourra ne pas appliquer la concordance formelle (mais on pourra tout aussi bien l’appliquer), et ce, que la terre soit ou non plate, ce qui compte ici, c’est le point de vue de l’énonciateur :
Je suis un fervent platiste, j’affirme (je pense) présentement que la terre est plate, et je précise que j’ai toujours eu cette opinion.
(On peut penser à l’exemple classique, donné notamment par Grevisse, de l’énoncé d’Anatole France : Nous disions que vous ÊTES l’orateur le plus éminent du diocèse. Ce fait n’a rien d’une vérité absolue, générale, intemporelle, c’est une opinion qui n’engage que les énonciateurs, et d’autres pourraient trouver que leur allocutaire est un bien piètre orateur, cela ne changerait rien à notre histoire de non concordance possible).
2) Si la personne n’a plus cette opinion au moment de l’énonciation, alors la non concordance n’est évidemment plus possible, puisque le fait n’est plus d’actualité :
J’ai toujours pensé que la terre était plate, mais après avoir lu plusieurs articles scientifiques sur la question, je me suis rendu compte que je m’étais fourvoyé.
*J’ai toujours pensé que la terre est plate, mais après avoir lu plusieurs articles scientifiques sur la question, je me suis rendu compte que je m’étais fourvoyé.
Le présent de l’indicatif convient, entre autres, pour des faits intemporels (vérités générales : maximes, proverbes, théorèmes, etc. ; c’est le présent dit gnomique ).
Je ne dirais pas que dans J’ai toujours pensé la Terre est plate , est est un présent de vérité générale (ou, omnitemporel, atemporel, permanent, etc.). C’est même le contraire l’un présent de vérité générale, car la Terre, pour ce que nous en savons n’a jamais été plate !
Comp. avec ce présent graissé , qui, lui, est « de vérité générale » : La terre n’avait pas besoin de Galilée pour tourner ; mais on ne savait pas qu’elle tourne (A. Gide, cité par l’excellent Le Grevisse de l’étudiant. CAPES et agrégation lettres).
Conclusion : J’écrirais : J’ai toujours pensé que la Terre était plate.
Mais oui Prince! Je n’avais pas fait attention au sens. J’avais immédiatement « traduit » ronde! Vous avez raison. Il faut le passé.
Je me corrige de façon à lever toute confusion dans les esprits qui nous liraient.