Complément dans une phrase avec le verbe faire et son infinitif
Bonjour,
Je m’adresse à vous pour vous faire part des doutes qui m’emplissent au sujet de la construction de phrases contenant le verbe faire accompagné d’un verbe à l’infinitif.
En effet, lorsque je dois formuler une phrase de ce type, je n’arrive jamais avec certitude à savoir si je dois inclure dans ladite phrase ou non un complément juste après le verbe faire et son infinitif. Je m’explique : par exemple, pour dire qu’une personne s’est accommodée d’une contrainte, je ne sais pas si l’on doit écrire « la faire s’accommoder de cette contrainte » ou si l’on doit écrire « lui faire s’accommoder de cette contrainte ». Autrement dit, je ne sais pas si l’on doit dire « faire à quelqu’un s’accommoder d’une contrainte » ou si, au contraire, l’on doit seulement dire « faire s’accommoder quelqu’un d’une contrainte « .
Il semble que la question ait déjà été posée aux membres de ce forum, puisque j’ai trouvé sur ce forum une réponse en rapport avec la question que j’ai posée plus haut. En effet, d’après la réponse que j’ai lue, il faudrait, pour savoir si le verbe faire et son infinitif s’accompagnent d’un complément, vérifier s’il y a un COD ou non dans la phrase. Si tel est le cas, alors il est nécessaire de construire la phrase avec un complément. En revanche, si la phrase est dénuée de COD, alors elle se construit sans complément.
Seulement, je n’arrive pas à appliquer cette règle à la phrase dont je doute de la construction et que je vous ai soumise plus haut. Car, certes, si je ne m’abuse, la phrase que j’ai citée plus haut semble bien contenir un COD, mais, à l’oreille, il me paraît un peu bizarre de dire « faire à quelqu’un s’accommoder de quelque chose ». Aussi est-ce pour cela que je m’adresse à vous pour mieux maîtriser la construction de ces phrases.
Je vous remercie d’avance pour votre aide et le temps que vous consacrerez à la lecture de mon message.
Bonne journée à vous.
Bonjour,
Le verbe accommoder est un verbe transitif. Son emploi pronominal est réfléchi, c’est à dire que le COD est le pronom » s’ « .
« Je m’accommode de cette situation » signifie « j’accommode moi de cette situation ».
Vous avez donc bien un COD dans votre phrase et votre pronom prend le genre et le nombre de son antécédent :
« Héléne et Louis doivent impérativement être présents plus tôt. Je dois les faire s’accommoder de cette contrainte. »
« Héléne doit impérativement être présente plus tôt. Je dois la faire s’accommoder de cette contrainte. »
« Louis doit impérativement être présent plus tôt. Je dois le faire s’accommoder de cette contrainte. »
Ceci écrit, « faire s’accomoder qqn de qqc » n’est pas une tournure que j’emploierais.
Bonjour,
Dans la phrase « Je fais s’accommoder cette personne de cette contrainte. », ladite personne est à la fois le sujet et, à travers le pronom s’, le complément d’objet direct du verbe accommoder ; c’est l’idée même d’un usage réfléchi du verbe. On écrira donc : « Je la fais s’accommoder de cette contrainte. »
Si le choix du groupe verbal avait appelé un complément d’objet indirect pour citer la personne , par exemple avec brosser les dents, « Je fais se brosser les dents à ma fille. » , on aurait eu : « Je lui fais se brosser les dents. »
Cela dit, je partage la réticence de Ouatitm quant au choix du verbe faire pour donner du sens à la phrase, car s’accommoder implique une démarche d’organisation mentale intérieure propre à son sujet. On fait subir une contrainte à une personne et celle-ci s’en accommode. Le verbe laisser aurait été plus approprié (les constructions sont les mêmes qu’avec faire) : « Je la laisse s’accommoder de cette contrainte. » ou si réellement vous accompagnez cette personne pour qu’elle sache s’accommoder d’une contrainte : « Je lui apprends à s’accommoder de cette contrainte. »
Bonsoir,
J’ai bien pris connaissance de vos réponses respectives ; merci beaucoup pour la complétude et la clarté de celles-ci ! J’ai à présent compris pourquoi dans ce cas de figure il n’était pas nécessaire d’employer un complément.
Donc si j’ai bien compris, les phrases avec le verbe faire accompagné de son infinitif, même si elles comportent un COD, ne doivent pas nécessairement toujours contenir un complément ? L’emploi ou non du complément dans ce type de phrases serait alors lié au sujet qui fait l’action ?
En vous remerciant encore pour vos conseils avisés,
Bonne soirée à vous.
Bonjour,
Navré pour le retard avec lequel je réponds à votre message. J’ai bien pris connaissance de la réponse que vous avez eu la gentillesse de m’apporter. Je tiens d’ailleurs à vous remercier pour le soin que vous y avez apporté : celle-ci est assez développée et plutôt agréable à lire, alors même que vous y soulevez des notions qui peuvent paraître un brin délicates pour un débutant en la matière.
Je vous remercie tout d’abord pour l’explication que vous avez apportée en ce qui concerne la construction de la phrase avec le verbe faire et s’accommoder. Votre explication m’a permis de comprendre pourquoi dans ce cas de figure aucun complément n’était nécessaire. Si je comprends bien votre explication, ce serait donc parce que le verbe s’accommoder n’a pas de COD mais un COI.
Pour vous répondre sur le fond et s’agissant du test auquel vous me proposez de me prêter, je dirai que je n’éprouve aucune hésitation concernant les propositions des 2 premières questions que vous m’avez posées. S’agissant de la question n°1, je pense que la proposition qu’il faut choisir est » Je leur fais accepter cette contrainte ». Je l’ai choisie, car « Je les fais accepter cette contrainte » me semble erroné à l’oreille. S’agissant de la question n°2, je pense qu’entre les deux propositions il faut choisir « Je les fais renoncer à cet avantage, ici encore parce qu’à l’oreille la deuxième me semble erronée. Et d’autre part, je l’ai choisie car, comme cette phrase comporte déjà une construction accompagnée d’un complément, à savoir renoncer à, un deuxième complément n’est pas nécessaire.
Et concernant ma question, je pense que vous l’avez bien cernée. J’admets le principe que vous avez évoqué dans votre message, selon lequel, en principe, une phrase dépourvue de COD ne contiendra pas de complément. Cette règle semble en effet s’appliquer dans la majeure partie des cas et permet de dissiper certaines hésitations. Pour la compléter, je voudrais savoir si selon vous, lorsque la règle que vous avez exposée pour savoir si le complément est nécessaire dans une phrase avec faire et son infinitif ne suffit pas pour éliminer nos doutes au sujet du complément, on peut se fier au sens réfléchi ou non réfléchi du verbe à partir duquel on veut construire une phrase contenant le verbe faire et ledit verbe à l’infinitif ?
Voici comment je comprends votre question : dans une construction du type « faire faire », le sujet du deuxième « faire » est-il ou non COD du premier « faire » ? C’est souvent en hésitant sur le pronom à utiliser pour représenter la personne sujet du deuxième « faire » qu’on comprend l’intérêt de cette question. Elle se pose aussi pour l’accord du participe passé.
1. Éléments sur les COD et sur les pronoms.
On utilise surtout deux pronoms :
Pour remplacer un COD, on utilise le pronom accusatif ou COD « les » : je les regarde.
Pour remplacer d’autres types de compléments (parfois regroupés sous le nom de COI), on utilise le pronom datif ou COI, « leur » : je leur parle.
Parfois, on ne sait pas trop si la personne dont on parle, celle qui est le sujet de l’infinitif, est COD ou COI du premier verbe.
On peut expliquer cela par le fait que plusieurs compléments pourraient parfois mériter d’être traités comme un COD, mais un seul est possible à la fois dans le français bien normé. Tout autre complément est rétrogradé COI.
Prenons le cas d’une proposition infinitive. On peut être libre de décider si le COD est le verbe à l’infinitif ou le sujet du verbe à l’infinitif :
— Mes amis ont affirmé cela.
— Je leur ai entendu affirmer cela. –> J’ai entendu quoi ? affirmer cela.
— Je les ai entendus affirmer cela. –> J’ai entendu qui ? Mes amis.
Donc c’est normal d’hésiter parfois.
Classiquement, pour le choix du COD, les hésitations vont entre la proposition infinitive globale et le seul sujet de cette proposition infinitive. La définition de ce qu’est un COD n’est pas nette. Sur ce site, au moins 99% des réponses considèrent (encore cette semaine), mais sans jamais le justifier, que le COD se limite au sujet de l’infinitif, et c’est idiot.
2. Faire faire quelqu’un, faire faire quelque chose, deux COD possibles.
Avec « faire faire », parle-t-on d’une personne à qui on fait faire quelque chose ou d’une personne qu’on fait faire quelque chose ?
Vous dites avoir déjà lu la réponse par ailleurs, mais je vous la rappelle :
Si l’infinitif n’a pas de COD, on considère que son sujet est COD du premier verbe : — Je les fais manger.
Si l’infinitif a un COD, on considère que son sujet n’est pas COD du premier verbe : — Je leur fais manger du riz.
C’est très arbitraire, mais c’est assez bien respecté, et ça fonctionne un peu.
Évidemment , ça n’a aucun sens, car dans les deux cas, le pronom est mis pour une raison identique, et représente simplement le sujet de la proposition infinitive. Il n’est pas particulièrement COD, il n’est pas particulièrement COI, il est juste agent de l’infinitif et change de pronom selon les circonstances. C’est probablement en partie sur cela que vous souhaitiez attirer notre attention.
Et de tout façon cette règle ne fonctionne pas, et cette construction est possible : — Ce paysage leur fait penser à Venise.
3. Test.
a) Il y a un COD, et cependant vous hésitez entre :
— je les fais accepter cette contrainte
— je leur fais accepter cette contrainte
b) Il n’y a pas de COD, et cependant vous hésitez entre :
— je les fais renoncer à cet avantage
— je leur fais renoncer à cet avantage
c) Ou alors vous savez très bien quelle réponse il faut choisir dans les deux cas ci-dessus, et vous ne posez la question que parce que votre infinitif est pronominal :
— je les fais s’accommoder de cette situation
— je leur fais s’accommoder de cette situation
En gros, vous voulez juste savoir à quelle construction il faut rattacher la construction pronominale du verbe transitif direct ?
4. Précisez votre question.
Ai-je bien compris votre question ? Commencez par dire ce que vous avez répondu au test, et si vous acceptez l’idée générale (dont a vu plus haut qu’elle était arbitraire et non systématique). On pourra ensuite chercher la réponse à votre question assez difficile. Je vous avertis à l’avance que nous ne trouverons pas de réponse définitive à votre question, il y a des usages plus fréquents que d’autres, des utilisations du pronom datif selon les auteurs, selon les verbes, selon les époques, et parfois des nuances selon le sens.
On vise cependant plus ou moins une règle générale simplifiée du type :
— ils se servent d’un verre –> je les fais se servir d’un verre
— il se servent un verre –> je leur fais se servir un verre
Mais ce formalisme sera confronté à bien des exceptions, souvent impossibles à justifier. Sémantiquement c’est absurde, et l’usage est flottant. N’acceptez aucune règle qui sera présentée comme évidente ou logique.
5. S’accommoder.
Le verbe « s’accommoder » n’a pas de COD mais un COI, et pourtant vous envisagez « je leur fais s’accommoder de cela » plutôt que « je les fais s’accommoder de cela » ? Pourquoi pas après tout, on peut y réfléchir, car où est véritablement le COD du verbe introducteur ? est-ce « eux » ou est-ce « s’accommoder » ?
Bien que ma réponse très incomplète s’approche des deux précédentes quant à sa conclusion (elles les ont fait faire ceci ou cela, avec des verbes), elles diffèrent carrément dans leur justification : ce n’est pas parce que le pronom « se » joue un rôle de COD que le pronom antéposé doit avoir la forme d’un COI, car ce n’est absolument pas le cas (je l’accommode de cette situation, je t’accommode de cette situation…). C’est seulement l’absence de COD à suivre (ce qui est d’ailleurs assez systématique dans les constructions pronominales) qui serait à invoquer pour justifier de faire du sujet de l’infinitif un COD syntaxique formel.