Annuler
Bonjour !
Savez-vous pourquoi « annuler » prend un seul « L » alors que « nulle », « nullité » et « nullement » en prennent deux ?
Y a-t-il à votre connaissance ici une règle à appliquer ?
Bien à vous !
Beaucoup d’adverbes en -ment sont formés sur l’adjectif correspondant au féminin :
Gracieuse > gracieusement – nette > nettement – grossière > grossièrement
La même chose se passe pour les noms au suffixe -té qui donnent une qualité :
Gracieuse > gracieuseté – nette > netteté – grossière > grossièreté –
Sur le même schéma on a : nulle > nullement – nullité
Pour « annuler » :
Littré : Ad, à, et nullus, nul ; provençal : annullar, anullar, anulhar ; espagnol : anular ; italien : annullare.
TLF :
a) 1remoitié du XIIIème siècle : anuler « mépriser » […]; b) 1289 anuller « rendre nul » […]; 1293 annuller « idem ) […]; Emprunté au latin chrétien adnullare : « mépriser, con sidérer comme nul […]
Remarque : fluctuation de l’orthographe
La réponse est facile : il n’y a aucune raison !
Comme pour tant de mots, les caprices académiques ont multiplié au fil des siècles les consonnes doubles inutiles ou supprimé celles qui se justifiaient.
Ce verbe s’est longtemps écrit « annuller » selon la forme latine avant de mystérieusement se voir priver du second l. Je vous joins le bref aperçu étymologique donné par le CNRTL . Je n’ai pas pu trouver la date précise du changement, mais le célèbre dictionnaire de Furetière (1690) ou la 4e édition du Dictionnaire de l’Académie en 1762 le donnent encore avec deux l .
N.B. Les « rectifications de 1990 » prévoyaient une rationalisation généralisée du mécanisme de doublement des consonnes. Mais l’Académie a reculé devant l’ampleur de la tâche, ne redressant qu’une vingtaine d’anomalies comme charriot, bonhommie, combattif, persiffler, etc.
Après l’accord du participe passé, cette « famille » est la deuxième source d’erreurs à l’écrit. Certains soutiennent que c’est le charme du français…
Klarx, si vous saviez pourquoi les mots changent d’orthographie (demandez à Chambaron la raison pour laquelle j’ai écrit « orthographie » !), vous seriez souvent surpris. Il en offre un bon ex. : le 6 décembre 1990 , certains vocables ont obtenu une double consonne ; d’autres, qui auraient dû l’obtenir aussi, ne l’ont pas obtenue, à cause de la charge de travail que cela aurait représentée pour l’Académie française (et peut-être d’autres institutions : le CSLF ?) !
On ne connaît pas vraiment le pourquoi du passage des deux l à unique l concernant le verbe annuler.
En revanche, d’après les indications fournies par le Dictionnaire historique de la langue française de A. Rey, je situerais ce basculement vers 1250., ce qui n’est pas incohérent avec celles données par le TLFi.