accords
Bonjour, dans la phrase suivante, c’est un homme qui parle :
Je suis tout ouïe, ma chère.
Faut-il écrire toute ou tout ?
Merci
Bonjour,
L’expression « tout ouïe » ne change pas. Il faut donc écrire « je suis tout ouïe, ma chère ».
Cette expression s’est écrite des deux manières depuis son apparition (au XVIIe siècle). De nos jours, la graphie avec élision (tout ouïe) est largement prédominante même si les deux sont acceptables.
Bonjour, un grand merci avec un peu de retard, problème de *** xion. Bien amicalement Camille.
Il n’y a pas deux façons possibles d’accorder, mais trois.
a) En précisant que le sujet est un homme, vous suggérez que l’accord pourrait se faire avec le sujet.
Et pourquoi pas en effet. L’accord de l’adjectif avec le sujet a du sens :
— Elle était toute à sa jalousie (Dumas)
— La possession de mon cœur est une chose qui vous est toute acquise (Molière)
— Il est tout vue, tout ouïe, tout intelligence (Bossuet, parlant de Dieu, dans un sermon pour le premier dimanche de l’avent, en 1665)
Cette façon d’envisager le mot « tout » comme un adjectif s’appliquant au sujet, dans la continuité du latin, est évidemment ancienne, et tend à s’effacer, mais elle reste syntaxiquement valide, et elle reste utilisée de nos jours, en particulier au féminin. Et pour peu que l’expression « être tout ouïe » soit ancienne, l’accord à l’ancienne, avec le sujet, serait défendable.
— il est tout ouïe
— elle est toute ouïe
— (cette façon de dire ne supporte pas le pluriel, le mot « tous » ayant pris un sens différent)
b) On rencontre aussi l’accord du mot « tout » en tant qu’adjectif avec le nom qui suit.
Je ne vois pas de légitimité sémantique évidente à cette construction, mais elle a existé, et existe encore parfois :
— La solitude est tout mouvement et toute harmonie (Châteaubriand)
— Cet homme était toute sagesse (Montherlant)
— Je suis toute ouïe et tout regard (exemple théorique)
Pour peu que que l’expression ait été ainsi figée par un auteur ou par l’usage dans cette forme, il serait acceptable de la faire perdurer en l’état.
— il est toute ouïe
— elle est toute ouïe
— ils sont toute ouïe
Mais je ne crois pas trop à la possibilité de cette orthographe il y a quatre siècles, comme on nous l’affirme sans source dans une réponse plus haut.
c) L’utilisation moderne du mot « tout » est surtout adverbiale, avec l’adverbe « tout » invariable (sauf devant un mot féminin commençant par une consonne, ce qui n’est pas le cas ici) : il est tout rouge et tout intimidé, ils sont tout rouges et tout intimidés, elle est toute rouge et tout intimidée.
Même devant un nom, même dans une expression, c’est l’utilisation adverbiale qui prévaut :
— elle est tout feu tout flamme(s)
Votre expression, dans un contexte moderne, demande clairement l’utilisation adverbiale du mot « tout », et donc son invariabilité :
— il est tout ouïe
— elle est tout ouïe
— ils sont tout ouïe
Et il n’y a évidemment là aucune élision, contrairement à ce qui est écrit dans une réponse plus haut, mais une simple utilisation de l’adverbe « tout ».
Donc,
Votre phrase, avec son style imitant une société aristocratique ou bourgeoise d’un temps ancien, pourrait mériter d’utiliser l’expression dans sa forme ancienne, mais :
— elle n’est pas concernée pas la variabilité selon le sujet (point a) puisque votre sujet est un homme ;
— faire du mot « tout » un adjectif caractérisant « ouïe » (point b) est dénué de sens (en quoi l’ouïe serait toute ? que serait toute l’ouïe ?), malgré l’apparition déjà assez ancienne de ce genre d’accords ;
Vous devez donc utiliser le mot « tout » tel qu’on l’utilise actuellement (point c), comme un adverbe, l’exception à l’invariabilité (mots féminins commençant par une consonne) ne s’appliquant pas ici. Et vous devez écrire :
— Il est tout ouïe
Merci pour cette belle leçon… un travail impressionnant. encore merci