Accord participe passé
Bonjour, dans la phrase suivante : « des larmes sur mes joues, il a essuyé », faut-il accorder « essuyé », sachant qu’on ne peut rajouter « en » pour respecter l’alexandrin du poème ?
Merci.
Bonsoir,
Construction qui déroge à la syntaxe habituelle, mais que l’on rencontre dans la langue parlée ou dans des tournures affectées :
« La salle de bain, vous avez trouvé ? » « La pièce, je n’ai pas aimé. » « Les épreuves, tu as surmonté. »
Dans la mesure où il n’y a pas de reprise pronominale d’un cod dans le deuxième segment, il n’y a pas d’accord du participe passé.
S’il y avait reprise pronominale, il faudrait accorder :
« La salle de bain, vous l’avez trouvée ? » « La pièce, je ne l’ai pas aimée. » « Les épreuves, tu les as surmontées. »
Attention pas d’accord avec le pronom en :
« Des épreuves, tu en as surmonté.«
Alors pourquoi ?
La phrase réelle est : il a essuyé des larmes sur mes joues
Selon la règle du participe passé employé avec avoir il n’y a pas accord avec le COD et l’inversion poétique ne change rien.
On a simplement pris le GN des larmes sur mes joues et on l’a changé de place.
Des larmes sur mes joues, il a essuyé.
Il n’y a pas de changement de structure.
Alors que si on introduit un pronom, on change la construction de la phrase et là, l’accord se fait avec le pronom s’il est antéposé.
Votre question concernant ce que les spécialistes appellent une anastrophe (inversion syntaxique), j’ai pris contact avec maitre Yoda.
Il m’a confirmé qu’il n’y avait pas lieu d’accorder et qu’il allait ajouter un précepte à sa charte.
Comme il a de l’humour, il a d’ailleurs aussi dit qu’il ne comprenait pas pour quelle raison seuls les Français continuaient d’accorder un participe en fonction de sa place dans la phrase. Mais c’est un autre sujet…

En effet, cet autre sujet mérite attention, et ce d’autant plus que rien n’explique pourquoi un COD antéposé, non repris par un pronom, n’est plus considéré comme « connu » au moment de l’accord.
Voici un article qui traite précisément de cette question. Il est malheureusement tronqué, on n’aura donc pas la totalité de la réflexion de Danielle Leeman, mais on aperçoit que l’affaire est complexe. Et notamment que si l’on traite ces GN antéposés comme des COD, il y a peu de raisons de ne pas faire l’accord. En revanche, il est possible d’analyser ces GN non comme des COD, mais comme des compléments circonstanciels de point de vue, auquel cas le non accord est justifié.
