Accord du participe passé
Bonsoir,
Je me trouve confrontée à un problème d’accord.
Dans la phrase : « Je te raconte pas l’énergie que ça m’a pris de rénover cette maison. », logiquement on devrait accorder « pris » avec « énergie », mais pourtant ça sonne mal.
Qu’en pensez-vous ?
Est-ce que vous accorderiez dans cette configuration ?
Je te raconte pas les efforts que ça m’a demandés de rénover cette maison.
ça m’a demandé quoi ? les efforts = que = COD
Je te raconte pas l’énergie que ça m’a prise de rénover cette maison.
Il semble que « ça » n’introduit pas une tournure impersonnelle et donc on va accorder, pour les mêmes raisons que dans la phrase précédente.
Je ne trouve pas de cause d’invariabilité.
Je viens de lire la réponse de PhL ; le circonstanciel de quantité me semble devoir être exprimé avec une quantité : les cinquante kilos que j’ai pesé, les cent euros que ça m’a coûté…
En revanche : au sens figuré, les efforts que ça m’a coûtés, on accorde,
À suivre.
C’est un cas où on voit le caractère capillotracté de la règle du participe passé.
Complément d’objet direct ou circonstanciel de quantité ? On n’a pas très envie de trancher : un peu les deux.
Je te raconte pas l’énergie que ça m’a pris de rénover cette maison.
> Je te raconte pas la quantité d’énergie que ça m’a pris de rénover cette maison.
> Je te raconte pas la sorte d’énergie que ça m’a prise de rénover cette maison.
Et il y a encore autre chose :
L’emploi de « ça » appartient à une langue un peu relâchée et s’accommode peut-être assez mal d’une règle qui tend à disparaître.
la tête que ça m’a faite – les sommes que ça m’a prises
capillotracté ? je comprends que ça veut dire « tiré par les cheveux »… je vois que vous cédez à la « mode » de la critique des règles…
Joëlle… je ne cède pas à la mode de… je trouve réellement que cette règle du PP avec avoir est très contestable. En italien, où il existe une règle du PP, elle est bien plus simple.
Des règles, au fond, nous n’en avons pas tant que cela… à part celle des accords.
Et de toutes façons les règles ont leurs limites : le sens, la logique priment (c’est seulement mon avis).
Je pense que les deux, accord et non accord, sont défendables.
Avant de développer et en commentaire aux réponses de PhL et Tara, je dirais que le complément de mesure est absolument exclu pour la très bonne et très simple raison que prendre dans le sens qu’il a dans cette phrase ne peut être que transitif. Ce qui suit est par conséquent un COD. Si COD (antéposé) il y a, alors comment peut-on envisager le non accord ? Voilà, voilà, ça arrive !
Mais avant que ça n’arrive, j’aimerais vous poser une question (un peu différente de celle de Joëlle). Est-ce que vous accorderiez dans ce cas ?
Je te raconte pas l’énergie que la rénovation de cette maison m’a prise.
Et maintenant, tadaaaam, ma proposition pour les deux possibilités.
(1) Si la phrase n’est pas disloquée (l’absence de virgule va dans ce sens), alors et contrairement à Joëlle, je vois ici une construction impersonnelle (avec un verbe occasionnellement impersonnel. Eh oui, il n’y a pas que les pronominaux qui le soient – non pas impersonnels, mais occasionnels). En effet, on a un sujet apparent (ça) et un sujet réel (rénover cette maison) :
Ça m’a pris de l’énergie de rénover cette maison = Rénover cette maison m’a pris de l’énergie.
Dans les constructions impersonnelles, le participe passé ne s’accorde pas, donc :
Je te raconte pas l’énergie que ça m’a pris de rénover cette maison.
(2) Si la phrase est disloquée, c’est-à-dire, si elle est de ce type :
Je te raconte pas l’énergie que ça m’a pris(?), de rénover cette maison.
= Rénover cette maison, je te raconte pas l’énergie que ça m’a pris(?)
Alors, je crois que le non accord n’est pas trop défendable (il faut donc remplacer le point d’interrogation ci-dessus entre parenthèses par un e), mais j’avoue que cet accord gratte un peu l’oreille (moins quand on remplace ce pronom par un syntagme nominal Je te raconte pas l’énergie que la rénovation de cette maison m’a prise).
C’est peut-être en raison du ça (cela) sujet, ainsi, d’ailleurs : Girault-Duvivier conclut « Mais depuis longtemps cette exception n’est plus admise. » Dont acte, il faudra donc faire avec son prurit auriculaire (ou s’asseoir sur la règle).
Très belle recherche, qui explique les malaises liés à l’accord…
Les grammairiens auraient tranché ? Tant que les accords sont muets, pourquoi pas ! Mais alors qui dirait : l’embrouille que ça a faite ?
Merci Joëlle. 🙂
Waouh, super réponse, merci Marcel !
Bonsoir,
Ici, énergie n’est pas COD mais complément circonstanciel de quantité. Le participe passé reste invariable.
Merci à tous pour vos réponses.
lol
Le mot énergie ne représente en aucun cas une quantité ou une mesure qui justifierait de ne pas accorder au motif d’un complément circonstanciel de mesure. L’énergie est bien l’objet pris. En revanche, il faut effectivement assimiler l’introduction par ça ou cela soit comme une forme impersonnelle soit comme une exception spécifique. Dirait-on : *La catastrophe que cela a produite ?
Sur ce site, j’avais conçu « ça » ou « cela » comme une formulation impersonnelle, Cela m’avait été corrigé. En effet, ce n’est pas une formulation impersonnelle puisque le pronom démonstratif représente bien la chose qui a demandé de l’énergie.