fonction grammaticale d’un pronom personnel
Bonjour,
Dans le langage courant et souvent familier on peut entendre des phrases comme celles-ci
« Va me ranger ta chambre immédiatement.»
« Goûtez-moi ça, vous m’en donnerez des nouvelles.»
Mais on rencontre aussi ce type de phrase dans la littérature:
« Et elle vous lui détacha un coup de sabot si terrible, si terrible, que de Pampérigouste même on en vit la fumée.»(Lettres de mon moulin- A.Daudet)
« Allez-moi mettre votre blouse.» (Les gaietés de l’escadron – Courteline)
On a parfois deux pronoms qui se succèdent:
« Avez-vous vu comme je te vous lui ai craché à la figure ?»( Les misérables – V.Hugo)
Ma question est :
Quelle est la fonction grammaticale de ces pronoms ?
Vous évoquez les « pronoms toniques » : ils peuvent être sujet ou complément. Ils ont la fonction du groupe de mots qu’ils soulignent.
– Moi, je suis enrhumée !
– C’est toi qui écris !
Ici, ils ont la fonction grammaticale de sujet (il soulignent le sujet).
Dans vos exemples, ils ont une valeur de COI
– si l’on compare : Va me ranger ta chambre = (à moi), notez que le « me » n’apporte rien = ils indiquent la présence du locuteur dans la demande !
(Fais-le pour moi !)
– Attention = Viens me couper les cheveux !
On voit bien que le pronom « m » est ici indispensable pour préciser « à qui » il faut couper les cheveux.
Pour les autres exemples (Hugo, Courteline…), même si l’emploi du pronom tonique est d’usage grammatical, il s’agit à mon avis d’un parler à la fois vieilli et oral, voire patoisant ou populaire qui donne de la verdeur et de l’animation au récit sans apporter à la phrase quoi que ce soit.
Dans l’exemple de czardas, il ne s’agit pas à proprement parler de COI ; on appelle plutôt cette construction un datif éthique (ou explétif, ou d’intérêt), et le pronom n’a pas vraiment de rôle dans l’énoncé.
On peut se référer à cet extrait du Bescherelle :
Sur le titre de votre extrait du Bescherelle; il est bien écrit « les compléments apparentés » au COI, et la question porte bien sur la fonction,
voilà pourquoi j’ai fait référence au COI, même si ce n’est pas exactement un COI.
En FLE, le datif d’intérêt est nommé « pronom tonique » comme le datif partitif d’ailleurs.
Amusante question en vérité !
Ce type de tournure s’appelle le » datif éthique« , directement hérité semble-t-il du latin (dativus ethicus), et a pour vocation de mettre en relief l’implication du locuteur dans une expression ou la rendre plus expressive. Dans la phrase de Courteline, par exemple, celui qui prononce la phrase est concerné par le résultat de son ordre, sinon il dirait simplement : « Allez mettre votre blouse !».
Grammaticalement, il est difficile de le qualifier, c’est un pronom « explétif » qui n’a pas de fonction propre (cf. le ne dans « avant qu’il ne vienne »).
P.S. : Grevisse analyse (647 e) et détaille le cas avec moult exemples dans la Littérature…
Je pense comme vous, que ce pronom explétif n’a pas de valeur grammaticale.
Je suis impressionnée par vos connaissances quasi-encyclopédiques.
Merci du compliment, mais ce n’est pas ce que nous savons qui donne la pertinence, c’est la manière de trouver les bonnes sources et de les combiner dans une réponse…