Ennuyant versus ennuyeux

Bonjour,

J’ai entendu ceci :
Cela a l’air plus ennuyant que mes propres études
(le locuteur faisait référence aux études de droit d’une autre personne)

Cela m’a titillé l’oreille, car j’aurais préférentiellement employé l’adjectif ennuyeux.

Explications
Sauf erreur, dans la phrase, ennuyant n’est pas participe présent, mais a la qualité d’adjectif.
Au même titre qu’ennuyeux l’aurait été.

Nonobstant l’usage peut être un plus vieilli d’ennuyant, j’ai notion d’une différence entre les deux adjectifs.
Ennuyeux = tout le temps. Ex : je n’ai jamais rencontré personnalité plus ennuyeuse.
Ennuyant = occasionnel, passager. Ex : cet incident est ennuyant.
Pour résumer la nuance : Une personne peut être ennuyante, sans pour autant être une personne ennuyeuse.

La durée d’études est (logiquement) passagère dans une vie, mais ce que l’on appelle études dure en général plus d’une semaine. Je ne vois pas le caractère « occasionnel/passager » sur des études de droit.

Quel adjectif auriez-vous choisi s’il vous plaît ?

Merci par avance pour vos retours

Cocojade Grand maître Demandé le 8 juillet 2023 dans Question de langue

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5 réponse(s)
 

Bonjour,
Lorsque l’adjectif qui exprime l’effet du procès d’un verbe diffère du participe présent employé comme adjectif, c’est l’adjectif qui doit être employé, dans le cas présent : ennuyeux. Cependant ennuyant, quoique d’usage vieilli, est toujours recensé comme adjectif. La déclaration de votre locuteur est donc tout à fait correcte bien qu’inhabituelle, mais je me garderais bien de chercher la moindre nuance de sens entre ennuyeux et ennuyant.

Bruno974 Grand maître Répondu le 8 juillet 2023

Bonjour Bruno,

Je vous remercie pour votre retour et suis en harmonie avec vos propos, cependant, ce que vous dites est un peu … ce que j’ai déjà énoncé.
C’est la nuance que vous vous gardez bien de chercher que, justement, je voulais connaître 😉

le 8 juillet 2023.

Comme d’autres l’ont proposé, on peut identifier une nuance de sens, découlant de l’analyse historique ou de celle du choix du suffixe, mais même l’Académie s’y refuse aujourd’hui et vous risqueriez soit de mal interpréter la nuance en lisant le mot , soit que vous soyez mal interprétée en l’employant. Faute de consensus, il faut savoir prendre acte de la perte actuelle de nuance.

le 9 juillet 2023.

De nos jours, en France, cet emploi de ennuyant est vieilli. De nos jours, dans d’autres endroits de la francophonie (Antilles, Belgique, Canada, apparemment), cet emploi est vivace, mais je ne sais pas s’il y a une nuance ou pas par rapport à ennuyeux.

En France, à une époque où cet emploi n’était pas encore vieilli, voici ce qu’en dit Littré :
ENNUYANT, ENNUYEUX. L’homme ennuyant est celui qui ennuie par occasion ; cela est accidentel ; l’homme ennuyeux est celui qui ennuie toujours ; cela est inhérent. Un homme ennuyant peut n’être aucunement ennuyeux. Mais le fait est que dans l’usage ces deux mots se confondent ; seulement, ennuyeux est plus usité qu’ennuyant.

Bref le premier étant plus usité – déjà à cette époque – que le second, celui-ci est tombé en désuétude ; mais déjà alors, vous voyez que la nuance semblait ne plus être sentie.

(Nuance qui peut s’expliquer par l’origine verbale de ennuyant : le verbe date le procès dans le temps (donc de façon limitée), alors que l’adjectif est censé donner une qualité – donc quelque chose de caractéristique, de non limité dans le temps – de la personne / chose qualifiée d’ennuyeuse. Mais ça, c’est la théorie, qui sans être dénuée de fondement, peut aussi être bien tempérée :
Hier, il a été bien ennuyant, d’ailleurs, il l’est tout le temps.
Qu’est-ce qu’il est ennuyeux, heureusement, il ne l’est pas tout le temps.
Enfin, sauf si la différence était vraiment fortement ressentie, auquel cas, on ne pourrait pas dire C’est un homme ennuyant, seulement C’est un homme ennuyeux. Mais c’est douteux, puisqu’on peut toujours apporter une restriction à une qualification censément intrinsèque : Il est intelligent, enfin la plupart du temps ; Il est beau, enfin, ça dépend des jours, etc.)

 

Edit – Et pour quand même répondre à votre question (!), si on fait la nuance, oui c’est vrai, que ennuyant ne convient pas bien en l’espèce,  puisqu’a priori, le locuteur qualifie les études de droit de son ami – de façon non pas ponctuelle, mais intrinsèque -, qui lui semblent (par essence) ennuyeuses (plus que les siennes en tout cas).

marcel1 Grand maître Répondu le 8 juillet 2023

Merci Marcel

Oui, je rejoins majoritairement vos propos.
J’ajouterai toutefois… une nuance 😉

Il existe des mots dont la vocation (ou l’intérêt) est d’apporter, à eux seuls, des nuances ou de légères différences.
Ces mots se suffisent à eux-mêmes et n’imposent pas de devoir recourir (obligatoirement) à un complément pour faire ressentir ce qui fait intrinsèquement partie… de leur propre subtilité.
Pour preuve, même s’il reconnait que l’usage d’ennuyeux est majoritaire, le Littré n’en relève pas moins une nuance entre ce dernier et ennuyant. (occasionnellement, ponctuellement/toujours, de manière habituelle)

Mon cheminement (qui n’est que le mien, il va de soi) est celui-ci

L’adjectif ennuyant a vieilli, c’est un fait, mais il fait encore partie du langage.
Tant que ce mot existe, la nuance qui lui a été liée/attribuée existe.
Tant que cet adjectif existera (à savoir non supprimé/banni de la langue française), il n’y a aucune raison que la subtilité qui lui est associée disparaisse.
Pour résumer, à mes yeux, c’est un package. Un mot avec sa nuance.

Je sais que pour beaucoup ces subtilités paraîtront obsolètes ou inutiles, mais, vous le savez, ce n’est pas mon cas.
Au contraire, j’aurais presque tendance à dire que c’est devenu un peu mon dada ces derniers temps 😉
(Pour tout vous dire, j’en ignore la raison)

Autant, je pense qu’un certain « dépoussiérage » ne serait pas inutile sur certaines règles de la langue française, autant je trouverais regrettable de se passer ou de supprimer des subtilités, que peuvent générer certains mots de notre langue. Ces dernières étant gage de richesse.
Ce serait, à mes yeux, et se priver d’une certaine forme de plaisir que procurent certains termes, et appauvrir le sens des… nuances.

Bonne fin d’après-midi Marcel

NB. c’est un sacerdoce que d’essayer d’employer des synonymes de « nuance »
Il y en a peu et la plupart n’ont pas forcément le même sens.

le 8 juillet 2023.

@ Marcel

Je viens juste de lire votre édit !!!! (je ne l’avais pas vu)

Merci d’avoir répondu de manière directe et concrète à la question que je me posais.

le 8 juillet 2023.

Bonjour,
Et voici ce que dit l’Académie en réponse à la question posée : « Le mot ennuyant figure encore dans le Dictionnaire de l’Académie française parce qu’on le retrouve chez de grands auteurs des siècles passés, et que ce dictionnaire est aussi un outil pour pouvoir lire ces auteurs. Ennuyant n’est pas, à proprement parler, incorrect, mais on dira et on écrira aujourd’hui ennuyeux sauf si l’on a une volonté marquée d’utiliser une forme vieillie. »

PhL Grand maître Répondu le 8 juillet 2023

Bonsoir Phl ! 🙂

Après avoir lu les différents commentaires, je comprends que nous sommes tous d’accord sur le côté vieilli de l’adjectif « ennuyant« , comme nous sommes tous également en accord sur le fait que cet adjectif existe encore… ce avec la nuance qui lui est liée.
Il n’est pas incorrect d’employer cet adjectif, ce même si ennuyeux est majoritairement dans les usages. (comme vous l’avez fait, je crois vraiment utile de le préciser)

On va dire que la nuance entre les deux adjectifs donne désormais dans une subtilité, qui n’est pas ressentie (voire connue) par tous.

Donc oui, effectivement, je crois comme vous, que l’emploi de cet adjectif correspond aujourd’hui à une réelle volonté de le faire.
Je ne dirais cependant que c’est le choix d’utiliser une forme veillie… je dirais plutôt que c’est un/le vrai choix de nuancer d’emblée avec les subtilités que la langue française offre au travers de ses mots.

Merci de m’avoir apporté votre sentiment
Bonne fin de journée Phl

le 8 juillet 2023.

Sans entrer ici dans tous les détails de l’histoire du mot ennui, on peut constater qu’il a subi une évolution sémantique importante. Du grec et du latin (inodio, qui a donné odieux) il a conservé jusqu’au Moyen Âge le sens premier de douleur, de chagrin puis d’irritation répétée. Il a été exporté en Angleterre et est devenu annoy.
Il a ensuite évolué aussi vers le sens de lassitude, monotonie, lui aussi exporté sous forme de ennui en anglais, langue qui dispose donc de deux mots là où le français n’en a qu’un.
Les formes ennuyant et ennuyeux existaient déjà en moyen français (1350-1500) et ont un temps correspondu à chacun de ces sens. Mais le second s’est beaucoup plus développé, venant mordre sur le territoire du premier.
Personnellement, il m’arrive de continuer d’employer le disting(u)o : une forte contrariété est ennuyante, un cours fastidieux est ennuyeux. Dommage de perdre cette nuance.
PS Je découvre que les Québécois continuent de cultiver les deux mots avec cette différence de sens. Sans doute l’influence anglo-saxonne, pour une fois positive.

Chambaron Grand maître Répondu le 8 juillet 2023

Bonsoir Chambarron

Votre « Sans entrer ici dans les détails de l’histoire du mot ennui » m’a été très intéressant.
C’est vrai que l’histoire explique souvent( pas toujours) le pourquoi/comment d’un mot. Ceci permettant également parfois de mettre en exergue des nuances que plus personne ne ressent, ne connait voire juge inutiles ou obsolètes.

Je ne fais pas partie (et je m’attache à ne pas en faire partie) des personnes qui considèrent les nuances inutiles. Je pense au contraire que ces dernières se doivent d’être (ou de demeurer) en langue française (comme dans la vie tout court)
Nous serons donc deux à continuer d’employer dans certains cas le/les nuances, vieillies ou pas.
Ravie de faire partie du club 🙂

Bonne soirée Chambarron

le 8 juillet 2023.

@Cocojade
Cependant, si je comprends tout bien, la nuance faite par Chambaron n’est pas la même que celle que vous faites (et qui est celle évoquée par Littré).

le 9 juillet 2023.

@ Marcel

Je ne comprends pas Marcel.
Je rejoins complètement la nuance expliquée par Littré
Ennuyant=passager, occasionnel
Ennuyeux = tout le temps, entièrement…

De ce que j’ai cru comprendre des propos de Chambarron, ce dernier indique sentir cette nuance et donne 2 exemples :
– Une forte contrariété est ennuyante. Je le rejoins, car une contrariété est logiquement passagère, occasionnelle (c’est à souhaiter 😉 )
Un cours fastidieux est ennuyeux. Ce cours est fastidieux, ennuyeux… Il ne l’est pas occasionnellement, il l’est toujours.

Ceci étant précisé, je reconnais qu’à force de réfléchir sur le sujet, je finis peut-être par manquer de recul et peut-être même de compréhension… C’est possible. Si c’est le cas, vous pouvez m’indiquer à quel niveau je commencerais à faire une sorte de méli-mélo ?

Merci Marcel 🙂

le 9 juillet 2023.

C’est bien pour ça que j’ai pris cette précaution, je ne suis pas sûr de tout bien saisir ! 🙂

Il m’a semblé que la nuance faite par Chambaron était une nuance de sens : désagrément vs lassitude et non de nature : accidentelle vs essentielle.
Et quand vous dites d’une personne qu’elle est ennuyante, vous ne dites pas qu’elle est contrariante, me semble-t-il, mais simplement qu’elle provoque de la lassitude, cela de façon non pas intrinsèque – comme le ferait une personne ennuyeuse – mais ponctuelle (si donc on accepte la nuance).

(De toute façon, de nos jours – et ce n’est pas récent, récent* – les quatre termes : ennui / ennuyer / ennuyant / ennuyeux ont tous ce double sens désagrément-contrariété/lassitude.)

 

* Dans son dictionnaire – qui date du XVIIe, Furetière donne d’ailleurs pour ennuyant le seul sens de provoquant de la lassitude (à moins qu’il faille comprendre que le bal est contrariant ? Mais j’en doute, mais l’exemple avec Diogène, je crois que seul le sens lassitude est envisageable).

 

le 9 juillet 2023.

@ Marcel

« (De toute façon, de nos jours – et ce n’est pas récent, récent* – les quatre termes : ennui / ennuyer / ennuyant / ennuyeux ont tous ce double sens désagrément-contrariété/lassitude.) »

Bien résumé au final
… si ce n’est cette notion de durée que j’entrevois (Vade rétro Satana)

J’agite le drapeau blanc 😉

le 9 juillet 2023.

Trois.  Je vois une différence non négligeable de sens entre les deux mots, et il y en a forcément une puisque nous avons deux suffixes différents -ant et -eux, des suffixes qui ont des sens différents.

Quelques pistes :

On pourrait par exemple étudier la distribution respective des suffixes qui ont servi à former un adjectif sur une base verbale (-ant. -eur, -eux, Qic). Le GLLF donne le même type d’explication pour tous ces suffixes, et la définition semble trop vague, trop générale pour être utilisable. On pourrait alors essayer de vérifier si l’opposition animé-non animé joue un rôle constant, ce que suggérait H. Martinet, et s’il est vrai par exemple que dans le cas où l’on a à la fois un adjectif en -eur et un adjectif en -ant dérivés d’une même base verbale, l’adjectif en -ant qualifie de préférence un substantif de réfèrent inanimé, et l’adjectif en -eur un animé. Des exemples comme oiseau grimpeur, raton laveur, coq chanteur d’un côté, et plante grimpante, roseau pensant de l’autre donneraient raison à cette théorie.
A propos de l’adjectif en -ant, dit « verbal »   Odile Halmøy

D’abord  ennuyant me semble avoir  un  objet  (humain)
Ennuyeux  non.

Ennuyant est formé sur le verbe ennuyer
Ennuyeux sur le nom ennui

On peut substantiver ennuyeux, pas ennuyant

l’autre versant du suffixe -eux a produit une longue série de noms créés à partir de radicaux verbaux et désignant des personnes dont le comportement est jugé négativement. Ces individus sont hésitants ou lents (balanceux, branleux, bretteux, lambineux, limoneux, taponneux, tataouineux), râleurs ou récalcitrants (babouneux, bougonneux, chialeux…), ont l’habitude de grappiller, d’intervenir fréquemment sans raison valable (achaleux, fouineux, ostineux,quêteux, seineux, téteux…) ou ont simplement des comportements jugés inadéquats (baveux ‘provocant’, cruiseux ‘dragueur’, licheux ‘flatteur’…).
L
es mots en -eux- Jean-Marcel Léard – Université de Sherbrooke

Tara Grand maître Répondu le 9 juillet 2023

Bonjour Tara

Décidément, toute question en suscite d’autres 😉

J’en ai une nouvelle qui est directement liée à ce que vous avez souligné, à savoir :
« Ennuyant est formé sur le verbe ennuyer
Ennuyeux sur le nom ennui
On peut substantiver ennuyeux, pas ennuyant »

Cela m’a semblé pertinent, aussi, j’ai recherché ce qui aurait pu être exemple comparable, à savoir des adjectifs verbaux versus adjectifs formés sur un nom.
Je précise que j’ai recherché à faire ce parallèle sur le cas précis de ma phrase, en recherchant volontairement uniquement des exemples précis de mots comparables, possédant les terminaisons ant ETeux .

Eh bien…, c’est un exercice qui s’est avéré difficile. Je vous en fais part.

Notre exemple de référence est :
Cela a l’air plus ennuyant (adjectif verbal d’ennuyer)
Cela a l’air plus ennuyeux (adjectif formé sur le substantif ennui)

Cela a l’air plus fatigant (adjectif verbal de fatiguer)
– Cela a l’air plus fatigable (adjectif formé à partir du substantif fatigue et plus précisément qui est sujet à la fatigue)
fatigable semble majoritairement employé pour qualifier l’état d’une personne. Là, on parle d’études… donc je dirais emploi possible, mais pas vraiment approprié.
– Cela a l’air plus fatigué ? Non cela ne colle pas
Cela a l’air plus fatigueux ? Cela n’existe pas

Cela a l’air plus crispant (adjectif verbal de crisper)
– Cela a l’air plus crispé  (adjectif formé à partir du substantif crispation) L’adjectif existe, mais ici cela ne colle pas vraiment.
– Cela a l’air plus crispable ? Cela n’existe pas
Cela a l’air plus crispeux ? Cela n’existe pas

Cela a l’air plus épanouissant (adjectif verbal d’épanouir)
– Cela a l’air plus épanoui  (adjectif formé à partir du substantif ?? je n’ai pas trouvé ) L’adjectif existe, mais ici cela ne colle pas
– Cela a l’air plus épanouissable ? Cela n’existe pas
Cela a l’air plus épanouisseux ? Cela n’existe pas

Idem pour enrichissant : enrichisseux n’existe pas.
Etc.

Peut-être que mon énoncé contient des erreurs (dans ce cas n’hésitez surtout pas à me reprendre) mais ce que je cherche à mettre en avant, c’est qu’il semble ne pas exister de comparaisons à notre référence (ant-eux) sur l’exemple précis de la phrase objet de ma question. Si elles existent, elles doivent être rares.

Ceci ne tendrait-il pas à venir appuyer, justifier, mettre en exergue la nuance qui existe réellement de manière intrinsèque entre ennuyant et ennuyeux ? (ce que nous reconnaissons à peu près tous)
Et, de ce fait, indiquer clairement à ceux qui ne la connaissent pas, l’existence d’une réelle subtilité justifiée entre ennuyant et ennuyeux ?

Je m’égare probablement, mais ce sont les petites réflexions qui me sont venues à l’esprit, après lecture de votre commentaire et suite à mes quelques succinctes recherches. Je vous les livre telles qu’elles sont…

Je vous remercie par avance pour votre retour 🙂

le 9 juillet 2023.

@Tara
C’est surprenant que vous citiez l’article d’Odile Halmøy puisqu’elle y bat complètement en brèche la distinction sémantique qui est traditionnellement faite entre adjectif « verbal » et adjectif « vrai » (je dois dire que je partage complètement son point de vue), nuance qui est celle évoquée par Littré au sujet de ennuyant et ennuyeux (qui lui aussi d’ailleurs la dénie).

Par ailleurs, vous dites « et il y en a forcément une puisque nous avons deux suffixes différents -ant et -eux, des suffixes qui ont des sens différents. »

Je ne suis pas bien sûr que ces suffixes aient des sens (bien) différents dans le cas qui nous intéresse.

Voici ce que dit le Tlfi à propos de –eux :
. Le dér. est employé comme adj. et signifie « qui a la qualité, la propriété exprimée par la base ».
Autrement dit, est ennuyeux ce qui est propre à susciter l’ennui.

Quant au suffixe –ant, il signifie qui fait [ce que signifie le verbe dont est issu l’adjectif].
Autrement dit, est ennuyant ce qui ennuie (dit autrement : ce qui suscite l’ennui).

Je vois donc là deux suffixes pour ainsi dire synonymes.

Vous dites (enfin je crois que c’est vous) :
« Ennuyant est formé sur le verbe ennuyer
Ennuyeux sur le nom ennui »
Dans l’article de Jean-Marcel Léard que vous citez, l’auteur précise : « Les mots en -eux qui ont une source nominale et ceux qui ont une source verbale se croisent donc et les deux partagent la valeur quantitative et évaluative. Il devient dès lors difficile de distinguer leur formation. »

Vous dites : « On peut substantiver ennuyeux, pas ennuyant »
On peut également substantiver ennuyant : L’ennuyant dans cette affaire, c’est que personne n’arrive à se mettre d’accord.
Alors, c’est vrai que l’on peut dire un(e) ennuyeux(se), et non un(e) ennuyant(e), mais peut-on vraiment tirer des conclusions à partir d’un seul cas – sur une série qui en plus risque d’être assez restreinte ? (Fut une époque (le deuxième n’est plus en usage) où on avait aussi bien un intrigant qu’un intrigueur, les deux de même sens.)

Les deux termes, tout comme le verbe et le nom dont ils sont issus, ont le double sens de contrariété et de lassitude, et semble-t-il aucune nuance du type accidentel (pour ennuyant) vs essentiel (pour ennuyeux).

 

Bref, il semble vraiment difficile de trouver une nuance entre les deux termes, mais si à l ‘encontre de la majorité (apparemment), et à l’instar de Cocojade vous en percevez, c’est une richesse, vous êtes donc plus riche que la majorité !

le 9 juillet 2023.

@ aux deux enfants terribles 😉
(c’est purement sur le ton de l’humour et c’est bien sûr respectueux)

Vos cheminements et arguments sont souvent contraires (pas toujours), et je prends plaisir à réfléchir aux différents versants proposés. C’est vraiment parfait pour moi 😉
Cependant, dans la majorité des cas, et ce même si ma propre opinion peut différer, je trouve les arguments sensés… quel que soit l’angle de vue proposé. À savoir des deux côtés.
C’est là que le bât (me) blesse 😉

Je crois que je n’ai pas la culture ni les connaissances nécessaires me permettant de réellement trancher.
Vos arguments et références sont particulièrement pointus. Cela semble encore plus vrai en matière de nuances et/ou de subtilités.
Je reste donc parfois (pas trop souvent heureusement) avec cette « sensibilité » en termes de nuances.(que je ne m’explique pas vraiment)
Pour tout dire, celle-ci m’apporte parfois richesse (je le crois, mais allez savoir), cependant dans la majorité des cas, elle m’est… ennuyeuse 😉 , car elle me fatigue.

Quoi qu’il en soit, je vous remercie d’essayer de me faire cheminer avec vos arguments autant qu’avec vos points de vue 🙂

Bonne fin de dimanche

le 9 juillet 2023.

Eh bien moi aussi Cocojade, j’ai fait ma petite recherche -ant/-eux. Rien trouvé sur les sites, mais deux occurrences dans ma tête. Deux, c’est peu.

Énerver > énervant — nerveux
cet enfant est énervant : l’adjectif concerne un objet au moins animé souvent humain
cet enfant est nerveux : il est plein d’énervement

Mousser > moussant — mousseux
J’ai acheté un produit moussant
Assis sur le tronc mousseux du sapin renversé, il considère…: (exemple su TLF)  couvert (plein) de mousse

Mais au-delà des « doublets » qui en effet sont rares, on peut voir que les adjectifs ayant le suffixe -eux, portent une notion commune :
Le suffixe -eux signifie :  plein de : peureux – heureux – astucieux – chaleureux – dangereux…. la série est très longue.
Le suffixe -ant porte une autre notion.
absorbant – affolant – allergisant – aveuglant – bouleversant… là aussi la série est très longue
Ces adjectifs gardent, le plus souvent, une caractéristique du verbe : l’action sur : qui absorbe, qui affole, qui bouleverse….

 Deux remarques :
– Quand on a un doublet, ce qui est en effet très rare, il semble logique que les suffixes marquent une notion différente > -eux : plein de // -ant : qui agit sur
– Quand on n’a que l’adjectif en -ant, il arrive  assez souvent que l’adjectif ait perdu la caractéristique verbale et se rapproche des adjectifs en -eux >  charmant – brillant – compatissant…
Et comme avec ennuyant/ennuyeux, nous avons la chance d’avoir les deux adjectifs, je vous invite à partager ma « richesse lexicale », Marcel !

Merci Cocojade de nous entraîner sur des chemins peu fréquentés.

le 10 juillet 2023.

Bonjour Tara,

Que vous répondre à part que … je suis à 100% en harmonie avec votre dernier commentaire ?
Peu de choses car effectivement je vous rejoins vos recherches et déroulés sur toute la ligne.
Oui les occurrences ant/eux de même sens sont très rares
Oui, si elles existent (très rarement) c’est qu’il y a eu logique à ce que ce soit le cas
Oui, cette logique à faire co-exister les deux versions uniquement dans certains cas semble l’avoir été pour créer nuance/subtilité/légère différence et ainsi offrir un choix (personnellement, je ne vois pas autre raison que celle-ci)

J’ai commencé ce post parce que je voulais savoir si cette nuance existait pour d’autres que moi.

J’ai rejoint et je rejoins toujours Littré sur la notion intrinsèque des mots « à eux seuls » (ce donc sans complément), à savoir le sous-entendu occasionnel (ant) versus tout le temps (eux)

J’y rajoute désormais la notion supplémentaire auxquelles vos recherches ont abouti, car ceci me semble très juste.

« Mais au-delà des « doublets » qui en effet sont rares, on peut voir que les adjectifs ayant le suffixe -eux, portent une notion commune :
Le suffixe -eux signifie :  plein de : peureux – heureux – astucieux – chaleureux – dangereux…. la série est très longue.
Le suffixe -ant porte une autre notion.
absorbant – affolant – allergisant – aveuglant – bouleversant… là aussi la série est très longue
Ces adjectifs gardent, le plus souvent, une caractéristique du verbe : l’action sur : qui absorbe, qui affole, qui bouleverse….
Deux remarques :
– Quand on a un doublet, ce qui est en effet très rare, il semble logique que les suffixes marquent une notion différente > -eux : plein de // -ant : qui agit sur
– Quand on n’a que l’adjectif en -ant, il arrive  assez souvent que l’adjectif ait perdu la caractéristique verbale et se rapproche des adjectifs en -eux >  charmant – brillant – compatissant… »

Alors, certes, les usages veulent ceci ou cela, et les choses changent ou évoluent différemment pour chaque cas.
Certes encore, il faudrait s’y habituer.
Cependant, si je devais conclure, mon sentiment est que, si la langue française offre des nuances, surtout si elles sont rares, ce n’est pas pour rien.
Pour ma part, tant que des adjectifs similaires mais nuancés (ant/eux)  existeront, je m’attacherai à les employer selon le cas de figure présenté, parce que oui, je pense que c’est une chance de pouvoir faire un choix plus précis.

Merci pour vos recherches poussées explorant des chemins peu fréquentés 🙂

le 10 juillet 2023.

@ tous

Merci d’avoir répondu à ma question en développant vos avis et cheminement.
Merci d’avoir pris la peine de chercher des références.

Bonne journée

le 10 juillet 2023.

@Tara
Énervant / nerveux, nerveux vient de nerf et énervant vient de énerver – avec le suffixe privatif é- qui est absent de l’adjectif nerveux, ça éloigne pas mal les deux, suffisamment pour justifier une différence de sens qui va bien au-delà de la nuance, pour le coup.

Mousseux / Moussant, il faut comparer ce qui est comparable, et les deux exemples que vous donnez produit moussant vs sapin mousseux ne le sont pas, puisque si les deux viennent bien de mousse, la mousse du second est le sens premier et propre qui désigne la plante, alors que celle du premier est le sens figuré qui a l’allure de la mousse (plante) : il y a là deux sens différents et donc rien d’étonnant à ce que les adjectifs aient aussi des sens différents, d’ailleurs le Tlfi consacre deux entrées distinctes à ces deux mousses, tout comme aux mousseux qui leur correspondent. Un vin mousseux, ce n’est pas un vin qui est plein de mousse, mais un vin qui produit de la mousse, un vin moussant, quoi – On est donc loin (très loin) de la paire ennuyeux / ennuyant.

Vous m’invitez à partager votre richesse lexicale, sans doute devrais-je suivre votre invitation, cependant je rejoins entièrement le point de vue de Bruno que je cite « vous risqueriez soit de mal interpréter la nuance en lisant le mot , soit que vous soyez mal interprétée en l’employant. Faute de consensus, il faut savoir prendre acte de la perte actuelle de nuance. »

@Cocojade
En vrai Littré rapporte cette nuance, mais il ne la défend pas, au contraire.
Merci et bonne semaine à vous. 🙂

le 10 juillet 2023.

D’accord. Eh bien disons que « ennuyeux » vient de « ennui » et « ennuyant » de « ennuyer ».
Ennuyeux  (TLF)
A.− [Correspond à ennui

J’avais oublié effectivement de le mentionner. Je croyais l’avoir fait. Les adjectifs en -ant sont formés sur des verbes, les adjectifs en -eux sur des noms.
Pour « mousseux »,  rappelons que le mot a plusieurs acceptions.  « qui ressemble à de la mousse », mais aussi « plein de mousse ».
Ceci étant dit, je ne cherche pas du tout à avoir raison. Comme je sens cette nuance, j’aimerais bien savoir pourquoi… et c’est tout.

le 11 juillet 2023.

@ Marcel

Oui, vous avez raison de souligner que Littré cite une nuance sans pour autant indiquer la soutenir
(Dans ma soif à la nuance, j’aurais probablement eu vite fait de faire un amalgame pour défendre ma cause 😉 )

Ce qui compte tout de même, dans notre sujet « général », c’est que Littré a tout de même fait état de l’existence de cette subtilité. Pour ma part, cette « référence » était importante.
(ce n’était déjà pas simple avec elle, alors… 😉 )

Bon après-midi Marcel

le 13 juillet 2023.

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