RE: Maline et maligne

Répondu

Bonjour,

Malin = au féminin Maligne (point barre, c’est ainsi)
Autant admis pour rusé(e) ou coquin(e) dans le bon sens du terme, que pour « malsain » ou « délétère » ou autre « qui se plaît à faire le mal« .
Ceci sans parler du « Malin » lui-même qui, nous serons d’accord (je l’espère), a tout sauf le côté « agréablement » coquin 😉 )

Maline= les marées ou une fine dentelle
(résumé grossier)

À l’oral, il est souvent dit ou entendu maline là où nous devrions entendre maligne.

À tort ou à raison, cela tend à se généraliser à l’usage (ce même à l’écrit).
Visiblement, le mot maline devient de plus en plus utilisé pour exprimer le versant positif, malicieux, astucieux, coquin.
L’emploi du mot maligne, semble être préférentiellement réservé pour le versant négatif, délétère, mauvais.
(De fait, une tumeur maligne n’a rien de malicieusement coquin)
Vient corroborer ceci la définition même de la malignité.

Bien qu’a priori non validée officiellement par les instances à ce jour, je vois d’ores et déjà une nuance (qui me semble justifiée) entre maline et maligne.

En est-il de même pour vous ?
Merci par avance

Cocojade Grand maître Demandé le 23 juin 2023 dans Question de langue
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On trouve la même alternance avec bénigne/ bénin
pourquoi  ?

L’adjectif latin qui signifiait « bienveillant » était benigna au féminin. Il a donné bénigne en français, mais le masculin benignus est également devenu bénigne. En médecine, par exemple, on parlait d’un œdème bénigne, de même qu’une tumeur bénigne. Bien des épicènes ont disparu à la fin du Moyen Âge. […] A l’inverse, un masculin bénin, attesté dès le XIIIe siècle, s’est répondu au XVe siècle. Dans le couple bénin/bénigne, c’est donc le premier qui est un nouveau venu.
L’antonyme malin, maligne a suivi le même trajet. L’ancien français utilisait maligne (du latin malignus) au masculin comme au féminin. Au Xe siècle, un masculin refait, malin, est apparu, mais, de surcroît, le phénomène s’est poursuivi. En effet, si le couple malin/maligne est d’usage dans la bonne langue, notons que la langue orale ou régionale a vu l’apparition, dès le XVIe siècle, d’un nouveau féminin maline, formé sur malin. Ces deux féminins ne sont pas synonymes. »
D’après Larousse (YouTube)

Vous n’êtes pas la seule à sentir une nuance. Le mot « maline » est dans les conversations depuis bientôt 6 siècles et il est bien normal qu’il ait une raison d’être.
En effet, si « maligne » s’est offert un doublet : « maline », « bénigne/bénin » n’ont pas donné de « bénine ». Il faut se demander pourquoi, d’autant plus que les adjectifs « maligne » et « bénigne »  sont des antonymes.
La raison est forcément celle que vous avancez : on a eu besoin de trouver un autre adjectif qui ne soit pas contaminé par les connotations négatives, pour assumer les acceptions sympathiques du mot. Et on a trouvé « maline ». Hélas, impossible d’avoir l’équivalent de « maline » au masculin.
Alors, si « maline » est encore rejeté dans les familiarités, c’est peut-être à tort.

Tara Grand maître Répondu le 23 juin 2023

Je ne dis pas que votre hypothèse du maline (sens positif) pour l’opposer au maligne (sens négatif) est fausse, néanmoins, elle me parait très bancale du fait qu’elle ne fonctionne que pour le féminin (sans compter qu’on trouve des maline à sens négatif).
Ça me fait penser à certains opposants de la féminisation des métiers et fonctions qui donnent comme argument pour rejeter écrivaine qu’on entend le mot vaine ! Manifestement, ils ont l’oreille très sélective. 🙂

 

Quant à la forme bénine, elle a bien existé (dans le Lexique de la langue de Malherbe) : Qui d’ailleurs était d’avis de la bannir : .

Et on la trouve aussi de nos jours, y compris sur des sites médicaux (bon les médecins ne sont pas recrutés sur leurs compétences orthographiques).

le 23 juin 2023.

Tara et Marcel1,

C’est toujours un plaisir de vous lire tous les deux.
Vous me faites bénéficier de bien plus que des règles de Français.
Vos connaissances m’épatent autant que votre soin à les étayer en prenant de plus le temps de rechercher des références. (ce qui est souvent nécessaire dans la catégorie « question de langue »)
Je rajouterai que vos points de vue, parfois complémentaires, parfois divergents 😉 , m’offrent encore plus matière à réflexion.
C’est passionnant.
Merci

En fait, pour en revenir au sujet, je remarque (sauf erreur) que c’est une forme unique qui était employée, autant pour le masculin que pour le féminin. Ce n’est que dans un deuxième temps que se sont imposées les formes masculines.
C’est bien »bénigne »qui a engendré dans un deuxième temps « bénin » et « maligne » qui a engendré dans un deuxième temps « malin ». (Ce n’est pas plutôt rare cela ?)

Il est amusant de constater que lorsque que l’on recherche la définition de « maligne » on aboutit principalement sur « malin, maligne », et rarement uniquement sur maligne, et qu’il est souvent indiqué que :
Au féminin, l’adjectif « malin » devient « maligne »
Si l’on en juge par l’historique, nous devrions plutôt lire  » Au masculin, l’adjectif « maligne » est devenu « malin ».
(mais bon, là, je titille 😉 )

le 23 juin 2023.

Merci Cocojade. 🙂
Pour se qui est des connaissances, Google (et ses compères) est un excellent pourvoyeur !

le 23 juin 2023.

Oui merci Cocojade et je vous retourne le compliment : un plaisir de se pencher sur les énigmes que vous nous posez. Vous avez l’art de mettre le doigt sur le détail qui intrigue.
Et j’apprécie aussi beaucoup les interventions de Marcel qui a l’oeil si vif…

le 24 juin 2023.

Le troisième adjectif de la série, issu d’un mot latin en ignus, est digne. Celui-là est demeuré épicène et n’a donné ni din ni dine.

le 24 juin 2023.

Information supplémentaire intéressante Bruno 🙂

Y a-t-il eu là, logique particulière ?
Il y a des mystères qui le demeureront…

le 24 juin 2023.
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