« y » ou « à lui »
Bonjour,
Doit-on dire « la morale est indissociable du droit mais elle ne substitue pas à lui » ou « la morale est indissociable du droit mais elle ne s’y substitue pas » ?
L’opposition animé/inanimé ou humain /non-humain n’est, en français, ni régulière ni stable. C’est pourquoi les deux pronoms sont possibles.
Pour les animaux, de nos jours on emploie « lui », même pour les animaux : Vous voyez ce cheval, donnez-lui de l’eau.
Quand il s’agit d’un objet : Cette maison était trop petite, nous lui/y avons ajouté une pièce.
Ici, il il y a préférence pour le neutre « y » car nous n’avons même pas affaire à un objet mais à une notion abstraite :
La morale est indissociable du droit mais elle ne s’y substitue pas .
Les deux formulations sont grammaticalement correctes mais la seconde est plus courante et est plus précise, car elle établit une distinction claire entre la morale et le droit, en indiquant que la morale ne se substitue pas au droit.
Bonsoir,
Si l’oubli de « se » dans votre première phrase est involontaire alors les deux sont correctes et on exactement le même sens (« y » signifiant à lui)
« la morale est indissociable du droit mais elle ne se substitue pas à lui » ou « la morale est indissociable du droit mais elle ne s’y substitue pas »
== Deux notions en jeu ==
Vous n’hésitez pas seulement entre « lui » et « y » : pronom personnel ou pronom neutre.
Vous n’hésitez pas seulement entre « lui » et « à lui » : pronom datif ou pronom tonique.
Le pronom « lui » peut être pronom datif (je lui obéis) ou pronom tonique (je pense à lui). On voit mieux la différence en passant au pluriel, où le pronom datif est « leur » (je leur obéis) et le pronom tonique est « eux » (je pense à eux).
Deux constructions existent, selon les verbes :
— je leur obéis, je leur fais confiance
— je pense à eux, je fais référence à eux
La question n’est pas ici de savoir pourquoi, mais de comprendre que ce critère fait partie de votre question.
On ne doit pas seulement choisir entre pronom neutre y et pronom personnel lui, mais entre pronom datif + verbe et verbe + préposition + pronom tonique. Ces deux critères se croisent.
Si vous appliquiez la règle donnée par Tara, vous obtiendriez :
— j’aime Pierre mais je lui préfère Paul, OK
— j’aime le train mais j’y préfère la voiture, au lieu de — j’aime le train mais je lui préfère la voiture
— j’aime le droit mais j’y préfère la morale, au lieu de — j’aime le droit mais je lui préfère la morale
Ne tenez donc jamais compte de cette règle souvent donnée : « lui » pour une personne et « y » pour un objet ou une notion. Elle est idiote. Un pronom personnel peut avoir des antécédents de tous types.
== Comment se construit « substituer » ==
« substituer une chose à une autre » peut se construire comme « préférer une chose à une autre », avec de vrais pronoms personnels.
* substituer + COD + COI :
— Dans la nouvelle équipe, j’ai substitué Pierre à Paul. Si Paul est absent, c’est parce que je lui ai substitué Pierre.
— Pour le match, j’ai remplacé le ballon par une citrouille. Au ballon, j’ai substitué une citrouille. S’il n’y a pas de ballon, c’est parce que je lui ai substitué une citrouille.
— Quant aux règles officielles du rugby, je les trouvais trop rigides, je leur ai substitué un code moral facultatif.
— Nous avions le code civil, nous lui substituerons un code moral. Nous avions la loi, nous lui substituerons la liberté de conscience.
Vous voyez que le pronom COI lui/leur est un pronom personnel qui remplace logiquement sans distinction une personne, un objet, ou une notion. Ce n’est absolument pas un critère « animé / inanimé » qui commande le choix du pronom personnel. Cent fois vous le lirez sur ce site, mais cent fois ce sera faux.
À chaque fois qu’on sait de quoi on parle, à chaque fois que l’antécédent du pronom est un nom avec son article défini, à chaque fois qu’on compare très clairement deux choses, il est normal d’utiliser un pronom personnel clair et précis, comme l’exprime felzz :
— la morale est indissociable du droit mais nous ne prétendons pas pour autant la lui substituer : bonne construction (un pronom personnel sujet, un pronom personnel cod, un pronom personnel coi)
— la morale est indissociable du droit mais nous ne prétendons pas pour autant l’y substituer : construction floue et merdique (un pronom personnel sujet, un pronom personne cod, un pronom neutre représentant on ne sait quoi).
* construction pronominale : se substituer à
Si nous sommes devant une simple pronominalisation accidentelle d’un verbe transitif, il n’y a aucune raison de ne pas chercher à conserver la construction du paragraphe ci-dessus :
— Nous ne substituons pas la morale au droit. Nous ne la lui substituons pas.
Mais il se trouve qu’on constate l’impossibilité de certaines combinaisons de pronoms à la forme pronominale :
— Pierre ne se substitue pas à Paul. Il ne se lui substitue pas.
— La morale ne se substitue pas au droit. Elle ne se lui substitue pas.
Quand on parle de personnes, dont il est clair qu’on ne peut pas les remplacer par un pronom neutre, il faut obligatoirement revenir à la construction « à + pronom tonique ».
— Pierre ne se substitue pas à Paul. Il ne se substitue pas à lui.
Mais, quand on parle d’objets non identifiés, puisque la construction avec un pronom neutre ne faisant pas référence à une chose définie, n’étant pas un pronom personnel au sens strict, est syntaxiquement possible (je pense à cela, j’y pense), il faudrait accepter de déclasser le syntagme « le droit » en un simple indéfini ou partitif neutre remplaçable par « y » ?
— La morale ne se substitue pas au droit. Elle ne s’y substitue pas.
Non, ce n’est pas parce que cette phrase est syntaxiquement correcte (avec un COI neutre) qu’elle est équivalente sémantiquement à la phrase avec un COI pronom personnel avec son antécédent défini :
— La morale ne se substitue pas au droit. Elle ne se substitue pas à lui.
Choisissez cette dernière option.