COI ou CC ou autre ?
Dans la phrase ci-dessous :
Eva écrit chaque jour à ses parents.
Quelle est la fonction grammaticale de « à ses parents » ?
Sachant qu’un complément d’objet (en l’occurrence ici un supposé COI) a pour première caractéristique de ne pas pouvoir être supprimé ou modifié, « à ses parents » pouvant être supprimé ici, donc ce n’est pas un COI.
Est-ce alors un complément circonstanciel ? Si oui, de quelle circonstance ?
Ou une autre fonction ? Le cas échéant laquelle ?
Un complément d’objet direct est construit directement, c’est à dire qu’il n’y a pas de préposition entre lui et le verbe.
Dès qu’il y a préposition, il s’agit d’une autre fonction : soit complément d’objet indirect, soit complément circonstanciel.
On peut donc se demander comment déterminer si le nom est COI ou CC.
– le complément d’objet peut être supprimé :
Alice écrit une lettre > Alice écrit
Alice ouvre la porte > Alice ouvre
Alice mange une pomme > Alice mange
Etc.
Les manuels scolaires, aussi bons soient-ils, restent des manuels scolaires : les analyses ne sont poussées qu’aussi loin qu’il est possible pour une tranche d’âge. On ne peut entrer dans des subtilités avec des enfants jeunes. Ceci dit, il me semble quand même dommage de transmettre une contre-vérité comme celle-ci car l’enfant, même jeune, maîtrise suffisamment sa langue pour accepter : Alice mange après avoir enlevé une pomme, par exemple.
Attention de ne pas mélanger deux méthodes qui sont en fait deux découpages de la réalité : Soit on divise les compléments selon la grammaire traditionnelle, en compléments d’objet et compléments circonstanciels, soit on adopte la méthode des linguistes de la fin du XXe siècle et on oppose compléments essentiels et compléments non essentiels, si on considère que tous les compléments en question dépendent du verbe, ou comme une opposition entre compléments du verbe et compléments de phrase, si on considère que la nouvelle répartition est induite par une différence de structure. Défense du complément circonstanciel -François Trouilleux
Or, là aussi les manuels scolaires font souvent erreur en mélangeant les deux analyses, voire les trois. D’où une grande confusion.
Vous-mêmes parlez à la fois ici de compléments circonstanciels ou non, et de compléments essentiels ou non.
On ne peut pas raisonner ainsi.
« Nouvelle » grammaire :
– le complément est essentiel quand le verbe ne peut pas s’en passer
Alice porte une valise > °Alice porte
Alice écrit – Alice ouvre – Alice mange : l’objet existe toujours même s’il n’est pas donné > une lettre/une porte/une pomme sont essentiels
Eva écrit chaque jour à ses parents : l’objet indirect est essentiel (vu le sens du verbe écrire qui porte la notion de correspondance).
Le complément essentiel peut donc être un objet ou un lieu par exemple :
Alice va à Lyon > °Alice va
Grammaire traditionnelle
– il faut reconnaître que la limite est parfois floue entre COI et CC. La pronominalisation est un bon test en effet.
mais de façon générale, le sens permet de saisir quand le complément donné porte sur la circonstance.
Et puisqu’il s’agit ici de s’appuyer sur le sens (et non la structure) il est utile de se souvenir de l’étymologie du mot : dérivé de circumstare « se tenir autour, être autour; entourer (TLF).
On dira que les circonstances sont « ce qui entoure » le fait, comme les circonstances d’un accident ou d’un délit par exemple.
Le fait mis en situation en fait : lieu, moment, façon dont il s’est produit, les causes, parfois le but, les conséquences…
Alice écrit sur du papier blanc : complément circonstanciel de lieu
Eva écrit chaque jour à ses parents:complément d’objet indirect (elle leur écrit)
Eva écrit chaque jour pour ses parents : complément circonstanciel de but
Merveilleuse leçon de grammaire, chère Tara : claire, précise, exhaustive : un immense merci à vous !
Voilà qui fait plaisir. Merci.
Bonjour,
D’où tenez-vous qu’un complément d’objet « a pour première caractéristique de ne pas pouvoir être supprimé ou modifié » ? Certains verbes (résoudre, apercevoir, découvrir, etc.) ne peuvent certes s’en passer, mais de très nombreux verbes (écrire, parler, boire, manger, etc.) connaissent aussi un emploi absolu. Dans cette phrase, « à ses parents » est sans mystère le complément d’objet indirect du verbe « écrire« .
En réponse à votre question, Bruno 974 : « D’où tenez-vous qu’un complément d’objet « a pour première caractéristique de ne pas pouvoir être supprimé ou modifié » ? Je le tiens de tous les manuels d’enseignement scolaire. Pour ne citer que l’un d’eux, et sans doute le meilleur, « Lelivrescolaire (5ème), que j’ai sous les yeux (mais cela est dit partout) : « Les compléments essentiels (donc COD, COI et attribut du sujet) ne peuvent pas être supprimés (à moins de changer complètement le sens de la phrase) ou déplacés. »
Mais je comprends à présent ! C’est un COI sans conteste car on peut pronominaliser : « Eva leur écrit tous les jours. »
Bonsoir,
comme le nom l’indique un complément reste un complément.
Chaque lundi, je mange des pommes de mon verger lors du petit-déjeuner .
Pardonnez-moi Ouatitm, mais votre commentaire est très laconique. Pour qu’il est un intérêt à être partagé, merci de développer une réflexion.
Vous avez raison, je précise donc :
Ce que je voulais mettre en évidence c’est que chacun des compléments précise l’action qui est fort simple : je mange.
Tout comme dans votre phrase à laquelle on peut ajouter nombre de compléments pour préciser l’action bien que l’on puisse en supprimer un, deux, etc. sans que cela ne supprime cette action : Eva écrit.
Eva écrit une lettre (COD) chaque jour(CC temps) à ses parents (COI) avec un stylo à plume (CC de moyen).
Et effectivement COD et COI peuvent être remplacés par un pronom :
Eva la (COD) leur (COI) écrit chaque jour(CC temps) avec un stylo à plume (CC de moyen).