qui sait ?
J’ai une question ponctuation.
Dans la phrase : Une jeune mendiante attend quelques euros qu’elle redonnera tout à l’heure à un homme de main, peut-être le père du bébé, qui sait.
Faut-il un point d’interrogation après qui c’est ? En faut-il un nécessairement après cette interjection ?
Question intéressante et inédite me semble-t-il.
On ne peut mélanger sans désordre une phrase affirmative et une autre interrogative. Il faut donc isoler les deux :
–soit par une ponctuation forte : Une jeune mendiante attend quelques euros qu’elle redonnera tout à l’heure à un homme de main, peut-être le père du bébé. Qui le sait ? [ l’interrogation porte sur la totalité de ce qui précède].
– soit par une incise, ici typiquement des parenthèses : Une jeune mendiante attend quelques euros qu’elle redonnera tout à l’heure à un homme de main, peut-être le père du bébé (qui sait ?) [ ne porte que sur le membre qui précède].
– soit par un tiret long (dit cadratin : Une jeune mendiante attend quelques euros qu’elle redonnera tout à l’heure à un homme de main — peut-être le père du bébé, qui sait ?
Dans tous les cas, le point d’interrogation doit être maintenu.
ah oui, belle analyse ! merci !!!
C’est très bien vu, mais je m’interroge sur le caractère interrogatif de « qui sait », justement.
Étonnant que le caractère interrogatif soit mis en doute !
Cela vient certainement de l’usage.
Au futur, le doute disparait. Qui saura dire pourquoi ?
La très pertinente analyse de Chambaron montre bien que « qui sait ? » demeure interrogatif. Si on ne veut pas de cette forme, alors on peut utiliser : « personne ne le sait ».
Cette forme interrogative est choisie pour des raisons bien précises : évoquer l’oral, intervenir en tant que narrateur, c’est à dire sortir un peu du récit, solliciter le lecteur…
Qui sait (et non qui c’est) s’emploie pour exprimer l’incertitude quant à la proposition qui précède ou suit.
Ça remobiliserait peut-être les abstentionnistes, qui sait ? — (journal 20 minutes, 8 avril 2022, page 8)
Qui sait, ils ont pu avoir des bouchons sur l’autoroute…
Qui sait si les médecins suffiront à la guérir…
Il sentait de nouveau son désir poindre et il lui fallait le tuer dans l’œuf, sinon qui sait ce qui aurait pu arriver ? — (Philippe Morvan, Ours, Calmann-Lévy, 2018)
Bien qu’il soit en mauvais termes avec sa soeur et qu’il ne l’ait pas vue depuis deux mois, il viendra peut-être avec elle, qui sait.
Comme vous le voyez, c’est très variable. Vous pouvez laisser votre phrase telle quelle (en évitant redonner) ou ponctuer.
Une jeune mendiante attend quelques euros qu’elle donnera tout à l’heure à un homme de main, peut-être le père du bébé, qui sait ?
ok, merci, y a pas vraiment de règle, quoi…
Moi je n’aurais pas mis de point d’exclamation.
« Qui sait » est, à mon sens, une question rhétorique : elle n’attend aucune réponse, elle induit plutôt la possibilité, suggère l’espoir comme la crainte.
Des points de suspension pourraient aussi servir l’effet de sous-entendu. Qui sait…
Question rhétorique ou pas, il faut adopter la typographie d’une question sinon ces deux mots « flottent » dans la phrase, sans statut grammatical.
@ chambaron
La ponctuation est là pour servir l’écrit. Pas pour le contraindre.
Les points de suspension, sont aussi légitimes qu’un point d’interrogation, et suffisent à mon avis à donner à ces deux mots flottants comme vous dites, assez de consistance pour tenir le cap.
Je vois le « Qui sait » lui même comme un point de rupture brusque entre la pensée qu’il interromps et la suite du récit, qui pourrait être une pensée distincte.
Points de suspension, Points mis à la suite les uns des autres pour marquer la suspension. (https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A8S2058)
Tant que l’idée passe, tout est bon.
À l’auteur de la question d’évaluer ce qu’il voulait dire.
Bonsoir,
Petit complément.
Notons qu’un mot comme quel s’emploie aussi bien pour l’interrogation que pour l’exclamation.
Et que d’un emploi à l’autre la ponctuation a suivi. Exemple :
On dit bien « Quel personnage ? » et « Quel personnage ! »
On devrait tout autant pourvoir écrire « Qui sait ? » et « Qui sait… » afin d’exprimer respectivement l’interrogation, ou la suspension.
Pour revenir à la question elle-même, j’utilise « Qui sait » en sous-entendant que « Personne (au final/à vrai dire/en fait) ne sait ».
Cet emploi est déclaratif ou hypothétique, et n’est en rien interrogatif.
Comme l’a écrit @chambaron, c’est à l’auteur de voir.
Bonne nuit.