Concordance des temps ?
Ce matin à 7h 30, j’entends cette phrase du journaliste : »Il n’aura échappé à personne que l’école était en grève aujourd’hui ».Pourquoi l’imparfait plutôt que le présent ? Préciosité de langage?
Le passé antérieur n’a ici aucune valeur temporelle. La valeur est modale : il indique une rétrospection (Fait d’envisager un processus en remontant dans le passé; point de vue rétrospectif).
Comme dans l’exemple suivant, où on le voit plus clairement : Mon pauvre ami, ta vie n’aura été qu’une succession d’échecs.
C’est la raison pour laquelle suit l’imparfait (on s’est situé -artificiellement-) dans le passé dans la principale et la subordonnée doit suivre (concordance).
Avec le futur antérieur « tout le monde aura compris », « il n’aura échappé à personne »… la concordance des temps artificielle est peut-être encore plus visible et donc encore plus ridicule. Mais elle est tout autant fautive avec les simples passés composés « tout le monde a compris », « il n’a échappé à personne »…
Dès que vous avez un mot comme « aujourd’hui » dans la subordonnée, c’est que cette subordonnée ne dépend pas syntaxiquement d’une principale exprimée dans un système de temps passé, et il est donc hors de question d’appliquer la moindre concordance des temps mécanique.
On dit :
— Tout le monde comprit alors qu’on était ce jour-là un jeudi.
— Il n’échappa alors à personne que l’école était en grève ce jour-là.
Mais on dit :
— Tout le monde a compris qu’on est (et non était) aujourd’hui jeudi.
— Il n’a échappé à personne que demain ce sera (et non serait) vendredi.
— Il n’a échappé à personne que l’école est en grève aujourd’hui.
Si vous ne pouvez pas remplacer le passé composé par un passé simple, si vous ne pouvez pas remplacer « aujourd’hui » par « ce jour-là » ni « demain » par « le lendemain », alors la phrase globale n’est pas dans un système passé, et le passé composé de la principale n’induit pas un temps passé dans la subordonnée.
Tara, qui a répondu avant moi, fait partie des plus ardents défenseurs de la non concordance des temps, jusqu’à l’absurde, du type « il expliqua que je viendrai demain »… Chaque fois qu’on lui présente une concordance obligatoire elle défend la possibilité de ne pas l’appliquer, en considérant que le système passé de la principale laisse la subordonnée libre de s’écrire dans un système présent, et pour une fois que la concordance est incorrecte, et qu’il faut rester dans le système du présent, elle défend une concordance artificielle au passé, c’est absurde.