Elle pleurait d’abondantes larmes ?
Bonsoir,
Cette phrase est-elle correcte ?
« Elle pleurait d’abondantes larmes… »
Merci,
Virginie
Bonsoir Virginie
Cette phrase est très poétique : le pléonasme est ici fort joli. Et il est balancé par l’inversion de l’adjectif.
« Elle pleurait d’abondantes larmes » a une tout autre sonorité que le banal « Elle pleurait à chaudes larmes » ou le descriptif « Elle pleurait abondamment ».
Si pleurer des larmes, vivre une vie ou mourir de mort sont de fait tautologiques, la présence d’un complément du nom fait qu’il n’y a non plus simple répétition du sens du verbe, mais précision ou restriction.
Dès lors, pleurer des larmes amères / de sang / abondantes, ou vivre une vie de patachon / peinarde / exaltante et mourir de mort lente / d’une belle mort deviennent tout à fait acceptables.
Mis-en-trope, cette précision est limpide.
Bonsoir,
Je ne sais pas quel(s) point(s) vous gêne(nt). Le fait qu’en principe pleurer est intransitif ? L’inversion de l’adjectif ? L’adjectif abondant pour qualifier larmes ? Autre(s) ?
Pour ces trois cas, la réponse est oui, la phrase est correcte.
Concernant le premier point et par rapport à votre phrase, pleurer accepte un objet interne : pleurer toutes les larmes de son corps, par exemple, et donc pourquoi pas pleurer des larmes abondantes ou d’abondantes larmes ?
(Dans d’autres cas, pleurer accepte également un COD : pleurer la mort de quelqu’un, par exemple.)
Au moins Alexandre Dumas (1) et Jules Michelet (2) (mais ils ne sont pas les seuls) ne partagent pas l’avis de Prince :
(1) je dois dire qu’elle me témoigna beaucoup de dévouement dans cette dernière entrevue, car elle pleura des larmes abondantes !
(2) Idamas pleurait d’abondantes larmes sur la défaillance du monde et la langueur du genre humain
Si sémantiquement Elle pleurait abondamment équivaut à peu près à Elle pleurait d’abondantes larmes / des larmes abondantes, il n’en est pas de même stylistiquement. Après on a le droit de ne pas aimer, mais de là à dire que c’est incorrect, voilà qui me parait un peu trop radical.
Virginie, cette phrase est incorrecte, car elle est pléonastique. On ne peut que pleurer des larmes. Le fait qu’elles soient abondantes ne change rien. C’est comme si vous disiez elle saignait du sang en abondance..
Dites Elle pleurait abondamment.
Cordialement
Pleurer des larmes, serait une banalité, même une pure tautologie.
Mais avec un élément subordonné (épithète, complément nominal, etc.), je vous concède finalement, mis-en-trope, que l’on peut considérer que ce n’est guère pléonastique. L’heure est aux concessions !
Mais pourquoi dire alors Elle pleurait d’abondantes larmes alors qu’il suffit de dire Elle pleurait abondamment ?
PS Elle pleurait d’abondantes larmes n’éveille pas du tout mon sens poétique !
Je trouve l’expression très agréable.
Je vous ai attribué un vote positif car je trouve votre apport très important ici.
Cathy, j’adore votre humour.
Mais pourquoi dire alors Elle pleurait d’abondantes larmes alors qu’il suffit de dire Elle pleurait abondamment ? Ben, vive la richesse, la créativité et la subjectivité !, puisque vous voyez bien que plusieurs personnes apprécient cette tournure. Quant à moi, je trouve le Elle pleurait abondamment terriblement plat, et l’autre tournure me parait sinon plus poétique en tout cas certainement nettement plus imagée. Les deux ne déclenchent ni la même image mentale, ni les mes sensations.
Quoi qu’il en soit de ces différences de jugement esthétique, d’un strict point de vue grammatical, je ne vois pas en quoi la phrase que nous soumet VirginieK ne serait pas correcte.
… »vous voyez bien que plusieurs personnes apprécient cette tournure. »
Je vois aussi que plusieurs personnes (trois) ont formulé au moins une critique contre cette phrase : Evinrude (pour qui il y a un pléonasme), Cathy Lévy et moi.
De cela vous ne parlez pas… De plus, vous continuez à dire que vous ne voyez pas pourquoi la phrase ne serait pas correcte de nombreuses heures après mon changement de position sur l’existence d’un pléonasme…
Prince, ne vous emballez pas. Un pléonasme n’est pas une faute de français en soi. C’est une figure de style, parfois lourde voire stupide, mais qui peut être porteuse de sens et évocatrice. Vous l’avez reconnu en effet et je vous en sais gré, mais de grâce ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit.
Bien sûr que de cela j’ai parlé, puisque j’ai distingué jugement esthétique et jugement grammatical. Pour ce qui est du premier, chacun est libre d’apprécier ou non la tournure ; pour ce qui est du second, rien n’interdit grammaticalement ce pleurer d’abondantes larmes.
Et ma remarque sur la richesse de la langue, sur la subjectivité, la créativité des locuteurs et sur le fait que plusieurs personnes appréciaient la formule relevait bien évidemment du seul premier.
TLF :
B. − [Avec un complément d’objet interne]
Si lorsqu’on dit ou écrit « pleurer des larmes de sang » sans nous renvoyer à « pleurer du sang », alors pourquoi refuser les « abondantes larmes » ?
A partir du moment où les larmes sont qualifiées il n’y a plus pléonasme. On peut avoir envie de parler de larmes d’argent même pour un humain et alors, vous serez d’accord, on ne dira pas : pleurer de l’argent (ou on dit toute autre chose).
Pleurer des larmes fraîches comme la rosée : vous acceptez ?
Pleurer des larmes au goût amer est bien différent de pleurer amèrement.
Etc.
À mon sens, on ne peut pas « pleurer des larmes« , la tournure est parfaitement incorrecte. Tout à fait d’accord avec Prince, c’est comme si vous disiez qu’elle « saigne un abondant sang » !
Que certains grands auteurs aient utilisé cette tournure par le passé ne prouve absolument pas que « cela se dit ».
On « verse des larmes« , ou on « pleure à chaudes larmes« , on peut dire « elle a beaucoup pleuré« , mais « pleurer d’abondantes larmes« ………………….
Merci Cathy Lévy.
Evinrude, On sait qu’il faut distinguer les pléonasmes dits « pervers » (monter en haut) et ceux qui constituent une figure de style ( Le Tartuffe de Molière : « Je l’ai vu, dis-je, vu, de mes propres yeux vu, /Ce qu’on appelle vu »). J’ai rappelé cette distinction ici même l’an dernier.
Vous avez dit que c’était un « pléonasme »… De grâce, soyez plus précis la fois prochaine pour m’éviter de croire à tort que vous abondez dans mon sens.
Bref, on ne va pas faire le buzz, d’autant que, depuis cette nuit, tout est devenu clair. On a mieux à faire.
Bonne soirée.
Bien vu. Je préciserai désormais : pléonasme vicieux ou pléonasme plaisant. « Fort joli » n’était, à l’évidence, pas suffisant.
Merci Evinrude.
De rien, Prince. Bien souvent, sur ce site, les commentaires me mettent en joie.