1. C’est de… que / dont 2. Négation avec « jamais »
Bonjour,
Je m’interroge sur deux points :
1. C’est de… que / dont
C’est de moi qu’il est amoureux OU : c’est de moi dont il est amoureux (?)
C’est de cela que je parle OU : c’est de cela dont je parle (?)
2. Négation (ou pas) avec « jamais »
Je me suis souvent demandé comment des gens coupables pouvaient imaginer qu’on leur pardonnât jamais (Ou : qu’on ne leur pardonnât jamais). Au présent : je me demande souvent comment des gens coupables peuvent imaginer qu’on ne leur pardonne jamais (qu’on leur pardonne jamais) (?)
As-tu jamais su que j’avais voyagé en inde ? OU : N’as-tu jamais su que j’avais voyagé en Inde ? Le sens est-il le même ?
Merci pour vos réponses.
1) Quand il y a « de », il ne faut pas « dont » : c’est un pléonasme grammatical
– C’est de moi qu’il est amoureux. / c’est la personne dont je vous ai parlé.
– C’est de cela que je parle. / c’est ce dont il m’a parlé
2) ne…jamais = négation ==> Je n’ai jamais visité l’Australie
…jamais : un jour ==> Avez-vous jamais visité l’Australie ? Dans ce cas, je ne mettrais pas de négation.
Attention, vous pouvez formuler une interrogation négative : N’avez-vous jamais visité l’Australie ? (une phrase interro-négative : Ne voyez-vous pas que je suis là ?)
Voici un article complet ici.
« C’est.. que » est une formule d’instance (ou tournure emphatique) et il me paraît plus juste de ne pas la transformer en « c’est… dont », qui est nettement une hypercorrection (>> c’est moi dont il est amoureux ne passe pas)
J’opterai donc pour : c’est de moi qu‘il est amoureux – c’est de cette voiture que j’ai envie.
« C’est … qui » est aussi correct : c’est moi qui l’aime – c’est cette voiture qui me plaît.
Si on compare les couples de phrases :
1.C’est dans la maison qu’il est entré /2.c’est la maison où il est entré
1.C’est de mes amis que je te parle/2.c’est mes amis dont je te parle
On constate que le sens change : en 2 « c’est » n’est plus qu’un présentatif.
Une erreur est d’employer dont avec un antécédent précédé de la préposition de. C’est le cas notamment dans une proposition principale qui commence par C’est lorsque la subordonnée est introduite par dont.
Exemple :
– C’est de cette voiture dont j’ai envie.
Pour éviter le pléonasme, si on emploie la préposition de devant l’antécédent dans la proposition principale, on choisit le pronom relatif que ensuite dans la subordonnée, et non pas dont. On peut aussi, tout simplement, enlever le de.
Exemples :
– C’est de cette voiture que j’ai envie.
– C’est cette voiture dont j’ai envie.
++> C’est de lui que je suis amoureuse. OU : C’est lui dont je suis amoureuse.
A noter toutefois que le Bon usage ne considère pas comme fautif la construction C’est de… dont. Il en cite de nombreux ex. littéraires. Mais on sait que le B.U. est libéral…
En tout cas, je ne vous conseille pas d’imiter ces écrivains.
Merci beaucoup pour vos précisions.
J’ajoute quelques uns des ex. cités par le Bon usage ; il en cite plusieurs autres (Mauriac, Céline, Prévert, Zola, Bourget, etc.).
« Cela est surtout fréquent avec dont : C’est de lui dont il s’agit (Mlle de Maupin, iv ). , — C’est de dynamomètres dont le graveur a besoin (Droit de rêver, p. 72). , — C’est toujours des yeux de Nicolas dont je me souviens (
A ne pas imiter donc.
1/ D’accord avec Tara. Quand on veut dire « c’est… que », il faut écrire « c’est… que ». Introduit un cod (c’est lui que j’ai vu), un coi, (c’est de lui que je parle), un complément du nom (c’est de lui que je suis amoureux), un adverbe (c’est demain que je viendrai)…
Les autres tournures sont simplement des verbes suivis d’un attribut (edit: ou plutôt complément du présentatif), auquel vous pouvez certes rattacher un complément relatif avec « que » ou « dont » (c’est la voiture que je conduis, c’est la voiture dont j’ai envie…) mais les deux tournures ne sont certainement pas équivalentes comme le suggère la référence BDL.
2a/ Comment des gens coupables peuvent-ils imaginer qu’on leur pardonne jamais ? Pas de négation possible. Le mot « jamais » est mis pour dire « un jour » (qu’on puisse éventuellement pardonner un jour). On peut l’utiliser dans ce sens dans des hypothèses, des questions, ou des subordonnées dépendant d’une principale négative. Si jamais il vient, viendra-il jamais, je ne pense pas qu’il vienne jamais…
2b/ On n’écrit pas : As-tu jamais su que j’avais voyagé en inde ? ni : N’as-tu jamais su que j’avais voyagé en Inde ? mais : As-tu su que j’avais voyagé en inde ? ou N’as-tu pas su que… La question n’est pas de savoir s’il y a une nuance entre les deux mais de savoir qu’aucune des deux phrases n’a de sens clair. Tu as su ou tu n’as pas su, pas d’adverbe relativisant.
Tara et Nicola, à mon sens, la forme c’est … dont ne relève pas de l’hypercorrection, c’est simplement une forme un peu ancienne, mais non totalement disparue, de clivée, qui peut effectivement être ambiguë dans certains cas, mais au même titre que par exemple :
C’est la maison que j’ai achetée.
Relative : Regarde ! c’est la maison que j’ai achetée.
Clivée : C’est la maison que j’ai achetée (et non l’appartement).
On peut voir sur ce sujet par exemple le paragraphe c’est …qui/que. introducteurs. de l’ouvrage de Michèle Lenoble-Pinson dont sont extraits ces quelques exemples illustrant cet emploi :
Oui mais non. Vous attirez notre attention sur les deux premiers des « trois tours anciens » relevés par Michèle Lenoble-Pinson.
Même texte autre mise en page :
Le premier tour ancien consiste à placer la préposition après le mot sur lequel on veut insister.
– C’est à toi que je parle = C’est toi à qui je parle.
Mais avec « de », il faut alors aller au bout :
– C’est de toi que je parle = C’est toi de qui je parle.
Et l’exemple du livre est bien :
– On eût pu croire que c’était moi de qui l’absence la faisait souffrir.
Avec une chose plutôt qu’une personne, on aurait :
– C’est cette chose de quoi je parle.
C’est effectivement possible (un peu ancien quand même il faut reconnaître), mais on peut contester dans ce « tour ancien » l’utilisation du relatif « dont » :
– C’est cette chose dont je parle.
– C’est moi dont il est amoureux.
C’est non pour moi.
Le deuxième tour ancien est une monumentale erreur de l’auteur. Évidemment que ses phrases sont bonnes. D’où c’est qu’elle voit-elle un tour ancien dans :
– C’est l’homme dont je vous ai parlé.
La Michèle elle veut nous faire prendre une phrase présentative avec un complément relatif pour un tour ancien exceptionnel dans un paragraphe consacré à la mise en relief d’un élément de la phrase, à ce que Tara appelle formule d’insistance ou tournure emphatique. Ce point est ici complètement hors sujet.
Si on voulait vraiment mettre en relief un élément de la phrase, on écrirait :
– C’est de cet homme que je vous ai parlé.
Avec « c’est l’homme », ce sens est impossible. Si elle avait écrit « c’est l’homme de Cro-Magnon dont je vous ai parlé », elle aurait pu tenter de me convaincre (elle n’aurait pas réussi car il faut dire « c’est de l’homme de Cro-Magnon que je vous ai parlé »), mais là elle n’essaie même pas.
Elle prend des produits, je crois, la noble pinsonne.
On est précisément dans le cas de votre exemple « Relative : Regarde ! c’est la maison que j’ai achetée. », dans le cas de ce que Tara appelle un présentatif.
C’est-à-dire tout ce que nous voulons éviter avec la phrase de Marisa : « c’est moi dont il est amoureux » signifierait « me voici dont il est amoureux ». On pourrait éventuellement y trouver un sens, mais certainement pas le sens désiré.
Votre exemple double en revanche répond bien à ce que nous disons Tara et moi, et il montre surtout qu’il faut trancher.
C’est la maison que j’ai achetée.
Relative : Regarde ! c’est la maison que j’ai achetée.
Clivée : C’est la maison que j’ai achetée (et non l’appartement).
On veut justement éviter le sens de la relative suivant un présentatif :
– Voici la maison-que-j’ai achetée.
– C’est la femme-dont-il-est-amoureux.
– Voici la femme-dont-il-est-amoureux.
On veut le sens de ce vous appelez la clivée :
– C’est une maison, et non un appartement, que j’ai achetée.
– C’est de cette femme, et non d’une autre, qu’il est amoureux.
– C’est cette femme, et non une autre, de qui il est amoureux (tournure ancienne valide).
– C’est de moi qu’il est amoureux.
Et c’est bien parce que nous voulons ce sens de « c’est de moi qu’il est amoureux » que nous suggérons d’écrire « c’est de moi qu’il est amoureux ».
Concernant votre dernier point : je suis bien sûr d’accord, dans les constructions avec préposition, la forme avec qu- a l’avantage de ne pas être ambiguë.
Je suis également d’accord que l’exemple avec la personne n’est sans doute pas des plus heureux (on peut toutefois le sauver notamment en prenant la personne dans un emploi générique, avec par exemple : C’est la personne dont je me méfie le plus et non l’animal / la fonction / etc.), de même – mais a contrario – hmmm, c’est limite contradictoire formulé ainsi ! 🙂 – que celui de Tara avec le possessif : C’est mes amis dont je te parle me parait tel quel – sans virgule après amis et sans rien après parle difficilement pouvoir être une relative, contrairement à par exemple : C’est les amis dont je te parle.
Itou pour le C’est moi (et non toi) dont il est amoureux, que je vois mal – tel quel – être analysable en relative.
Avec un syntagme nominal, ça fonctionnerait et pourrait être interprété des deux façons.
Relative
C’est la fille dont il est amoureux : Regarde là-bas, la blonde, c’est la fille dont il est amoureux.
Clivée
C’est la fille dont il est amoureux : Mais non, c’est la fille – et pas le garçon – dont il est amoureux !
(Dans votre deuxième point, sur C’est toi de qui je parle vs C’est toi dont je parle, c’est juste une question de choix, puisque dont n’est que la forme condensée de de qui.)
On trouve d’autres exemples de ce tour dans le Bon Usage :
Si c’est mon portefeuille dont il s’agit.
Ce n’est pas cela dont j’ai besoin.
(Bien le truc du message pour être notifié ! Je fais de même.)
OK pour la conclusion. Si « c’est d’elle qu’il est amoureux » est l’usage le plus répandu, le « tour ancien », « c’est elle de qui il est amoureux » est valide, et l’exemple du portefeuille de Chateaubriand (absent chez MLP), montre que « c’est elle dont il est amoureux » est également valide. Il y a des cas rendant possible l’ambiguïté, et alors on fait gaffe. Mais formellement, ça reste possible de mettre « dont » après le nom en conservant le sens d’une phrase clivée.
C’est la démonstration par le livre de MLP qui est mauvaise. La page du BU est nettement plus parlante que celle de MLP. En comparant les deux, on voit qu’elle a ajouté un autre tour ancien (on passe de 2 dans le BU à 3 chez MLP).
J’ai dit que ses exemples prouvaient que son point 2 était posé là par erreur. Vous dites qu’en faisant un très gros effort pour redéfinir « la personne » ou « l’homme », on peut considérer qu’on reste dans la phrase clivée, dans la formule d’insistance « c’est que ». Je n’y crois pas une seconde, je suis à peu près certain que c’est une très grosse erreur de l’auteur, mais admettons. Alors le point 2 aurait dû être intégré au point 1, car il ne servirait donc qu’à préciser que le tour ancien avec « de qui » fonctionne même avec « dont » (ce dont je me suis un instant permis de douter, sur la base de son point 1).
Bonne semaine.
Oui, c’est vrai que cette division en trois sous-types parait a priori superflue. Peut-être y a-t-il une raison qui nous échappe pour l’heure.
(Cela dit, pour l’exemple avec l’homme, contrairement à celui avec la personne, il n’est pas besoin de faire des acrobaties : C’est de l’homme que je vous ai parlé = C’est l’homme dont je vous ai parlé (et non la femme) ; a contrario de C’est de la personne que je me méfie le plus qui est possiblement pas spontanément acceptée/acceptable.)
Merci, et bonne semaine à vous aussi ! 🙂
Mis-en-trope a écrit : C’est mes amis dont je te parle me parait tel quel – sans virgule après amis et sans rien après parle difficilement pouvoir être une relative, contrairement à par exemple : C’est les amis dont je te parle.
Tout à fait d’accord : si j’emploie la tournure d’insistance, je peux garder le possessif : C‘est de mes amis que je te parle
Possessif qui -comme vous le remarquez- apparaît erroné dans : c’est mes amis dont je te parle où le c’est …que a disparu pour laisser la place à un présentatif (c’est, voici). La relative « dont je te parle » détermine alors « amis » et le possessif tombe.
Dans la formule d’insistance : c’est… que, le « que » est une conjonction.
C’est cette fille qu’il connaît, pas l’autre : que = conjonction appartenant à c’est…que
C’est cette fille qu’il connaît qui est venue me voir : que = pronom – c’est = présentatif
C’est de la fille en rouge qu’il est amoureux : que = conjonction appartenant à « c’est… que » – on voit qu’une précision (l’adjectif « rouge ») s’impose pratiquement ici pour justifier la formule d’insistance qui est restrictive. Ou alors on oppose « fille » à « garçon » ou à « femme »
Si on remplace la conjonction par un pronom
C’est la fille dont il est amoureux : c’est n’est plus que présentatif.
Se pose alors la question de c’est …qui où « qui » ne peut être que pronom
C’est .. qui
1.c’est les amis qui sont venus me voir
Dès qu’on utilise le possessif, on retombe sur la formule d’insistance c’est…qui. C’est…où
2. C’est dans cette ville que je suis né, et pas dans la ville où j’habite. INSISTANCE
3. C’est cette ville où je suis né, et pas dans celle où j’habite.
Personnellement je n’accepterais pas la 3.
Comment faites-vous pour qu’il y ait notification ?
Tara, je pense que vous refusez la forme en dont comme clivée parce qu’elle est de nos jours moins usitée que la forme en qu-, et par conséquent nos oreilles contemporaines ne l’acceptent pas toujours spontanément ; elle reste néanmoins interprétable ainsi.
Et, non, non, je ne trouve pas l’énoncé C’est mes amis dont je te parle erroné, je pense, contrairement à ce que vous avez indiqué dans votre premier message, qu’il ne peut pas être interprétable comme une relative, mais uniquement comme une clivée. La relative n’est possible qu’en apposition (et sans doute avec une suite) : C’est mes amis, dont je te parle depuis toujours ou alors C’est mes amis, ceux dont je te parle (en ce moment).
(Pour notifier un commentaire, rédigez quelque chose dans le cadre « votre réponse », puis effacez-la après l’avoir publiée.)
Merci Mis-e!
Après tout, peut-être avez-vous raison…
Je vous en prie Tara ! (au pseudo non estropié ! :D)
Ce sont surtout les grammairiens, dont je me contente de relayer les propos.