Les plants de pomme de terre
Bonjour,
Je désirais connaître la règle qui régit « les plants de pomme de terre ». Pourquoi ne met-on pas de « s » à pomme alors que dans la littérature, nous pouvons trouver des plants de choux, des plants de ravenelles…. Pourquoi certains sont au pluriel et d’autres au singulier.
Merci par avance,
Attention, plant a ces sens-là (Dictionnaire de l’Académie, entrée Plant) :
« PLANT n. m. xve siècle. Déverbal de planter. Jeune tige récemment plantée ou destinée à l’être. Un plant de vigne, de tabac. Arroser des plants de tomate. Un plant à racines nues, en motte. Un plant en pot. Jeune plant, nouveau plant, en parlant de la vigne ou des arbres fruitiers, qui ne donne pas encore ou commence à donner ; en parlant des autres arbres, qui n’a pas plus de vingt ou trente ans. Gros-plant, voir ce mot. Par ext. Ensemble des végétaux de la même espèce plantés sur un terrain et, par méton., ce terrain lui-même. Un plant d’artichauts. »
Dès lors, si Alain Bentolila a employé plant dans le premier sens, il a eu raison d’écrire plants de pomme de terre.
Bonjour Prince, je pense que personne ne conteste que l’orthographe des plants de pomme de terre (pomme au singulier) soit correcte et justifiée. La question est de savoir si des plants de pommes de terre est acceptable ou non et s’il est légitime de la considérer comme une faute. Mon avis, que j’ai donné plus haut, est que cette orthographe est acceptable et que décompter une faute est totalement injuste. Quelle serait votre position sur ce point ?
Bonjour Christian,
1. Vous avez écrit :
[…] personne ne conteste que l’orthographe des plants de pomme de terre (pomme au singulier) soit correcte et justifiée.
Il me semble bien que si. En effet, czardas a écarté cette graphie (comportant donc pomme au sing.), puisqu’il a écrit : « Ainsi un plant de pomme de terre a pour pluriel des plants de pommes de terre. »
2. Sur le fond, voyez, SVP, mon précédent message. J’essaie d’expliciter davantage :
– si plant est pris dans le sens de « Jeune tige récemment plantée ou destinée à l’être » (1), il convient, à mon sens, d’écrire les plants de pomme de terre ;
– si plant est entendu comme « Ensemble des végétaux de la même espèce plantés sur un terrain » (2), il y a lieu d’écrire, à mon avis, les plants de pommes de terre.
Au demeurant, l’Académie française donne comme exemple d’emploi de plants au premier sens (1) : Arroser des plants de tomate. En revanche, elle illustre le deuxième sens de plant (2) ainsi : Un plant d’artichauts (soit, bien évidemment, en écrivant plant au pluriel : des plants d’artichauts). Dès lors, l’existence d’une faute dépend de l’acception du mot plants dans la dictée. De plus, il m’étonnerait beaucoup que Alain Bentolila, linguiste stricto sensu, mais aussi grammairien (cf. le Bescherelle, grammaire, Hatier ; membre de la commission « Erik Orsenna » sur la grammaire, etc.) ait commis une faute d’orthographe en l’espèce…
Cordialement.
Effectivement, j’aurais donc dû écrire « personne sauf Czardas » 🙂 . À sa décharge, lorsqu’il a répondu (trop rapidement sans doute, et de façon erronée), le contexte de la question (une dictée) n’avait pas encore été précisé. Mais bref… Il était inutile de vous relancer dans une explication aussi longue et argumentée pour nous réexpliquer pourquoi l’orthographe choisie par Bentolila est correcte. La question que je vous posais (en aucune façon par esprit de polémique mais juste parce que votre avis d’expert m’intéresse) était et est toujours : selon vous, faut-il oui ou non considérer l’orthographe « des plants de pommes de terre » comme fautive ?
On ne met pas de pluriel au nom « pomme de terre » au prétexte que la plante donne plusieurs pommes de terre.
« Plant » doit être suivi du nom de la plante et non du nom de son produit : un plant de fraisier, et non pas un plant de fraises. On voit au passage qu’il ne s’agit pas d’un complément du nom mais d’une apposition (1). Le plant et le fraisier sont une même chose. On parle du fraisier en tant que c’est un plant. Le fruticulteur parle de ses plants de fraisiers, parce qu’il a en tête de les mettre en terre. Un plant de fraisier, c’est un fraisier considéré selon sa forme, sa destination, sa caractéristique, soit qu’il est jeune, soit qu’il est prêt à être mis en terre, soit qu’il est déjà planté. Donc : un plant de fraisier, des plants de fraisiers.
Parfois, la plante et son produit portent le même nom, surtout si la plante ne donne qu’un seul produit. Le mot navetier n’existe pas, et il n’y a pas de mots différents pour le navet plante et pour le navet racine comestible. On pourrait donc se poser la question : complément du nom (un plant qui donne un navet) ou apposition (un plant qui est est une plante qu’on nomme navet). Mais la réponse est la même : un plant de navet, des plants de navets. Un plant de navet, c’est un navet en plant (2). Il s’agit toujours de la plante considérée sous sa forme plantée ou à planter, son produit n’importe pas.
On a donc vu que plant n’est pas synonyme de plante. Le plant n’est pas une plante. C’est un mot qui montre la façon dont on considère la plante, comme étant destinée à être plantée, ou comme ayant été mise en terre.
Mais quel est le nom de la plante « pomme de terre » ?
Mon dictionnaire dit que « pomme de terre » est d’abord le nom d’une plante, puis son produit par métonymie, et va même beaucoup trop loin dans cette idée (3), c’est indéfendable. Je crois pour ma part qu’il y a un nom pour l’espèce de plante (le genre, la famille…), un mot pour le produit (le tubercule), mais que nous ne trouvons pas de nom spécifique pour la plante qui pousse ; on ne peut pas dire en montrant des feuilles sortant de terre : ceci est une pomme de terre. Il n’y a pas non plus de possibilité d’arroser un pomme de terre.
Pour les tomates, on a forgé le mot « tomatier », qui peut s’utiliser au singulier, qui cohabite avec « plant de tomate ». On utilise ici le nom de l’espèce, mais on ne peut toujours pas utiliser le nom du produit : un « plant de tomates », surtout quand il n’y a pas encore de tomates, ce n’est toujours pas possible selon le sens du mot « plant ».
Mais pour les pommes de terre, rien, il n’y a pas de « pommiers de terre ». Donc, pour les pommes de terre, comme on ne peut toujours pas utiliser le nom du produit, pour désigner la plante on utilise le mot « plant » associé au nom de l’espèce (pomme de terre). Et les noms d’espèce ne se mettent pas au pluriel, sauf par métonymie (quand l’individu prend le nom du genre : une bintje).
On pallie l’absence d’un mot représentant la plante par l’utilisation d’un mot lié au mode de production (le seul dont on dispose pour des raisons historiques) + un nom d’espèce. Et on aboutit au singulier : un plant de pomme de terre, des plants de pomme de terre.
Ce n’est plus une apposition appelant le pluriel, comme pour les plants de fraisiers, mais un complément du nom qui modifie le sens du mot « plant » en lui adjoignant un nom d’espèce, forcément au singulier.
J’approuve donc Alain Bentolila et je me demande si votre fille a réellement le niveau CM1. Elle me semble très dé*** ctée de l’agriculture et de la grammaire. A-t-elle seulement lu Bachelard ? Vous occupez-vous assez bien d’elle ?
Note (1). Complément du nom ou apposition.
Le mot « de » peut introduire un complément du nom ou un nom apposé. Le complément du nom ne désigne pas la même chose que le nom, il ajoute de l’information sur le mot qu’il complète. L’apposition est jointe à un nom, mais désigne la même chose que le nom. L’exemple classique est :
— Les rues de Paris = complément du nom.
— La ville de Paris = apposition pour préciser une approche : Paris, en tant que c’est une ville.
Note (2). L’idée d’arbre préexiste à sa plantation. Un arbre peut se dresser indépendamment de l’idée qu’il a été planté. Mais l’idée de plant de cerisier ne préexiste pas au cerisier. Un plant de cerisier est un cerisier sous forme de plant. Le mot « plant » ne se complète pas par un complément du nom, mais il complète un nom en précisant sa forme, son statut ou sa destination.
Note (3). Le TLF dit que la « pomme de terre » est une plante, sens A, et par métonymie, sens B, le tubercule comestible de cette plante. C’est-à-dire que selon ses auteurs, c’est la plante qui aurait donné son nom au tubercule. C’est évidemment faux, nous savons tous très bien que c’est l’inverse : on a donné le nom de « pomme » au tubercule, à cause de sa forme et parce qu’on la mange (et je crois aussi pour des raisons historiques de marketing), puis on a étendu le sens du mot à la nouvelle espèce de plante importée.
Merci pour votre réponse, elle me conforte dans mon idée car ma fille dans sa dictée a mis des « s » et donc fautes (oui le mot y était 2 fois et au pluriel), j’ai donc fait part de mon étonnement à son maître d’école dont voici la réponse:
« La dictée est tirée d’un ouvrage du linguiste Alain Bentolila, 10 sur 10 en dictée qui est largement meilleur que moi en la matière. Donc je m’en tiendrai à cela, c’est à dire la pomme de terre au sens générique, singulier. Il se peut qu’on trouve effectivement d’autres acceptions sur internet. Je conserve celle-ci pour toute la classe. »
Je n’ai rien trouvé de clair sur le sujet dans le Grevisse.
Bonjour Laurence.
Un plant est un ensemble de végétaux de même espèce plantés dans un même terrain. Des lors, j’écrirais « un plant de pommes de terre » comme j’écrirais « un plant de tomates, un plant de salades, etc. »
Probablement que le singulier est plus courant mais il n’est pas plus logique. Quoi qu’il en soit, le pluriel ne peut pas être considéré comme fautif. On peut soir considérer le générique (singulier) ou les éléments en eux-mêmes (pluriel). Perso, je n’utiliserais pas de générique ici. J’utiliserais un générique pour, par exemple, « un forum de rencontre, une salle de conférence, etc. »
On trouve les deux formes sur internet.
Bonne journée 🙂
Bonjour Tony, merci pour la réponse.
Oui, je suis d’accord avec vous quand on prend le « plant » comme parcelle. Dans le cas de la dite dictée, le plant est pris comme un végétal, une plante: les doryphores mangent les feuilles des plants de pomme(s) de terre.
D’où mes recherches!
Cordialement,
Merci, pour vos différents éclairages mais si je reprends ce que dit Prince, si l’on se place dans le sens premier (jeune plant) que dois-je penser de la phrase de Zola que l’on trouve dans le TFLi: « Maheu, l’après-midi, travailla dans son jardin. (…) il tenait en jauge, depuis la veille, du plant de choux et de laitue, qu’il se mit à repiquer. »? Qu’il y avait différentes sortes de choux? Ou pour Mirbeau: « J’ai revu le capitaine Mauger, par dessus la haie… Accroupi devant une plate-bande, nouvellement bêchée, il repiquait des plants de pensées…. » Et pareil pour les pensées?
Cordialement,
Pour la gomme, personnellement, je n’aurais pas hésité car la gomme étant une matière non dénombrable, le « S » ne me serait pas venue à l’idée avec « boules » au pluriel. Pour Numéric, si je me suis tournée vers votre site, c’est que les réponses que j’ai eu de la part d’enseignants, instituteurs ou professeurs de lettres de ma connaissance, étaient très partagées et sans explication pour les étayer. Comme je m’occupe, je pense, un minimum de ma fille qui est au CE2, j’ai voulu lui donner une explication recevable pour son erreur et pour m’améliorer en même temps.
LaurenceA,
Je pense que la phrase* de Zola que vous avez extraite du TLFi, est inexploitable en ce qui concerne la question qui nous occupe : on ne peut pas tirer de la graphie plant de choux la conclusion qu’il faudrait écrire un plant de pommes de terre et donc des plants de pommes de terre. En effet, du plant de choux (donc avec la marque du pluriel x) est suivi de et de laitue (donc sans la marque du pluriel s) et dans dans le même article dictionnairique, on trouve plant de chou** (ex. du TLFi lui-même) !
Dès lors, je m’en tiens à la graphie les plants de pomme de terre (pour le cas où plants est employé dans le sens 1 supra), fondée sur la distinction que fait et les ex. que donne l’Académie française et, accessoirement, sur la qualité de grammairien de l’auteur de la phrase en question.
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* « Maheu, l’après-midi, travailla dans son jardin. (…) il tenait en jauge, depuis la veille, du plant de choux et de laitue, qu’il se mit à repiquer. »
** « − AGRIC., HORTIC.
Merci beaucoup Prince, j’ai compris l’idée, j’en ai fait part à ma fille et, a priori, elle a compris. Votre explication était très claire.
Bonjour,
Le pluriel de pomme de terre est pommes de terre.
Ainsi un plant de pomme de terre a pour pluriel des plants de pommes de terre.
Réponse non recevable, Czardas : votre raisonnement à l’emporte-pièce tend à faire penser que dans des construction du type un X de Y (Y étant complément du nom X), le nombre (singulier ou pluriel) de Y s’aligne sur celui de X, ce qui est en général complètement faux. Diriez vous que le pluriel de gomme étant gommes, celui de une boule de gomme serait des boules de gommes ?
Vous devez savoir que le mot gomme est polysémique et qu’il ne se met au pluriel que lorsqu’il désigne un petit bloc de substance caoutchouteuse ou de matière synthétique qui sert à effacer les traits de crayon ou d’encre.
Une boule de gomme est un bonbon fait de gomme arabique, de pâte pectorale et de sucre.
Votre contre-exemple est irrecevable.
czardas
Bonjour,
Je cherche en vain le livre de M. Alain Bentolila. Pourriez-vous demander à l’instituteur de votre fille le numéro ISBN de cet ouvrage.
Cordialement.